Nous vivons dans un monde économique, financier étrange et fou avec des informations contradictoires. Il y a les Macron qui ne pensent qu’au marché du travail et aux jeunes pousses, les Cassandre pessimistes et réalistes, les médias optimistes et menteurs, mais parfois la vérité sort d’une façon paradoxale et inattendue de la bouche même de l’institution la plus officielle, la plus haut gradée du Système : la BRI, la Banque des règlements internationaux, surnommée la « banque centrale des banques centrales » pour les soixante pays qui en sont membres, créée à Bâle en 1930. 

Voici ce que déclare Claudio Borio, le chef du département monétaire et économique de la BRI, dans le dernier rapport trimestriel qui vient d’être publié et présenté le 17/09/2017 :

Le désendettement n’a pas eu lieu : depuis 2008, "les niveaux de la dette mondiale en proportion du PIB ont continué d’augmenter. Le désendettement n’a pas vraiment eu lieu. Là où les niveaux de dette privée ont, dans une certaine mesure au moins, diminué, la dette publique a pris le relais."
Les taux ridiculement bas ont créé des bulles.
Les auteurs du rapport parlent du trop grand nombre d'"entreprises zombies" (dans le texte) qui survivent avec les taux zéro.
Les banques centrales sont piégées : "Il existe une forme de circularité risquant d’aboutir à un piège de la dette." Autrement dit, plus possible de remonter les taux d’intérêt et de sortir de l’assouplissement quantitatif.

Il faut s’attendre à des crises bancaires ! "Les indicateurs avancés dans les systèmes bancaires signalent l’existence de risques pour les années à venir."
Et le bouquet… lorsque la BRI ose écrire que personne ne comprend pourquoi l’inflation reste si faible, la "question à mille milliards de dollars", selon les termes mêmes usités par Claudio Borio.
Et de continuer : "L’éternel éléphant dans le magasin de porcelaine reste que les marchés obligataires sous-estiment le rythme à venir du resserrement monétaire de la Fed." "Les valorisations des marchés actions poursuivent leur hausse tandis que les révisions des résultats sont en décalage par rapport aux valorisations."
Il faut savoir, en effet, que les grandes banques centrales ont 14.400 milliards de dollars de titres obligataires à leur actif qui ne devraient pas y figurer, que le ratio Shiller cours/bénéfices du S&P 500 est actuellement à 30,68, soit plus élevé qu’en 1929, que la dette mondiale est passée de 276 % du PIB mondial en 2008 à 327 % aujourd’hui.

La Fed n’a plus de marge pour rabaisser les taux d’intérêt en cas de récession ou de crise et madame Yellen peut craindre à juste titre que l’inflation ne ressorte de sa boîte d’une façon violente et soudaine comme à la fin des années 60.

Janet Yellen a pris enfin la décision tant attendue d’inverser, en octobre prochain, le programme d’assouplissement quantitatif aux États-Unis. Tout cela se passera dans le calme et d’une façon très lente, selon madame Yellen. Ce sera, dit-elle, comme "regarder de la peinture sécher". Mais rien n’est moins sûr, car la Deutsche Bank qualifie au contraire cet événement de "grand détricotage", et de candidat numéro 1 des éléments déclencheurs de la prochaine crise financière mondiale.

Il semble, en fait, que madame Yellen, partante très probable de la présidence de la Fed, se soit aventurée sur un terrain très glissant et qu’elle aurait mieux fait de relever les taux d’intérêt à des niveaux plus élevés au lieu de commencer à vendre progressivement, dès octobre 2017, une partie des actifs de la Fed.

De son côté, Mario Draghi, le président de la BCE, affirmait sans rire, le 7 septembre dernier, qu’il ne "voyait pas de risque systémique". Il semble bien, en fait, que le monde économique et financier soit en train de vivre une folle saga à la Kafka !

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23 septembre 2017 à 10:02

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