Toulouse : un contrôleur agressé se défend, il écope d’une mise à pied

Dans les couloirs du métro toulousain, l’expression arroseur arrosé n’a aucun sens. Ici, l’arrosé est réarrosé.
Aggressive,Violent,Man,In,A,Fight,,With,A,Bloody,Fist.

Bis repetita. Dans les transports en commun, les jours se suivent et se ressemblent. Le mardi 13 mai, un responsable d'équipe de contrôleurs de Tisséo (réseau de transports en commun de Toulouse et sa région) est passé en conseil de discipline. Son tort : s’être défendu.

Le 24 mars dernier, Thierry, 59 ans, ancien militaire devenu contrôleur pour la régie des transports toulousains en 2005, encadre une opération de contrôle à la station Ramonville, terminus de la ligne B du métro. Un agent sous sa responsabilité signale un individu en train de vapoter sur le quai. Malgré un rappel à l’ordre, le contrevenant continue et nargue l’agent lui ayant fait la remarque. Thierry, accompagné d’un collègue, décide d’intervenir quand le vapoteur entre dans le métro. Il lui demande de descendre de la rame pour un rappel à la règle. L’usager ne l’entend pas de cette oreille. Il pousse Thierry et remonte dans le métro. Ni une ni deux, l’ancien militaire le suit, seul.

Une réaction compréhensible

La situation s’envenime. Le chef d’équipe se retrouve face à deux individus qui l’insultent et le menacent. L’un d’entre eux essaye de lui donner un coup. Cela n’impressionne pas le contrôleur qui raconte à nos confrères de La Dépêche : « J'ai réagi par réflexe, en lui portant un coup d'arrêt. Je l'ai immobilisé contre une porte, en craignant qu'il sorte une arme. » Alertés, à la station suivante, des agents de prévention interviennent. La police arrive et interpelle l’usager, qui n’est pas un inconnu pour les forces de l’ordre.

L’histoire aurait pu en rester là. Mieux : la bravoure de Thierry, connu pour avoir neutralisé deux hommes, l’un armé d'un couteau et l’autre d'une machette, en 2022, sur le réseau toulousain, aurait pu être saluée. Il en a été tout autrement. Quelques jours après l’altercation, le contrôleur reçoit une convocation pour un conseil de discipline dont l’issue peut être le licenciement. Thierry est dans une totale incompréhension : « Je ne comprends pas. J'ai voulu garantir la sécurité, j'ai réagi avec sang-froid. Trois jours plus tard, l'usager m'a présenté ses excuses. » Le 13 mai dernier, le contrôleur se retrouve donc devant ses supérieurs pour rendre des comptes. À l'issue de cet entretien, une mise à pied, dont la durée nous est inconnue, lui est infligée.

Dans les colonnes de La Dépêche, Thierry Wischnewski, directeur général de Tisséo Voyageurs, assurait qu’il n’avait « jamais été question de le licencier », tout en affirmant : « Frapper un usager est inacceptable, mais notre intention est pédagogique. Le conseil de discipline est un cadre de dialogue, pas de stigmatisation. »

Une réaction incompréhensible

Comme en décembre 2024, lorsqu’un chauffeur de bus avait été convoqué pour un entretien du même genre pour avoir demandé, avec virulence, à un fraudeur de quitter son véhicule ? Pour rappel, ce dernier avait été insulté et menacé à cette occasion. « Je t’encule la mère la pute ! », « Fils de pute » et « Nique ta mère la pute » étaient quelques-unes des bonnes phrases qui avaient fusé, à l’époque. En guise de marque de soutien de la part de son employeur, il avait écopé d’une mise à pied d’une journée.

