C'est donc dans la soirée de jeudi que nous avons reçu le message de notre ministre nous apprenant la suppression des épreuves de spécialités de son nouveau bac prévues en mars. C'était devenu inévitable, vu l'orchestration des angoisses à laquelle on assistait depuis trois jours : variants, troisième reconfinement, distance de sécurité portée de 1 à 2 mètres, masques maison bannis, etc. Mais il n'empêche que, dans les lycées comme dans les universités, ces derniers jours seront à souligner en rouge dans les annales du « en même temps » : les unes étaient sommées d'organiser un retour des L1 en présentiel et les autres celui des terminales en continu, alors que les mêmes autorités nous préparaient à l'apocalypse. Si certains cherchent encore la latitude et la longitude de l'Absurdistan, leur GPS les conduira tout droit rue de Grenelle.

Le ministre a donc pris une série de mesures dans le droit fil de celles de l'an dernier : suppression de ces épreuves de mars, évaluation des disciplines choisies en spécialités par le contrôle continu, allégement des programmes en français pour les élèves de première. Le premier bac Blanquer ressemblera au bac Covid de l'an passé. Et, en fait, le ministre peut être content, car ce bac Covid est un bac Blanquer+, avec encore plus de contrôle continu. Certains le déplorent, d'autres pas. Et le ministre se veut rassurant en indiquant que l'égalité serait assurée par « un cadre robuste », des « commissions ». On n'en doute pas, tout en se disant : à quoi bon, puisque l'an dernier, le taux de réussite a explosé pour atteindre 98, 4 % de réussite en séries générales !

Mais le ministère veille et saura trouver des organisations aussi lourdes qu'ubuesques pour arriver à un résultat encore supérieur cette année.

Surtout, le ministre a préservé son innovation : ce fameux grand oral, qui sera une première et que les élèves de terminale vont être priés de préparer plus activement dans les mois qui viennent. Les enseignants (via les enquêtes du SNALC et du SNES, les deux principaux syndicats des lycées) étaient plutôt favorables à un report des épreuves écrites de mars à juin et à la suppression de ce grand oral. Le ministre a tenu à sauver son bébé, et puis cela fait toujours bien, vis-à-vis de l'opinion publique, de montrer que l'on n'écoute pas les professeurs.

Cela aurait pu faire un bon argument électoral. Mais justement, Jean-Michel Blanquer vient de renoncer à être tête de liste LREM lors des élections régionales, où on lui promettait un mauvais score. Le personnage se tient en réserve. On ne sait jamais : les Français et le Président pourraient se lasser, à Matignon, de l'homme à l'accent. Et les remplaçants LREM encore crédibles ne sont plus si nombreux.

En tout cas, une nouvelle grève l'attend mardi prochain. La routine, me direz-vous. Non, pas vraiment. Avec cette réforme aberrante et une gestion souvent délirante de l'épidémie qui ne fait qu'en souligner les lourdeurs et les contradictions, les enseignants n'en peuvent plus. Tout comme vous.

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23 janvier 2021 à 14:07

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