Des lectures pour l’été : Les Tambours de la pluie, d’Ismaïl Kadaré, 1970

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Le 4 novembre 1443, le plus habile capitaine de l’armée turque abandonne celle-ci en pleine bataille décisive contre une coalition chrétienne au cœur des Balkans. Avec sa garde personnelle, le général Skandenberg - Georges Kastriote de son vrai nom - réalise son projet longuement mûri : rejoindre les siens en Albanie et organiser la résistance contre l’Empire ottoman.

Pendant vingt-cinq ans, cet homme va unifier les forces albanaises et résister à la plus puissante armée du monde. Les Turcs ne lésineront pourtant pas sur les moyens et, tous les ans, parfois deux fois par an, lanceront de grandes expéditions pour faire tomber les citadelles albanaises. L’enjeu stratégique était si important pour l’Empire que les sultans Murat puis Mehmet II conduiront eux-mêmes l’expédition. En vain : ils repartiront vaincus par Skandenberg.

C’est le siège de la plus importante citadelle albanaise que nous raconte, avec une force incroyable, Ismaïl Kadaré sous forme romancée.

Le récit se situe principalement dans le camp ottoman, immense, dressé devant la citadelle. Les personnages défilent : l’architecte qui connaît la citadelle par cœur car elle fut ottomane, les chefs militaires de l’infanterie, de la cavalerie, des janissaires, l’intendant chargé du ravitaillement et le chef suprême, Tursun pacha, qui joue sa tête en cas d’échec.

Chaque chapitre est suivi d’un court journal tenu par le chef de la citadelle qui nous éclaire sur l’état d’esprit des défenseurs : « Sur le chemin de la horde démente, il faut bien que quelqu’un se dresse et c’est nous que l’Histoire a choisis. Le temps nous a placés à la croisée des chemins ; d’une part la voie facile de la soumission, de l’autre la voie ardue, celle du combat. Nous avons choisi la seconde. L'heure de la grande épreuve sonne. Le ciel se couvre de nuages. Ils affluent de tous les points de l’horizon, impatients d’assister au carnage. »

Les assauts se succèdent, furieux. Les Turcs arrivent parfois jusqu’en haut des remparts puis sont refoulés. Les pertes sont considérables. Tursun pacha est inquiet, d’autant que Skandenberg, fidèle à sa tactique éprouvée, est sorti de la citadelle quelques jours avant l’arrivée des Turcs. Avec ses cavaliers, il détruit les convois de ravitaillement des Turcs envoyés par Venise et harcèle l’immense camp. Une attaque nocturne est magnifiquement racontée.

Tursun pacha affine sa stratégie : il fait creuser un tunnel et intensifie les recherches pour découvrir les arrivées d’eau souterraines qui alimentent la citadelle. L’étau se resserre.

Ce roman historique est passionnant de bout en bout. Superbement écrit, il nous transporte dans cet impitoyable combat de civilisation avec un talent époustouflant. Lu dans le monde entier, Ismaïl Kadaré est assurément un grand écrivain.

Il faut lire Les Tambours de la pluie, un roman inoubliable.

Le blog d'Antoine de Lacoste

 

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Antoine de Lacoste
Conférencier spécialiste du Moyen-Orient

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