Livre : Sacré Paris. Marcher avec les saints, par Philippe Bornet

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Il est des livres qui tombent à pic : alors que le spectre du coronavirus s’étend sur la France, que l’on ne sait plus à quel saint se vouer et que les transports en commun, confinés, ambiance « collé-serré », ressemblent à des boîtes de Petri motorisées, Philippe Bornet - contributeur bien connu de Boulevard Voltaire -, avec son guide Sacré Paris. Marcher avec les saints, nous propose de descendre du bus et sortir du métro, de ranger notre gel hydroalcoolique pour réveiller en nous le mystique.

C’est fou, le nombre de saints qui ont foulé le sol parisien et dont on retrouve la marque ou la relique, célébrée ou oubliée. Il y a les « stars » comme Saint Louis, saint Denis, sainte Jeanne d’Arc, sainte Geneviève ou saint Ignace de Loyola, et puis il y a les méconnus : qui connaît la bienheureuse Rosalie Rendu ? Sœur de la Charité, elle était si aimée pour sa bonté que, durant les barricades des Trois Glorieuses, les émeutiers comme le préfet cédaient à ses douces admonestations et faisaient montre de magnanimité. En 1852, Napoléon III lui décerna la croix de la Légion d’honneur. On peut la suivre vers Censier-Daubenton, dans le quartier Mouffetard et au cimetière Montparnasse, où elle repose désormais sous une modeste croix blanche.

On peut citer encore le frère Fiacre de Sainte-Marguerite. Tendez l’oreille, c’est à lui que l’on doit le Roi-Soleil !

Cet augustin déchaussé priait sans relâche pour que le roi et la reine aient un dauphin. « Le 3 novembre 1637, frère Fiacre vit la Vierge Marie lui apparaître. Elle lui présenta l’enfant que Dieu veut donner à la France. » C’est ainsi que « le 5 septembre 1638, Anne d’Autriche donna naissance à un fils - Louis Dieudonné - au château de Saint-Germain-en-Laye. La Gazette de France put alors écrire, le fait n’ayant pu échapper à la Cour : Il y a un an, un religieux avertit la reine qu’elle devait accoucher d’un fils. »

On retrouvera Fiacre rue Bonaparte, rue Galande, rue de la Harpe et, bien sûr, à Notre-Dame des Victoires, où son corps est enterré… sans son cœur, car celui-ci est à Cotignac, lieu de pèlerinage bien connu des célibataires et des couples stériles.

Autrefois, nous dit l’auteur, on voyait son effigie dans les voitures de louage, les conducteurs ayant une grande dévotion à son endroit. C’est même pour cela, explique-t-il, qu’on appelait « fiacres » les ancêtres des taxis. Peu de chance, il est vrai, qu’on le retrouve aujourd’hui sur le tableau de bord des Uber… Autres temps, autres chauffeurs.

C’est, au total, 300 lieux - églises, statues, places et rues - marqués par la présence de 27 saints que Philippe Bornet nous invite à découvrir dans son guide. Alors que le Louvre est fermé, que les touristes ont déserté, que l’impérieuse reine Hidalgo elle-même, dans les sondages, semble être ébranlée comme si Paris se rebellait contre ses outrages, c’est le moment ou jamais de retrouver la capitale, ses dédales et son sanctoral, nez au vent, le cœur fervent… ou simplement curieux.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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