Motion de censure : l’incroyable image du désarroi gouvernemental

Capture d’écran (14)

Personne n’en a parlé, et pour cause. Ce n’est qu’une image. Un instant infime de la vie politique française contemporaine. Une poignée de secondes à l’antenne de la petite chaîne qui retransmet les débats de l’Assemblée nationale, La Chaîne parlementaire. Ce 24 octobre, le Premier ministre Élisabeth Borne, le ministre chargé des Relations avec le Parlement Franck Riester et le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire sont assis, côte à côte, dans l'enceinte du palais Bourbon, comme il se doit, sur les sièges réservés au gouvernement. Ils écoutent Marine Le Pen clamer du haut du perchoir les raisons pour lesquelles elle a décidé, et les 88 autres députés du groupe RN avec elle, de voter la motion de censure contre le gouvernement en mêlant les voix du groupe RN à celles de la NUPES. Un joli coup tactique qui met LR au pied du mur - c'est le premier objectif de la manœuvre -, place aussi la NUPES dans l’embarras et renvoie la Macronie face à ses failles, sa solitude et ses échecs.

Marine Le Pen a tempêté du haut de la tribune l'intérêt supérieur de la nation, ce qu'on n'entend plus : « Pour nous, lorsque les circonstances l’exigent, c’est l’expression solennelle et responsable d’une défiance républicaine et démocratique face à un pouvoir gravement défaillant. Seul l’intérêt national guide ces paroles et ces actes […] »

Ils ont compris. Alors, à cet instant précis, sur le banc du gouvernement, les visages de nos trois ministres portent, comme le bouc émissaire, tous les malheurs du monde. Un ange passe et Dieu seul sait si c’est l’ange du carnage, celui des temps d'épreuve ou celui de la dernière heure. Ils portent les mêmes sentiments, ces visages : la fatalité, l’accablement, une certaine résignation devant l’imparable logique de ce coup de force et de ce coup de semonce. Ils sont petits, nos trois politiques, isolés, un peu dépassés, un peu perdus. Pour un peu, ils susciteraient la pitié, la tendresse. Pour un peu, ils appelleraient le réconfort. Ils ont l’expression de l’enfant qui n’a pu s’empêcher, une fois de plus, de tremper le doigt dans le pot de confiture devant témoins et qui sait que la sanction va venir. Il en éprouve de la peine.

On lit l’inquiétude face à l'inconnu, car la preuve est faite que les oppositions peuvent, à l’occasion, se liguer contre le pouvoir. « Adopter cette motion de censure, ça n'est pas seulement faire tomber le gouvernement, ça n'est pas seulement empêcher le financement de notre Sécurité sociale, c'est aussi empêcher tout débat sur le fond de nos politiques sociales », se défend Élisabeth Borne en séance après avoir alerté les parlementaires sur le risque de chute du gouvernement. Avec 239 voix sur 289 nécessaires, la motion de censure échoue, ce 24 octobre. Le pouvoir s'en sort mais le cœur n'y est pas. Rien ne change mais tout a changé. Il y a eu ces visages défaits, ce vertige, cet instant passé sur le vide, ces regards soumis, marqués par la signature longtemps retardée du réel : désormais, le roi est nu, ses ministres aussi. Au lieu du roi, le désarroi. Il y a dans cette image plus qu'un discours, plus qu'une démonstration : une impuissance. Il reste à la Macronie plus de quatre ans à tenir.

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

55 commentaires

  1. Ils sont à l’image de beaucoup de français, désemparés, avec cette résignation qui est la marque du manque de courage, et qui voyant le vent de révolte se lever, espère que ce ne sera qu’un coup de vent passager. Mais un coup de vent, même passager ça détruit toujours un peu plus.

  2. Le jour viendra où ils tomberont, et ça fera mal.
    Ils n’ont pas compris qu’il faut impérativement coopérer.
    Je crois que c’est ça l’art politique, c’est ça la démocratie, c’est ça la volonté du peuple qu’ils méprisent.
    Ne plus s’enfermer dans leur tour d’ivoire et bannir définitivement cette idéologie qui tue notre pays.

