Macron tire l’avenir de la France à la courte paille

tirer à la courte paille

Les gilets jaunes et ceux qui les soutiennent ne croient guère au large sourire d’Édouard Philippe annonçant que le grand débat (déballage ?) public allait avoir lieu dans les meilleurs délais, sans vraiment savoir comment cela pourra s'organiser si, surtout, quel en sera le résultat - dont il n'a, d'ailleurs, que faire.

Cette consultation nationale n'aboutira à rien, soyons en assurés, car elle est exactement le contraire d'un référendum tel que le propose la Constitution et tel que le veut ce peuple qui s'est soulevé contre un pouvoir omniprésent. Les Français pourront donc décrire ce qui leur passe par la tête. Quelques millions d'écritures à déchiffrer par un ordinateur qui, comme les boules du Loto, sortira par magie les dix propositions les plus populaires.

Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public (oui, ça existe !), mandatée par Édouard Philippe pour diriger cette usine à gaz, vient de déclarer que tout est prêt. On veut bien la croire, mais prêt et comment, organiser dans l’affolement général d'un pouvoir aux abois et d'un Président apeuré par cette révolte populaire qu'il n'arrive pas à mater au bout de six semaines. Tirer à la courte paille ? Donner la parole aux Français. C'est le but de cette manipulation de l'opinion qui a commencé dans plusieurs milliers de mairies où des maires, conscients de la colère de leurs concitoyens, ont ouvert un cahier de doléances. Il sera passionnant, d'ailleurs, si on peut avoir accès à cette avalanche de propositions, de savoir quels auront été les thèmes abordés. M'est avis que les quatre thèmes désignés par Matignon pour cette consultation ne seront pas forcément prioritaires. L'immigration rejetée des débats officiels sera certainement l'un des sujets sensibles que les gilets jaunes et leurs soutiens auraient aimé pouvoir discuter.

Mais, non pour le pouvoir macronien, qui est revenu sur sa promesse d'évoquer cette délicate question, il est le sujet à éviter car le résultat obligerait le gouvernement à prendre un tournant à 180° d'une politique laxiste menée depuis Giscard.

Alors pour satisfaire à la fois l’ego gouvernemental et répondre hypocritement aux gilets jaunes, on leur offre des semaines de trêve en les amenant à écrire ce que, sur tous les ronds-points, ils déclament. Et pendant ce temps-là, l’Élysée et Matignon vont utiliser la brosse à reluire sur ces beaux gilets de couleur jaune pour tenter de calmer leur ardeur et espérer qu'ils se fatigueront au fil des évacuations policières.

Mais j'ai comme l'impression que le bon sens de ce bon peuple français ne va pas se prendre au jeu et que le jeu du chat et de la souris a de beaux jours devant lui. À moins que, par un coup d'éclat, Emmanuel Macron, qui veut faire plus peuple que peuple en allant déguster une andouillette AAAAA chez Courtepaille, ne se décide à dissoudre l'Assemblée nationale pour mettre fin à deux années follement à son service. A-t-il tiré à la courte paille pour savoir ce qu'il doit faire pour se tirer de ce mauvais pas ?

Floris de Bonneville
Floris de Bonneville
Journaliste - Ancien directeur des rédactions de l’Agence Gamma

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