Relayer une vidéo en passe de devenir plus grave qu’agresser une grand-mère

Capture d’écran (2677)

Ce lundi soir, à Bordeaux, a eu lieu une très violente agression filmée. Une grand-mère de 73 ans et sa petite-fille ont ainsi été sauvagement agressées par un marginal. Heureusement, elles s’en sortent avec peu de blessures. Un miracle, après avoir été littéralement jetées dans les airs.

La violence de ce « vol avec violence » a été filmée par un visiophone à l’entrée de l’immeuble. Extrêmement choquante, la vidéo a rapidement fait le tour du Net.

Mais plutôt que de poser des questions sur la violence de l’agresseur, par ailleurs connu pour une cinquantaine de faits par la police, ce qui prédomine désormais, au centre et à gauche, ce sont les avertissements contre le fait de relayer des vidéos dont on parle.

S’appuyant sur l’article 222-33-3 du Code pénal, BFM TV a ainsi publié un article au ton clairement menaçant : « Agression à Bordeaux : relayer la vidéo sur les réseaux sociaux peut vous coûter très cher. » Pourtant, rien n’est moins sûr si l’on se fie à la volonté du législateur au moment du vote. Cette disposition du Code pénal a été votée afin de punir les complices des agresseurs qui utilisent la vidéo pour encourager l’agression. A priori, absolument pas pour empêcher de publiquement dénoncer ces violences.

D’ailleurs, cet article punit la diffusion de vidéos en l’assimilant à une complicité, ce qui prouve d’ailleurs que cet article vise à punir le complice réel de l’agression, celui présent sur place et qui souhaite pousser l’auteur à commettre le crime ou le délit en le filmant. Comment imaginer qu’un tribunal assimile le fait de partager une vidéo à une complicité d’agression ?

En 2009, une député socialiste de l’Hérault avait d’ailleurs posé une question écrite au gouvernement, s’inquiétant des potentielles dérives de cette législation. Le gouvernement, qui avait fait voter cette loi, avait confirmé que « ces dispositions ont été adoptées par le Parlement afin de réprimer les pratiques dites de "happy slapping" par lesquelles des personnes filment, le plus souvent avec leur téléphone portable, des actes de violence commis par des tiers, en pratique, en vue de leur diffusion et dans l'intention de glorifier les actes commis ou de nuire à la réputation ou à la dignité de la victime. »

La vidéo au service de la démocratie

Depuis plusieurs années, les réseaux sociaux, et principalement Twitter, permettent de diffuser des vidéos de la vie quotidienne. Elles filment des cascades, des situations comiques, mais aussi parfois des crimes et des délits.

Cette nouvelle réalité a permis de mettre des visages sur les arides dénominations pénales. Grâce aux téléphones portables, des « coups et blessures volontaires » obtiennent des émotions, celles des victimes, approchant davantage la réalité. Et c’est tant mieux !

L’information est la base de la démocratie, d’où le rôle si fondamental d’ailleurs des médias, qu’ils soient institutionnels ou non. Avoir les bonnes informations permet de faire des choix éclairés. L’offensive médiatique, fondée sur l’intimidation, contre l'acte citoyen de relayer des agressions graves, pose beaucoup de questions. Dans quelle mesure sommes-nous dans une démocratie ? Sommes-nous, d’ailleurs, en train de perdre ce trésor ? C’est un fait : nous vivons dans un monde de vidéos et de réseaux sociaux. Il faut vivre avec ! À moins d’assumer de vivre en Chine ou en Russie…

Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

26 commentaires

  1. Il serait urgent de modifier le statut des juges. En effet ceux-ci sont irresponsables des décisions qu’ils prennent et peuvent interpréter les lois comme bon leur semble et après elles font jurisprudence et la loi d’origine votée par le parlement qui est le seul à pouvoir légiférer, ne ressemblent plus à rien, d’où une république des juges.
    Ce qu’il faudrait c’est que ces magistrats, au lieu d’être nommés et intouchables, soient ÉLUS en même temps que le maire qu’ils soient révocables et condamnables.

    • Ce ne serait pas la panacée, surtout avec notre système électoral. On pourrait ainsi aboutir à une ribambelle de tribunaux peuplés de petits macron. Le rêve!

  2. Attention de ne pas se laisser abuser par une illusion d’optique. Cette vidéo montre un jeune homme bien sous tout rapport ayant glissé et qui s’appuie sur le mur. Quant aux présumées victimes, rien ne montre leur culpabilité dans cette affaire. De plus, même si elles ont râté la marche de leur porte d’entrée, elles n’ont aucun dommage, et donc il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Attendons la conclusion de l’enquête dans 6 mois-1 an, pour savoir le fin mot de tout ça.

  3. Si l’agresseur avait été blanc et blond pas de problème pour diffuser la vidéo et je suis certain qu’il aurait été en plus de droite !

  4. Vidéo ou pas vidéo, ce qui est cocasse en 2023 est que ( il ne s’agit naturellement que d’obéir aux éléments de langage ad hoc ) ,relater des infos qui dérangent… _ qui ? ceux qui occultent ces infos _ est appellé : « récupération ». Péguy expliquait qu’il ne suffit pas de dire ce que l’on voit mais _ surtout _ de voir ce que l’on voit… Donc il faudrait pour « bien faire » attendre, l’enquête _ et ce, pour toutes les affaires qui dérangent _ attendre également les expertises, le jugement, et ensuite, peut-être en parler…

  5. Est-ce que les média qui occultent la réalité des agressions n’en sont pas les véritables complices ? Pourquoi BFM TV et d’autres ne veulent ils pas mettre en lumière ces innombrables agressions sinon pour permettre que le phénomène croisse et embellisse ?

  6. Pour moi ce n’est pas un Français c’est un immigré qui est devenu Français pour le malheur des Français .

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