  3. Et si vous parliez aussi de cette « info »:
    Janine Small, présidente des marchés internationaux chez Pfizer, a reconnu que le laboratoire n’avait fait aucune étude permettant de déterminer que le vaccin contre le Covid-19 était vraiment efficace contre la transmission.
    Les « manigances » des députés qui n’ont qu’une idée « saucer son strapontin » fera que rien n’est à attendre de ces nantis qui nous coûtent un pognon de dingue . En plus de ne pas protéger la souveraineté française, ils sont responsables de leurs silences lorsque des affaires comme ALSTOM se déroulent ! …
    Parlez aussi des décrets qu’ils accumulent pour fracasser tous les pans de la société française si vous avez le temps …
    Votre titre « pompeux » , en parlant de désarroi gouvernemental pourrait faire penser aux moutons qu’il se passe quelque chose … Oui, il se passe quelque chose: l’ensauvagement de la société française devient « criant », la paupérisation les français s’accélère et macron, vonderlayen et biden se frottent les mains tout en saccageant l’Europe. Les LR sont « aux ordres » de macron, les « NUPES » sont dans l’extrême et n’auront aucune solidarité pour le peuple français lorsqu’il faudra « juste voter » une motion de censure venant du RN pour faire « sauter » ce gouverne-et-ment car ils savent pertinemment qu’ils seront, avec les LR les « perdants d’une prochaine élection … Donc, ils repoussent au max …

  4. Heu, sur la photo, Bruno Le Maire a l’air très concentré sur son smartphone. SMS, Twitt? Et le discours de Marine, il s’en bat les flancs?

  5. Cela sent la fin pour Macron et sa bande , je pense qu’il est allé à Rome pour voir le Pape et lui demander l’extrême onction .Les catholiques comprendront .

  6. Il va falloir qu’ils s’y fassent car le peuple français se réveil doucement , mais il se réveille et là le gouvernement et Macron ont du soucis à se faire

  7. Si nous devons attendre 2027 en bougeant comme des œufs en gelée il y a de forte chance que la France n’existe plus. Il faut faire sauter ce gouvernement de cloches au plus vite et nous verrons après.

  8. Mon père, ce héros au sourire si doux,
    Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
    Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
    Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
    Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
    Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
    C’était un Espagnol de l’armée en déroute
    Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
    Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
    Et qui disait: » A boire! à boire par pitié ! »
    Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
    Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
    Et dit: « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. »
    Tout à coup, au moment où le housard baissé
    Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
    Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
    Et vise au front mon père en criant: « Caramba! »
    Le coup passa si près que le chapeau tomba
    Et que le cheval fit un écart en arrière.
    « Donne-lui tout de même à boire », dit mon père.

    Victor Hugo
    Pour le gouvernement, cette fois, le coup est passé si près que leur arrogance tomba, momentanément, je vous rassure. Par contre, je doute qu’ils nous donnent à boire.

  9. Mr Baudriller, je pense que vous sur-interprétez. Borne et Riester ont leur tête habituelle, quant à Le Maire, il se contente visiblement de regarder son téléphone. Quant à déplorer que LR ne vote pas la motion, cela n’a pas de sens dans les circonstances actuelles. En supposant qu’ils l’aient votée, que ce serait-il passé ? Le gouvernement aurait sauté, un autre premier ministre aurait été nommé par Macron, puis d’autres ministres, et ce nouveau gouvernement aurait été, peu ou prou, identique au précédent (je ne l’imagine pas une seconde nommant Marine Le Pen premier ministre, ce qu’elle aurait d’ailleurs probablement refusé). Aucun intérêt. La seule attitude à avoir, c’est de peser le plus possible sur les projets de loi soumis au vote pour y faire passer le plus d’amendements possibles, et d’attendre 2027 pour avoir enfin un président qui saura donner un bon coup de pied dans tout cela.

  10. Si il y a « désarroi gouvernemental », c’est dû à la façon de présider de Macron qui agit en toutes circonstances comme un tyran mégalomaniaque, qui se moque complètement de ce que vit et ressent le peuple.
    Quand au membres du gouvernement s’ils ressentent un « désarroi gouvernemental », comme une maladie honteuse, qu’ils se cassent, personne ne les retient, et ils seraient même sûrement applaudis pour leur courage !
    Seulement voilà, la soupe à la grimace ministérielle est grassement rémunérée !

    • un ministre ça ferme sa gueule ou il demissione. il a été mon patron pas du tout de mon bord au contraire, mais il a fait ce qu’il a dit

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