Le livre de l’été : La Reconquête (17)

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Le jour de l’élection

Léa Salamé avait les traits tirés, l’élection allait se jouer en un tour puisque seuls quatre candidats s’étaient finalement présentés tant les délais avaient été courts. Or, deux d’entre eux, Asselineau (dont tout le monde se demandait d’où il tenait ses parrainages) et Bayrou, faisaient moins de 3 % en cumulé.

Elle connaissait déjà les résultats et était en train d’annoncer l’arrivée des quatre porte-parole des candidats. Léa Salamé avait toujours été l’une des incarnations les plus parfaites du politiquement correct. Son rejet de la droite dans son ensemble était clairement visible dans ses interviews, sa complaisance envers le centre-gauche et l’extrême gauche l’était tout autant. Elle avait cependant toujours essayé de montrer les contradictions de ses adversaires idéologiques avec un minimum d’honnêteté, elle ferait de même ce soir.

Elle avait d’ailleurs trouvé Ogras et Castaner particulièrement légers dans leur gestion des banlieues. Il y avait eu des centaines de victimes dans les attentats de février puis dans les émeutes qui avaient suivi. Elle n’aurait jamais imaginé que les islamistes bénéficiaient d’une telle force de frappe. Évidemment, il y avait des inégalités, des difficultés d’intégration, voire des ghettos, mais de là à ce que les islamistes disposent de dizaines de gamins prêts à se sacrifier pour la cause, de centaines de prisonniers parfaitement organisés pour assassiner des gardiens avec des armes venant d’on ne sait où, de dizaines de milliers de citoyens prêts à manifester violemment et à tuer des CRS…

Elle revint au présent. Sur son plateau, Laurent Wauquiez et Samir Ogras se faisaient face, Asselineau était venu en personne et le représentant de Bayrou venait de se désister. Elle avait également fait venir en renfort deux observateurs « neutres », Christophe Barbier et Nathalie Saint-Cricq. Elle introduisit rapidement les invités et commença à poser quelques questions avec son sourire habituel :

– Laurent Wauquiez, les résultats vont nous être communiqués dans quelques minutes. Êtes-vous confiant ?

– Bonsoir, Madame Salamé. Eh bien, nous faisons face à l’abstention la plus faible de l’histoire de notre République. Nous devons d’abord nous en féliciter car cela signifie que le candidat qui sera élu le sera avec toute la légitimité nécessaire à la mise en place des réformes qu’il aura promises. A priori, plus de 90 % du corps électoral s’est déplacé, c’est déjà une victoire. Et force est de constater que la France périphérique qui avait déserté les urnes depuis des décennies s’est massivement mobilisée. C’est une chance inespérée pour notre pays.

– Oui, mais cela ne s’explique-t-il pas par le profil des deux candidats ? Ce que je veux dire c’est qu’entre l’extrême droite et le ticket Castaner-Ogras le clivage impliquait nécessairement une forte participation.

– D’abord, laissez-moi vous dire que Marion Maréchal n’est pas la candidate de l’extrême droite…

– Excusez-moi, mais ce n’est pas parce qu’elle a gommé son deuxième nom et une partie de sa famille que nous devons la considérer comme lavée de son appartenance passée au Rassemblement national.

– Marion est la candidate de Restauration. Libre à vous de considérer des millions de Français comme étant des extrémistes, mais je ne vous laisserai pas le dire sans réagir. De toute façon, la question n’est pas là. L’abstention, comme je le disais, est la plus faible qu’on ait jamais connue et c’est une excellente nouvelle. Par ailleurs…

– Oui mais vous considérez…
Elle tenta de le couper mais il ne la laissa pas faire.

– Par ailleurs les sondages nous donnent largement en tête à l’heure qu’il est, je suis donc confiant puisque c’était votre première question. Je considère comme extraordinaire le rejet massif du successeur de Monsieur Macron ainsi que de son très communautariste bras droit.

La réaction de celui-ci ne se fit pas attendre.

– Vous êtes scandaleux…

– Samir Ogras, vous voulez réagir ?

– Oui, Madame Salamé. Cette allégation me scandalise. Alors parce que je suis musulman, je dois être communautariste ? C’est bien cela Monsieur ?

– Absolument pas, ce n’est pas du tout ce que j’ai dit. C’est votre affiliation aux Frères Musulmans et à l’UOIF qui me pose problème, ainsi que ce que vous avez laissé faire dans nos banlieues pendant vos deux mois d’intérim. Le voilà, votre communautarisme. Vous avez laissé le contrôle des banlieues aux islamistes !

– C’est totalement faux, vos fantasmes ne trompent personne !

– Messieurs, je vous interromps car il va être 20 heures, les résultats vont nous être communiqués dans 10, 9, 8…

La France tout entière tendait l’oreille, écarquillait les yeux, sentait son pouls accélérer : « … 2,1. » Le portrait de Marion apparut sur les millions d’écrans. « Marion Maréchal est élue avec près de 58 % des voix, voici les images en direct de la Place de la Concorde, elle devrait y arriver d’ici 30 minutes pour faire son premier discours en tant que Présidente. »

– En attendant que le Président fasse son discours, dites-moi, Laurent Wauquiez, que ressentez-vous en cet instant ?

– Ce que je ressens, c’est avant tout une immense espérance ! Espérance dans la capacité de notre pays à se relever et à reprendre sa destinée en main. Une fierté aussi, de voir les Français nous faire confiance et croire dans notre projet de restauration de la souveraineté française, ils nous ont choisis car ils savent que nous seuls pouvons assurer un retour à l’ordre dans un contexte particulièrement violent. Je suis évidemment ému de voir que tant de nos concitoyens se sont mobilisés. On parle de près de 92 % de participation, c’est inédit, inespéré, c’est un sursaut démocratique et un sursaut patriotique. Nous prendrons dès la semaine prochaine des mesures exceptionnelles par le biais de décrets et nous allons également lancer, comme annoncé, divers référendums. Nous instaurerons très rapidement le référendum d’initiative citoyenne, tant demandé et espéré par nos concitoyens, et nous allons introduire une réelle proportionnelle à l’assemblée. L’heure est aux actes.

– Samir Ogras, je vous laisse la parole.

– C’est une immense déception, la France a choisi la voie du rejet de l’autre, de l’Europe, du réfugié, du demandeur d’asile, de la diversité, des droits de l’homme et, plus loin, des Lumières. C’est un choc immense et je redoute la prise de pouvoir de cette jeune femme inexpérimentée et fascisée. Je prends acte de cette élection en tant qu’homme politique, élection qui est démocratique, mais je la rejette en tant que citoyen.

– Merci, Samir Ogras, nous allons retrouver la place de la Concorde dans quelques instants pour suivre le premier discours de Marion Maréchal.

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