Palme d’or à Cannes : concours de mauvaise foi entre ministre et réalisatrice

Rima_Abdul_Malak

Ainsi donc, la Palme d'or est, une nouvelle fois, française. Ne boudons pas notre plaisir. C'est toujours agréable. Justine Triet, qui a réalisé Anatomie d'une chute, n'avait apparemment pas prévu qu'on lui remettrait la récompense suprême du Festival de Cannes. Émue, elle a d'abord cherché ses mots. C'était plutôt touchant. Et puis, rapidement, la machine s'est emballée et la réalisatrice primée est retombée sur des éléments de langage qu'elle maîtrisait à la perfection. Deux paragraphes dans son pamphlet, pour être précis : d'abord, un tacle contre le gouvernement, qui n'a pas écouté la colère du peuple sur la réforme des retraites. Ensuite, un couplet, un peu plus intemporel, sur les dangers d'une marchandisation de la culture sous un pouvoir libéral.

Par Twitter interposé, le ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, a sèchement répondu à Justine Triet. Elle s'est notamment dite « estomaquée par son discours si injuste » et a rappelé que la sacro-sainte exception culturelle française permettait « une diversité unique au monde ». Il est vrai que, si l'on enlève les subventions de ce méchant pouvoir libéral, via le CNC, mais aussi l'argent versé par la région Auvergne-Rhône-Alpes (du méchant Laurent Wauquiez) et par Canal+ (du méchant Vincent Bolloré), on ne voit pas bien comment ce film aurait pu être réalisé. Mais bon, de même qu'il est plus facile, pour un général de plateau télé, de critiquer les options militaires prises par la France quand on a tous ses trimestres, il est plus confortable, pour une réalisatrice iconoclaste, de dénoncer le système quand on a tous ses financements.

Cependant, question mauvaise foi, Rima Abdul-Malak n'est pas en reste. D'abord, le modèle de l'exception culturelle française ne permet pas vraiment la diversité : les films subventionnés par le CNC aiment parler de belles rencontres entre une bourgeoise débordée et un migrant plein de sagesse. Il peut y avoir des modulations à la marge, mais les schémas sont tout de même assez répétitifs. Ensuite, l'indignation du ministre, évidemment surjouée et ridicule, passe volontairement sous silence la première partie du discours - celle où il est question des retraites... probablement parce que cette mobilisation quasiment unanime est, elle, moins sujette à caution.

Évidemment, c'est agaçant, ces prises de parole politiques dans une enceinte qui n'est pas faite pour ça. C'est agaçant, mais ça n'est pas nouveau. On n'a rien demandé à Justine Triet, rien d'autre que de faire des films. Mais ce qui est tout aussi agaçant, c'est le comportement de la Macronie, très susceptible quand on ose remettre en question son message messianique et la validité de son modèle, idéologique comme économique.

Un concours de mauvaise foi entre une réalisatrice française et son ministre de tutelle : le spectacle est triste, gênant, mesquin. Désolé pour ceux qui croyaient encore à notre rayonnement culturel.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

64 commentaires

  1. Les misogynes parleraient de querelle de bonnes femmes. Respectueux des dames, je pencherai plutôt pour assaut de « hors sujets » entre personnes méritant à ce titre chacune la palme.

  2. Pas entièrement d’accord avec l’auteur: E. Borne est ministre de la culture, c’est à juste raison qu’elle a répondu (très bien) à J. Triet. Mais Le sujet des retraites relève de la politique générale, qui n’est pas son domaine.

  3. Croit- on encore en quelque chose ici ?
    Rien ne marche, les jeunes diplômés s’en vont et les retraités finissent leur vie ailleurs , l’art de vivre à la française est mort , plus rien ne subsiste de ce qui faisait le charme de l’existence, l’amour courtois, le respect des anciens la courtoisie la politesse la beauté la tendresse.
    Le monde de «  soleil vert » est en marche.

  4. Le monde du cinéma vit grâce aux subventions de l’Etat . Rien de tout cela ailleurs . Aux USA , les réalisateurs se dém……. Supprimons toutes les subventions à cet art : il n’en sera que meilleur . Les navets disparaîtront

  5. Le cinéma d’aujourd’hui n’est que de la daube , les acteurs sont arrivés là par piston , n’ont aucun talent , ils sont à des années lumière de nos regrettés de véritables seigneurs , c’était tellement naturel chez eux que ceux-ci sont artificiels .

    • Surtout autrefois ils savaient articuler, respirer entre les phrases , savoir utiliser la ponctuation et parler haut clair et fort..maintenant on ne comprend même plus ce que les acteurs disent .
      Il paraît que personne n’est indispensable…et bien ce n’est pas vrai et on ne remplacera jamais nos vieux comédiens disparus.

