C’est la dernière ligne droite avant le déroulement du premier tour de l'élection présidentielle. Les deux candidats libéraux, Emmanuel Macron et François Fillon, totalisent entre 40 et 42 % des voix dans les sondages. D’un point de vue arithmétique, ils sont donc minoritaires. Les neuf autres candidats, antilibéraux (Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Benoît Hamon, Nicolas Dupont-Aignan, Philippe Poutou, Nathalie Arthaud, Jean Lassalle, François Asselineau et Jacques Cheminade) sont, par conséquent, majoritaires.

Les Français sont-ils prêts à se faire hara-kiri en élisant Macron ou Fillon (sachant que le libéralisme libertaire du premier est cohérent dans sa dangerosité, quand le libéralisme conservateur du deuxième développe une schizophrénie tout aussi dangereuse) ? 

Le libéralisme économique est mal perçu par la majorité des Français. Ils ne l’associent pas à la liberté, mais au marché qui fait la loi. Le libéralisme sollicite l’esprit de compétition (qui est aussi la loi du plus fort aboutissant à la guerre de tous contre tous) et non de coopération entre les hommes dans leur travail. Charles Marcou dit très bien de quoi le libéral-libertaire Macron est le nom : "Emmanuel Macron incarne un processus d’égalisation. Au libéralisme économique modéré (NDLR : pas si modéré que cela), porté par la plupart des candidats qui se sont succédé à la magistrature suprême, Macron ajoute un libéralisme moral et spirituel assumé. L’individu, déraciné, devient la valeur de référence, coupé de ses racines, perdant son imaginaire, ses préjugés et apparaît comme la monade isolée d’un monde globalisé" ("Emmanuel Macron, symbole branché d’une modernité imposée", Agoravox, 3 avril 2017).

Quant à François Fillon, il incarne parfaitement cette droite libérale-conservatrice hybride. Jean-Claude Michéa a noté à juste raison : "La droite moderne […] est travaillée par une contradiction permanente et structurelle. Définitivement convertie au libéralisme économique […], elle se trouve désormais aux avant-postes de tous les combats pour la dérégulation intégrale de l’économie de marché. Mais en même temps - du fait de la structure particulière de son électorat historique -, il lui faut veiller à maintenir cette “rhétorique” conservatrice qui, seule, peut encore convaincre son électorat populaire qu’elle est restée l’ultime gardienne des valeurs traditionnelles et de leur sécurité physique" » (Revue des deux mondes, entretien réalisé par Sébastien Lapaque, « Peuple, people, populismes », avril 2017).

Et Michéa d’illustrer la duplicité de cette droite orléaniste par ces mots : "Elle doit, par exemple, souligner sans cesse son attachement à nos racines chrétiennes – ce qui inclut par définition le caractère sacré du dimanche - tout en militant simultanément, comme le premier Éric Brunet venu, pour l’ouverture dominicale de toutes les entreprises."

Seul un conservatisme révolutionnaire peut faire pièce au capitalisme libéral dans sa version libertaire comme dans sa version conservatrice aménagée. Le philosophe Olivier Rey observe ingénieusement :

Le « système » en place n’est pas ce qui préserve le legs du passé, mais au contraire ce qui le liquide, à une échelle et à un rythme toujours plus grands. Ce qui fait que les authentiques conservateurs en sont réduits à remettre en cause de fond en comble le système, à prendre des allures révolutionnaires. Malgré eux, ils sont obligés de prôner le changement. Mais le mot n’a pas le même sens selon ceux qui l’emploient. Pour les « progressistes », promouvoir le changement consiste à prolonger, voire à amplifier encore les dynamiques actuelles. Pour les conservateurs, il s’agit de les contrecarrer (Le Figaro, entretien réalisée par Eugénie Bastié, 15 et 16 avril 2017).

La majorité du peuple français rejette le libéralisme sous toutes ses formes. Il doit s’en souvenir le 23 avril et le 7 mai prochains en barrant la route à ses deux meilleurs représentants, Emmanuel Macron et François Fillon.

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17 avril 2017 à 20:32

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