Espagne, Pedro Sánchez : l’ingénieux Don Quichotte ?

Pedro Sanchez

Cible de nombreuses critiques, Pedro Sánchez, le chef du gouvernement socialiste espagnol, sort des élections législatives du 10 novembre dernier indubitablement affaibli. N’ayant pas été suffisamment motivé ni entreprenant pour former un gouvernement de coalition avant le mois de juillet, il dispose d’une marge de manœuvre réduite pour former une majorité stable à la Chambre des députés. Si l’homme sage apprend de ses erreurs, l’homme avisé apprend des erreurs des autres.

Pourtant, le résultat de cette élection n’est pas une surprise en soi. Les électeurs espagnols étaient fatigués de se rendre aux urnes pour la quatrième fois en quatre ans ! Cependant, aucun parti politique n’a atteint la majorité absolue. Rien de tel pour brouiller davantage le panorama politique ibérique, selon le quotidien espagnol El País.

Devant l’impuissance de Pedro Sánchez à apaiser les tensions en Catalogne, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) perd trois sièges, passant de 123 à 120 députés (sur 350). Ce n’est pas une défaite en soi, mais cela illustre que le peuple ne l’a pas suivi dans sa volonté d’obtenir une majorité socialiste. De son côté, Podemos, le deuxième parti de gauche, chute de 42 à 35 sièges.

À droite, le Parti populaire, emmené par Pablo Casado, obtient une prometteuse progression, de 66 à 88 sièges. Par contre, contrairement aux prévisions des instituts de sondage, les libéraux de Ciudadanos s’effondrent, de 57 à 10 députés, ce qui a conduit leur chef de file, Albert Rivera, à démissionner et quitter la vie politique espagnole.

De toute évidence, le leader de Ciudadanos est allé trop loin dans la diabolisation de la crise catalane. Mais il a surtout recueilli le fruit de ses erreurs de positionnement ainsi que de son infructueuse association avec Manuel Valls aux dernières élections municipales de Barcelone. Ce dernier, après avoir semé la zizanie au sein du Parti socialiste en France, vient de ruiner le centre droit espagnol.

Mais c’est surtout Vox, parti nationaliste, qui tire le plus de profit de cette nouvelle consultation électorale en s’imposant comme la troisième force au Parlement espagnol. Il passe de 24 à 52 sièges.

Surfant sur les effets anxiogènes de la crise catalane, Vox a profité visiblement de sa présence au procès des dirigeants catalans incriminés et dont neuf ont été condamnés à des peines sévères de prison allant de 9 à 13 ans.

Devant le tribunal et les caméras qui retransmettaient ce procès politique en direct pendant quatre mois, Vox s’est posé en garant de l’unité de l’Espagne au nez et à la barbe du Parti socialiste, du Parti populaire et de Ciudadanos ! Aussi rusés que peuvent l’être les renards en pareille circonstance, les avocats de Vox représentaient l’accusation populaire en leur qualité de plaignants et ils ont su se faire entendre.

Toutefois, une question se pose maintenant : comment Pedro Sánchez, Pablo Casado et Albert Rivera ont-ils été aveugles à ce point ? Moralité de l’histoire : il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir !

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Henri Ramoneda
Cadre Supérieur de Gestion

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