Le magistrat Charles Prats est sanctionné 

Charles Prats

En octobre 2021, le magistrat Charles Prats avait fait l’objet d’une enquête administrative déclenchée à la demande expresse du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti. Une procédure rare. Ce type d’enquête, confié à l’Inspection générale de la justice (IGJ), a concerné huit magistrats en 2020, cinq en 2019, selon Libération.

Et le couperet est tombé hier. Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) sanctionne le juge parisien Charles Prats, accusé d'avoir manqué à ses devoirs et porté atteinte à l'image de la Justice après avoir qualifié des militants antifas de « nervis d'extrême gauche » ou de « peste noire » et les écologistes de « Khmers verts », sur Twitter, en marge des cortèges des manifestations de gilets jaunes. Dans une décision prise lundi 16 janvier et consultée par France Inter, le CSM a décidé de le changer de juridiction.

Voilà, en substance, ce que dit le CSM pour justifier sa décision, d’après France Inter : « Les comportements [de Charles Prats] ont fait obstacle au bon fonctionnement du service des juges des libertés et de la détention et ont été source de stress et d'inquiétude pour le personnel de greffe. » « Ils ont également mis ses collègues magistrats et certains partenaires institutionnels en difficulté et rendent impossible son maintien dans la juridiction alors même qu'il n'a pas fait montre d'une quelconque remise en cause personnelle sur ses agissements. »

Une sanction qui vise uniquement les tweets ? Selon une source proche du dossier, Charles Prats avait été blanchi de l’intégralité des reproches qu’on lui avait faits, bénéficiant d’un grand nombre de témoignages positifs « notamment issus de la gauche », note cette source, qui souligne « la dureté effective de la sanction pour deux tweets ». Pour rappel, la présidente du Syndicat de la magistrature n’avait reçu aucune sanction administrative à la suite de l’affaire du mur des cons. Une sévérité qui interroge dans une magistrature très majoritairement classée à gauche. L’enquête avait, à l’époque, suscité l’étonnement à droite, notamment du côté de la droite et du centre, puisque des élus, notamment le patron des LR au Sénat Bruno Retailleau et le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde, avaient publié une tribune dans Le Figaro dénonçant des « pressions sur le juge Prats ». Si les travaux du magistrat contre la fraude sociale n’ont pas été cités dans les éléments à charge, le message politique de cette sanction semble évident aux yeux de nombreux acteurs du monde judiciaire. Lorsque l’information avait filtré à la fin de l'année 2021, le député UDI Pascal Brindeau avait déclaré dans l’Hémicycle, interpellant le garde des Sceaux : « Votre gouvernement ne supporte pas les vérités assenées par Charles Prats sur la réalité et l’ampleur de la fraude sociale dans notre pays. »


Du côté des acteurs, en tout cas, il y a une forme d’unanimité. L’avocat pénaliste Yves Levano n’y va pas par quatre chemins : « Le TJ de Paris va perdre un grand JLD. Un juge couillu, indépendant, n’hésitant pas à recadrer avocat, parquet… Si son comportement mérite une mutation d’office, combien de magistrats mériteraient une révocation ? » Un avis partagé par le très médiatique avocat Charles Consigny.

Et après ? Soumis à l’obligation d’un changement de juridiction, Charles Prats risque donc une mutation « dans un quelconque placard loin de Paris », d’après un fin connaisseur de la magistrature. « Quand on manque à la vérité, on manque forcément à la justice », disait Péguy. En France, c’est l’institution judiciaire qui constitue un manquement. En tout cas, le message est passé. Si la droite compte un jour prendre le pouvoir, elle devra « avoir le courage de dénoyauter l’institution de ce courant marxistant », lance Georges Fenech, contacté par BV. Courant responsable du « grave dysfonctionnement de l’appareil judiciaire ».

Contacté, Charles Prats n’a pas souhaité commenter cette information.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Donc une justice à la dérive n’a plus qu’un argument, attaquer la personne, quand elle ne peut contredire les idées…
    C’est du déjà vu…

  2. Même si muté, Mr PRATS doit continuer son travail’ d’investigation et d’information’. La justice ne pourra pas lui ressortir une deuxième fois le coup de ses 2 propos. Notre pays est en train de crever, la gauche et l’ultra gauche qui sévit dans toutes les couches de la société. Tout est dit à propos du rôle de Moreti, petit chou chou de Macron
    Par ailleurs, toutes les plaintes classées sans suite faute de moyen pour les traiter , il,faut exiger un remboursement par l’état des frais de justice engagés par tous les plaignants.

  3. Les citoyens français ne peuvent que se désoler de décisions revanchardes et extravagantes de JUGES qui se croient tout permis comme par exemple le fameux « mur des cons » !!!

    Eric Zemmour a dénoncé cette dictature et a éclairé l’opinion publique sur « le gouvernement des Juges »
    Faudra t il attendre une révolution induite par nos parlementaires ? l’exemple récent actuellement fourni par la Knesset ( Assemblée Nationale israelienne) est instructif à ce sujet..(les députés ont voté une loi leur permettant d’annuler purement et simplement une décision judiciaire « contraire aux interêts du pays »)..Chiche !

  4. Socrate a dit :  » Nul n’est plus détesté que celui qui dit la vérité » . Pas belle la magistrature en FRANCE ? Ces « gens » se prennent pour dieu . L’école de la magistrature est avant tout une école d’idéologie .

  5. Merci infiniment à vous Charles Prats pour votre lucidité votre honnêteté intellectuelle et votre courage.
    Être condamné pour des propos tels que « nervis d’extrême gauche » ou de « peste noire » et traiter les écologistes de « Khmers verts », est indigne envers un juge qui sait juger librement de la part d’une justice apparemment asservie par l’exécutif.
    Au fait le ministre impliqué dans des affaires sans fin, il démissionne quand ?

  6. Il devient urgent de fermer l’ENM et de nommer les magistrats par scrutin populaire. En tous cas, plus personne ne pourra désormais dire : »Je fais confiance à la justice de mon pays » (phrase maintenant totalement obsolète).

  7. Le syndicat de la magistrature à supprimer un panier de crabes une honte pour la justice française et la France tout court. Merci à Charles Prats un homme intègre qui a des couilles oui. BRAVO. Ses détracteurs ne méritent que mépris.

Commentaires fermés.

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