Me Frédéric Pichon : « Condamnation de Jean-Luc Mélenchon : ce qui me choque, c’est l’acharnement judiciaire contre les opposants ! »

Frédéric Pichon

Jean-Luc Mélenchon, qui, il y a peu, plaidait pour l'inéligibilité à vie des responsables politiques en cas de condamnation judiciaire, vient d'être condamné en première instance à trois mois de prison avec sursis et 8.000 euros d'amende pour « actes d’intimidation contre l’autorité judiciaire, rébellion et provocation » lors de la perquisition des locaux de La France insoumise, l'année passée.

Réaction d'un avocat, Frédéric Pichon sur cette condamnation. L'occasion d'évoquer avec lui le cas Balkany qui, bien que condamné en première instance, prévoit de se représenter à la mairie de Levallois.

En 2007, Jean-Luc Mélenchon défendait l’un des grands principes de son programme, « l’inéligibilité à vie des personnes condamnées ». Deux ans plus tard, ce député vient justement d’être condamné par le tribunal de Bobigny à trois mois de prison avec sursis et 1000 euros d’amende.
Cette peine est-elle justifiée ? Jean-Luc Mélenchon risque-t-il d’être déchu de ses droits électoraux ?

Le jugement n’a pas fait droit aux demandes d’inéligibilités. Il ne contient donc pas de dispositions de peines accessoires ou complémentaires, sauf si le parquet décidait de faire appel et que la Cour d’appel prononce une telle peine. En l’occurrence, je ne pense pas que cela sera prononcé.
Mélenchon est parfaitement incohérent avec les principes qu’il défend. Toutefois, ce qui me choque le plus dans cette affaire, c’est l’acharnement judiciaire contre la plupart des opposants politiques. En 2017, c’était contre François Fillon. Aujourd’hui, c’est contre madame Le Pen et monsieur Mélenchon. Je dois dire que j’ai admiré l'acte de résistance qu’a conduit monsieur Mélenchon à l’occasion de la perquisition. Il a d’ailleurs été poursuivi pour avoir entravé l’action de la justice.
Quand je vois que des policiers prétendent avoir eu 10 jours d’arrêt de travail et qu’ils auraient été traumatisés par ces comportements, j’ai l’impression qu’on se moque du monde. Ces arrêts maladie sont des arrêts de complaisance. On a voulu charger la mule. Je n’applaudis pas et je ne dénonce pas cette décision, mais je dois dire que j’admire son geste. Face aux tentatives d’intimidation du pouvoir, c’est bien de ne pas se laisser faire.


Dans l’affaire Balkany, on rencontre un peu la même problématique. Il n’y a pas non plus d’histoire d’inéligibilité. Patrick Balkany se représente aux municipales.
Que doit-on en penser ?

C’est un cas de figure un peu différent. Il y a ce qu’on appelle, la notion d’exemplarité des élus. À partir du moment où on a un mandat public, on représente la République. Monsieur Balkany ainsi que Monsieur Mélenchon portent une écharpe tricolore. Ils sont donc représentants de la République. Ils doivent faire preuve d’exemplarité.
Autant la peine de prison peut être considérée comme assez sévère, autant une peine d’inéligibilité dans ce cas de figure me semblerait parfaitement justifiée. J’ajoute que les jeunes de Génération identitaire, qui avaient fait une action dans les Alpes purement symbolique, ont été condamnés à une peine de 5 ans de privation des droits civiques, civils et politiques. C’est la peine maximum. La justice a fait preuve d’une incroyable sévérité dont elle ne fait pas preuve lorsqu’il s’agit d’élus plus ordinaires.


C’est donc un peu à la tête du client…

Ce n’est pas nouveau. Comme dit la Fontaine « selon que vous serez puissants ou misérables, les jugements de cour et des tribunaux vous feront blanc ou noir ». La soumission de la justice au pouvoir politique n’est pas un fait nouveau. Je n’ai pas l’impression que les choses vont en s’arrangeant.
Il faut quand même se rappeler l’épisode Fillon. Je ne suis pas un partisan de François Fillon, mais il faut tout de même convenir qu’il était le candidat favori et que sa victoire a été volée. On a instrumentalisé la justice dans des délais extrêmement rapides. Cette même justice a des dossiers qui traînent depuis des années, qui n’intéressent personne et qui finissent au fond du tiroir ou en haut de l’armoire avec plein de poussière. Il est évident qu’il y a deux poids deux mesures. Il faudrait qu’on traite tout le monde avec la même étiquette. C’est peut-être un vœu pieux, mais il paraît que nous sommes dans une République exemplaire.

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