  6. Il est où le cinéma qui faisait rêver? Il est où le temps où les actrices et les acteurs faisaient honneur à leurs spectateurs en arborant des tenues dignes de reines et de roi? Il est où le temps où ce spectacle s’élevait en art? Mais il est vrai que de nos jours, le laid s’invite partout quand il n’est pas la référence.

  7. Culture est un grand et beau mot. Nous avons à faire d’un côté, à de le représentation, animation etc et de l’autre, à des distributions de subventions _ non pas, en l’occurrence , à des associations culturelles_ mais à des entreprises , oui… commerciales, malgré tout ! puisque nous payons pour aller au cinéma. Nous payons donc deux fois, si je comprends bien ! ?

  8. L’exception culturelle française ! Le festival de Cannes ! Tout doit être supprimé ! Que les réalisateurs aillent demander de l’argent aux banques et que le public soit le censeur. Nul doute qu’il y aura moins de films français , mais que la qualité recherchée par le plus grand nombre sera au rendez vous.

  9. Je ne vais plus au cinéma, je ne m’intéresse plus au festival de Cannes. Voir des nanas quasi à poil qui ont peut-être hurlé « Me too » ne me procure aucun plaisir.

  10. Qu’attendre de ces gens dits « de culture » qui parlent mal notre langue, qui écrivent sans se soucier d’être compris, qui s’expriment à tort et à travers, qui accumulent les mensonges, qui collectionnent les propos de mauvaise foi, qui vivent d’aides et de subventions, qui distribuent les jugements d’une morale qu’ils veulent imposer aux autres mais surtout pas à eux-mêmes, qui condamnent sans preuves, qui veulent une censure et un discours imposé … Doit-on poursuivre à l’infini cette litanie désespérante quand on constate que nos médias écrits et en images ont déjà pris en otage le peuple français et veillent soigneusement à le maintenir endormi dans le confort d’une résignation apeurée et d’une pensée unique qui favorise l’abstention et le fatalisme dégoûté. Pendant ce temps, LFI réinvente la violence politique pour étrangler à toute force ces gens de la gauche et des rose-verts qui se tiennent lâchement derrière celui qui parle le plus fort de crainte de se trouver accusé à son tour d’être suspect de sympathie pour la droite extrême. C’est pour ça que LFI invoque les revendications du wokisme qui n’a pourtant de sens que pour les américains qui écrasent depuis toujours leurs minorités sous le poids de leurs armes à feu.
    Est-il si difficile à comprendre qu’une entreprise de subversion est a l’œuvre tandis que Macron cherche à franchir avant son départ le seuil irréversible qui empêchera la France de se redresser ?

  11. Le monde du cinéma, très consensuel, n’a pas peur du ridicule et du hors sujet. Que vient faire la réforme française des retraites dans la remise de la palme d’or? On pourrait espérer mieux de « créateurs » qui se contentent de singer tout ce microcosme ridicule qui se croit obligé d’afficher sa couleur politique lors de chaque discours. On sait ce qu’ils pensent et on sait aussi que s’ils pensaient différemment ils ne pourraient pas faire de films. Mais pour eux cela est normal.
    Mais ils n’auront aucun centime de moi, hormis, hélas, mes impôts.

  12. C’est plutôt affligeant de voir ces acteurs faire de la politique . Il pourrait briller par leur art mais les Strass et les paillettes sont désormais éteinte reste la noirceur de leur insatisfaites âmes qui resurgissent chaque année. Enfants gâtés de la Bâle pourraient nous faire rêver par leurs passions et nous faire vibrer et susciter de l’émotion . Eh bien non ils remplissent les tiroirs de leurs avoirs et nous laissent des ressentiments en guise de bonheur

  13. Tout ce qui déplait à la macronnie est bon pour la France. Pour une fois qu’une engraissée du pouvoir se rebiffe on ne va pas la critiquer…. Quant à la ministre on peut se dire qu’elle une chance incroyable que le ridicule ne tue pas. Bizarre qu’elle ‘nait pas traité Triet de facho d’extrême droite et le film de propagande nazie…

  14. Sinon, ça a fait combien d’entrés « anatomie d’une chute »?
    Je ne sais même pas si il est déjà sorti.
    Il faut dire qu’il est probablement intégralement payé par les subventions avant d’avoir vendu un seul billet, alors pourquoi s’embêter à faire de la pub? On risquerait de voir que c’est un navet.
    Il faut arrêter ce système de subventions qui ne sert qu’à payer la villa des copains et qui produit des films si mauvais que le monde entier se moque de nous.

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