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Forts de leur cousinage germain – et ils ne s’en cachent pas -, les Alsaciens se croient volontiers un peu supérieurs aux autres Français, ceux de l’intérieur, en l’occurrence, alors que, dans le même temps, entre Vosges et Rhin, ils éprouvent à leur égard, paradoxalement, comme un sentiment d’infériorité. À force de leur avoir fait croire, à ces braves Alsaciens, qu’il n’était vraiment de... « chic » que de Paris, ils en ont déduit, en toute logique cartésienne, qu’il ne pouvait être de « bon bec » que d’Alsace. Car s’il est un domaine où, sans complexes, depuis la nuit des temps, mes compatriotes ne doutent pas un seul instant de leur incontestable supériorité, c’est bien celui de la gastronomie et des plaisirs de la table.

Déjà Curnonsky, le prince élu des gastronomes, l’avait proclamé haut et fort au siècle dernier, saluant en Alsace "toutes les grandes traditions culinaires et gastronomiques par lesquelles elle se rattache au pays qui a su élever la cuisine à la dignité d'un grand art - à la France !" Le très austère guide Michelin vient, chaque année, confirmer mathématiquement cette suprématie avec un total d’étoiles attribuées - entre 30 et 35, bon an mal an -, largement supérieur à celui des autres régions de France, lorsqu’on le rapporte au nombre d’habitants. L'Alsace compte désormais une pléiade de chefs étoilés qui cultivent, séduisent et subliment la gastronomie alsacienne en rivalisant de créativité. L'Auberge de l'Ill, trois étoiles depuis cinquante ans, en est très certainement le vaisseau amiral, le fleuron le plus célèbre.

"Rien ne paraît si beau aux Français que de voir le goût de leurs cuisiniers régner du septentrion au midi", observait déjà Montesquieu dans ses Lettres persanes. Le prenant au mot, Fernand Mischler et Maurice Roeckel nous en apportent la preuve, si j’ose dire par... le menu, dans l’ouvrage qu’ils signent aux Éditions du Signe.

À cent lieues des livres de recettes traditionnels, cette ode à la gastronomie alsacienne est une invitation au plaisir où chefs et maîtres artisans se lâchent littéralement, imaginant chacun(e) recettes inédites ou tirées de leur répertoire, servies par une iconographie de Karine Faby, de toute splendeur.

On salive rien qu’en tournant les pages, entre le sandre en écailles de courgettes, le marbré de foie gras de canard, le porcelet croustillant à l’aspérule, la mousseline de grenouilles, le savarin d’écrevisse au caviar de hareng, sans oublier… le munster ivre à la crème.

À la table des Étoiles d’Alsace, la gourmandise n’est pas un vilain péché, à la rigueur un joli défaut, car après tout, "on est ce que l’on mange", selon l’adage de Brillat-Savarin...

Et lorsque, vos agapes terminées, le chef viendra vous saluer, vous n’êtes plus le client anonyme d’un fast-food climatisé mais vous êtes devenu, le temps d’un repas, un ami convié à la table d’hôte. Esch des nix, elle n’est pas belle, la vie ?

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18 novembre 2018 à 19:35

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