Si la natalité française est en baisse, c’est d’abord parce que l’amour des enfants est en baisse

"L'inquiétant déclin de la natalité française" a suscité beaucoup d'analyses qui, pour l'essentiel, s'en tiennent à des données économiques, sociales ou professionnelles. Les couples n'auraient plus assez de revenus, l'État n'aurait pas une politique suffisamment généreuse à l'égard des familles et les femmes seraient souvent obligées de trancher en faveur d'une vie active à l'extérieur de leur foyer. C'est sans doute en partie vrai.

Sans tomber dans une approche aussi prosaïque, il est patent que le désir d'enfant devient une donnée infiniment relative qui est soumise, pour sa concrétisation, à des éléments qui pèsent davantage que le bonheur de la procréation elle-même.

Le droit à l'enfant n'est, paradoxalement, que le dévoiement d'un désir d'enfant en renvoyant l'attente généreuse et altruiste de celui-ci vers une exigence narcissique et capricieuse qui ne le concerne plus ou à peine.

Pour ne pas évoquer la gestation pour autrui, qui est tout simplement "un marché de la personne humaine" face auquel les féministes de tous bords devraient s'indigner si elles étaient cohérentes. Quand le droit à l'enfant conduit à répudier l'humanisme même le plus basique, on a le devoir, pour le moins, de questionner ce droit.

Je provoque, mais si l'on consacrait la même énergie, la même intelligence à rendre hommage à la procréation qu'on en met pour défendre toutes griffes dehors l'avortement, cela pourrait s'appeler un progrès ou, au moins, un rapport plus équilibré entre la naissance et l'effacement.

L'enfant roi qui pourrait laisser croire à l'existence de parents tellement épris de l'enfance et de sa liberté qu'ils lui laisseraient faire, par amour, à peu près n'importe quoi est lui-même une dénaturation d'un authentique désir d'enfant.

L'enfant réclamé par des adultes pour leur seul bénéfice ou l'enfant petit potentat, deux manières qui dégradent la magie de l'enfance, quand on l'espère et qu'elle vous comble par avance grâce à ce qu'elle a d'unique et de puissant.

Je ne suis pas davantage convaincu par les humanistes hypocrites qui prétendent ne pas faire venir au monde des enfants pour leur bien. Cet univers serait trop dur pour qu'on puisse y jeter un enfant ! En traduisant, quelle incommodité, quelle gêne qu'un petit bout d'être qui viendrait mordre un peu sur notre destin personnel !

Il n'est vraiment pas nécessaire, pour faire "scientifique", de s'aventurer dans des justifications sociologiques. Il suffit de comparer hier avec aujourd'hui, les attitudes passées avec celles de maintenant. Combien de fois ai-je remarqué le changement radical qui s'est opéré chez beaucoup de parents au fil des années, dans le métro ! Au lieu qu'il y ait entre eux et les tiers jetant un tendre regard sur leur progéniture de quelques mois une complicité délicate, dorénavant c'est au mieux de l'indifférence, voire pire, presque de l'hostilité, comme si l'intérêt affectueux d'autrui était une menace.

Je tire de ces évolutions, de cette moindre consécration de l'enfance qui n'apparaît plus comme un trésor à partager d'une certaine manière par tous mais tel un bien à privatiser, que les temps ont changé et que, si la natalité française est en baisse, cela tient d'abord à ce que l'amour des enfants est lui-même en baisse. Je m'en désole d'autant plus que, depuis toujours, je fonds devant les bébés, qui représentent un quatrième âge si merveilleux de grâce et d'innocence.

Il n'y a à jeter la pierre à personne - la liberté est une valeur trop précieuse pour ne pas bénéficier même à ceux pour qui seul leur avenir compte -, mais qu'on ne vienne pas cependant décourager ceux qui croient à la vie, donc à l'enfant, et ne répugnent pas à mettre de la douceur là où on en manque. Il faudrait surtout les féliciter.

Au nom de tous.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 01/05/2019 à 3:32.
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Bruno Gollnisch
Ancien député, ancien député au Parlement européen

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