« Elle est belle ! Regardez la finesse de sa ligne, ses formes avantageuses et son style qui en dit long sur son caractère bien trempé… »

Non, vous n’écoutez pas un dragueur invétéré dépeignant une belle passante depuis une terrasse de café, mais vous êtes en train de négocier avec un vendeur représentant une grande marque d’automobile allemande. Cette scène est de plus en plus fréquente et il semblerait que l’automobile allemande connaisse un succès de plus en plus important dans l’Hexagone. J’en veux pour preuve une augmentation constante des mises en circulation (une voiture sur cinq, en France, est allemande), des campagnes publicitaires omniprésentes sur nos écrans et sur des panneaux publicitaires qui, au passage, massacrent le paysage urbain.

Après tout, une voiture ne devrait pas être allemande, comme une montre suisse, un parfum français ou un hamburger américain ?

La qualité des véhicules est souvent mise en avant alors qu’en fin de compte, c’est la valeur symbolique qui prime. La valeur symbolique, cela veut dire indiquer aux tiers, de par la possession du véhicule, son appartenance à une classe sociale supérieure, qui implique l’adhésion à certaines valeurs d’esthétique, de raffinement et de discernement assez peu partagées.

Pour résumer : je roule en voiture allemande, donc j’ai réussi dans la vie et j’appartiens au milieu des happy few qui ont su faire rimer mondialisation et réussite économique, contrairement au petit Blanc français qui roule français !

Répondons, si vous le voulez bien, à cet argument : en achetant une voiture allemande, vous creusez encore un peu plus le déficit commercial de la France (mais la France existe-t-elle toujours pour nos élites mondialisées ?). De plus, vous renforcez la première puissance économique de l’Europe en créant corrélativement plus de chômage au sein des groupes automobiles français. Vous donnez raison à un cartel industriel qui, pendant des années, a faussé les résultats de tests antipollution dans le seul but d’augmenter ses ventes.

In fine, vous faites primer le paraître sur l’être, la consommation sur la culture, l’étranger sur le national, une haine de soi qui ne dit pas son nom, en quelque sorte, qui est à l’origine de tous nos maux actuels.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 18:45.

5269 vues

08 avril 2018 à 21:24

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.