Télétravail, fraudes au chômage partiel : les impacts du grand confinement 

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Beaucoup d’employés ont pris goût au télétravail car ils évitent ainsi les trajets parfois très longs, ils s’organisent mieux chez eux (s’ils n’ont pas des enfants trop accaparants). Cependant, si le télétravail va désormais prendre une importance qu’il n’avait pas avant le Covid-19, le passage au bureau restera indispensable, au moins un ou deux jours par semaine.

Nombre de managers doivent, désormais, ruser pour attirer leurs collaborateurs au siège de l’entreprise. En effet, si les projets déjà définis et avancés peuvent être développés chez soi, avec des vidéoconférences pour régler les problèmes qui se posent, il n’en est pas de même des nouveaux dossiers, qu’il faut souvent monter à partir du néant. Avoir un interlocuteur devant soi et non derrière une caméra est alors indispensable. Pour arriver à leurs fins, les managers placent une réunion en présentiel obligatoire, collectif ou en tête-à-tête, un jour défini de la semaine, invitent à déjeuner, s’appuient sur leur propre exemple. Heureusement pour les dirigeants, la part du télétravail va s’éroder spontanément, les employés se lassant de rester sans cesse chez eux (le célèbre logiciel Zoom de vidéoconférence provoque déjà des burn out), même si une partie de leur travail restera délocalisée. On peut espérer de cette nouvelle organisation des gains de productivité importants et des économies sur le nombre de bureaux nécessaires pour les entreprises. Cela sera bien utile à l’économie à la dérive de la France.

Il existe, malheureusement, une face plus sombre du grand confinement : les fraudes au chômage partiel. La France, plus généreuse que ses voisins, a financé à 84 % du chômage partiel (soit plus 20 milliards d’euros, 1 % du PIB). Or, sur 3.000 dossiers choisis d’une manière aléatoire, contrôlés et clôturés, 1.600 ont été jugés corrects, 600 ont fait l’objet d’ajustements en faveur ou en défaveur de l’entreprise, mais 850 (35 % !) sont suspectés de fraude.

Ce chiffre énorme tient sans doute à la simplicité du dispositif voulue pour soutenir la consommation : si les documents à fournir par l’entreprise avaient été trop nombreux, les employeurs n’auraient reçu le remboursement des salaires que tardivement ; ils auraient eu alors sans doute des difficultés pour payer leurs employés, portant un nouveau coup à l’économie française. La légèreté initiale du dispositif était donc indispensable, mais l’être humain étant ce qu’il est, beaucoup ont sauté sur l’occasion pour frauder au risque de deux ans de prison ferme, de 30.000 € d’amende, du remboursement des aides et de l’exclusion des aides pendant cinq ans.

Le jeu en valait-il la chandelle ? Dans les Hauts-de-France, on a même déclenché quatre enquêtes pénales pour escroquerie : par exemple, un aigrefin a créé cinq entreprises pour 67 employés sans jamais payer de charges pour ces derniers.

D’ici à la fin de l’été, le gouvernement espère avoir contrôlé 50.000 entreprises et découvert un maximum de dysfonctionnements, aidé en cela par les syndicats. Mais les moyens de rétorsion du pouvoir sont limités. Punir trop sévèrement une société fautive risque de la mettre en faillite. On peut donc parier que beaucoup de fraudes seront classées comme erreurs et n’auront pas de suites trop importantes.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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