Nous le disions, les jours se suivent et se ressemblent. Des agents de la régie des transports toulousaine, tentant de faire leur métier correctement, sont importunés (le mot est faible) et finissent par être sanctionnés pour avoir réagi. La réponse de Tisséo à ces situations pose de nombreuses questions. Quel message l’entreprise entend-elle envoyer à ses salariés ? Faut-il comprendre que, quels que soient les problèmes rencontrés, ils doivent laisser faire, se laisser faire ? Certes, Tisséo est une entreprise de service et les employés doivent être irréprochables, mais doivent-ils pour autant accepter l'inacceptable ?

Quant aux usagers problématiques, que doivent-ils comprendre ? Qu’ils peuvent agir impunément ? Que seuls ceux qui risquent des sanctions sont les agents de la régie ?

Pour mieux comprendre sa position, BV a interrogé Tisséo. « Nous ne réagissons pas. Merci de votre compréhension », fut le seul retour obtenu. Nous aurions envie de dire : « Inutile de nous remercier car nous ne comprenons pas. »

Le 5 juillet 2020, un chauffeur de bus, Philippe Monguillot, a perdu la vie à Bayonne, suite à une agression dans son véhicule. À Marseille, en janvier dernier, un conducteur a été frappé à coups de batte de baseball. À Villenave-d’Ornon, près de Bordeaux, il y a quatre jours, un autre a été roué de coups pour avoir demandé un bonjour… La liste est longue et ne cesse de s’allonger. Que faut-il de plus, aux compagnies de transport, pour apporter un soutien sans faille à leurs employés qui demandent simplement à travailler dans de bonnes conditions, sans risquer leur vie à chaque virage ?

Vos commentaires

65 commentaires

  1. Si les agents chargés des contrôles et de la sécurité se font sanctionner lorsqu’ils font leur travail alors supprimons ces fonctions ainsi nous ferons des économies, non ?
    Ah j’oubliais, on permettra ainsi une installation facilitée de l’anarchie et de la délinquance.
    Et si on virait plutôt ces semeurs de troubles qui fonctionnent comme « conseil de discipline » stupides et incompétents ?

  2. La direction de Tisséo N’a pas voulu réagir. Mais qu’en pense le maire de Toulouse? Est ce qu’il soutient le contrôleur ou est ce qu’il se couche lui aussi?

  3. On pourrait en savoir plus sur l’usager récalcitrant ? je soupçonne qu’il doit appartenir à la population la plus protégée de France , celle qui a le droit de violer la loi sans problème , donc de faire sa loi .

  4. Le problème est bien plus large. Les autorités tendent à réprimer le fait de se défendre. Même un mort n’est pas sûr d’être exempt de culpabilité, car au fond, il avait peut-être bien cherché ce qui lui est arrivé. Si un agressé blesse son agresseur, celui-ci est fondé à obtenir indemnisation pour sa blessure. Si un propriétaire subit un squatter, il ne peut le chasser, il doit payer les factures de consommables, comme les frais d’avocat et de justice, et les réparations des dégradations commises. Le squatter bénéficie de l’aide juridictionnelle. L’homme de 80 ans agressé chez lui par trois jeunes fripouilles de 20 ans entrainées aux arts martiaux et armées de battes ou de couteaux, doit répondre à l’agression avec les mêmes armes. Et ainsi de suite. Et ceci commence dès les petites classes, ce qui permet aux brutes d’imposer leur loi. Ainsi grandissent des générations de lâches, et les policiers menacés dans leur vie n’osent même pas sortir leur arme. Comment dans ces conditions pourraient-ils protéger les citoyens? L’insécurité grandit, mais les lois et les juges n’en portent-ils pas la responsabilité?

  5. Sarah-Louise , c’est la recommandation d’Oswald Baudot ( 1974) qui s’applique . Condamner la victime pour mieux protéger le pauvre coupable .
    Aujourd’hui je ne serais as fier de m’appeler Thierry Wischnewski.

  6. A l’attention de GALION
     » Je pense que pour les prochaines élections municipales il a du soucis à se faire ! »disons plutot on espère…

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