Cessez de nous « tasker » les oreilles !

Quand cesseront-ils, ces politiques et journalistes, de nous tasker les oreilles avec leur task force ? Hormis une frange ténue (mais, il est vrai, « supérieure ») de nos concitoyens, combien savent ce que signifie task force ? Certes, à force de l’entendre, beaucoup ont fini par en saisir le sens, mais qui sait que cette task fait… "tâche" ! Oui, avec un petit chapeau sur le « a » ! Task signifiant "tâche" !

Et tâchez de suivre l’historique de ce mot task : il est né d’un mot… français tiré, selon Le Petit Robert, d’une forme normando-picarde de… "tâche", qui vient du latin médiéval tasc(h)a (« redevance ») puis tasche (« travail rémunéré ») pour finir par faire… « tâche », l’accent circonflexe — hantise des plus jeunes aux plus… ministériels — remplaçant, comme chacun le sait, le « s » disparu…

Certes, pour les partisans de l’English au détriment de la langue française, répéter à longueur de journée task force, c’est si « dans le vent », pardon, si in ! En particulier pour 90 % des Parisiens entre le si in boulevard Saint-Germain et le si eat restaurant La Rotonde ! Alors que nombre de Français doivent plutôt penser que, dans la bouche d’élus de la République officiellement « FRANÇAISE », cela fait… "tache", là, sans accent circonflexe !

Task force ne signifie pas « Force de la tâche », les tâcherons ayant quelque peu disparu, sinon du paysage, du moins du vocabulaire… Une task force étant une « force opérationnelle » ou une « force d’intervention », ne pourrions-nous pas employer, sinon le terme « Force opérationnelle d’intervention » — pas assez short pour les « djeuns » —, du moins son acronyme : FOI ! Et donc « la foi » ! Surtout pour combattre des terroristes qui n’en ont plus…

Je mets au défi les partisans du terme task force de passer à « Force opérationnelle d’intervention » ou à « FOI ». Un défi qui pourrait être un… challenge ! Tiens, challenge, comment, en lisant ce mot, l’avez-vous prononcé en votre tête ? Certainement comme la plupart, à l’anglaise, alors qu’il vient de l’ancien français chalenge, issu de chalonge (« réclamation », en justice), né à Châlons-en-Champagne ! Pourquoi ne pas prononcer challenge à la française ? Ou employer le mot « défi » ! D’ailleurs, ce n’est pas moi qui le conseille mais l’Académie française : "À l’origine de ce mot, on l’oublie trop souvent, il y a l’ancien français chalenge […] qui s’écrivait aussi calonge, calompne, chaloigne, etc. [Il] désignait d’abord une action en justice, puis un défi. Peu à peu "défi" s’est imposé dans l’usage et chalenge a disparu. Avec les termes "défi" et "compétition", le français a les mots nécessaires pour éviter le recours à l’anglicisme challenge. Pourquoi ne pas les employer ? »

À RTL, je m’étais lancé — par amusement, bien entendu — un… défi : ne jamais employer le mot "week-end" mais « fin de semaine ». Je l’ai tenu durant vingt ans de bulletins d’informations, pardon, de « flashes d’infos »…

Picture of Jacques Martinez
Jacques Martinez
Journaliste - Ancien chef d’édition à RTL (1967-2001)

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Pendant que la France accueille des imams algériens, l’Algérie ferme des églises
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois