Salon de l’agriculture : pourquoi la droite s’y sent chez elle

L'été, c'est le moment où beaucoup de Français retrouvent leurs racines paysannes en passant quelques jours à la campagne ou à la montagne. L'hiver, c'est la saison du Salon de l'agriculture. En quelque sorte, c'est la campagne qui vient à la ville. L'occasion encore, pour des centaines de milliers de Français, de se rappeler leurs racines. Celles de la France, en fait.

Les exposants serrent des mains, les vaches se font palper le flanc et les diététiciens multiplient les avertissements. Comme chaque année, le Salon de l’agriculture se tient au Parc des Expositions, dans le sud du XV^e arrondissement de Paris. Si celui de l’année 2022 a été au centre de toutes les attentions durant la campagne présidentielle, celui de 2023 garde une réelle dimension politique. Ainsi, Emmanuel Macron y a fait une apparition éclair de quelques instants, en fin de semaine dernière, au milieu des désormais traditionnels sifflets et quolibets. Le Premier ministre Élisabeth Borne y était ce lundi matin.

À l’aile droite de l’Hémicycle, on attend ce moment avec une certaine impatience, même si une ombre a quelque peu terni le tableau. Une délégation du Rassemblement national emmenée par le président du RN Jordan Bardella arpentera les allées du Salon de l’agriculture, ces 3 et 4 mars 2023, mais la présidente du groupe RN à l’Assemblée Marine Le Pen a été contrainte d’annuler sa venue. En cause, une « blessure à la jambe survenue en fin de semaine dernière ». Une déception pour les militants du Rassemblement national que certains prennent avec humour : « Faire le Salon de l’agriculture avec Marine, c’est épuisant entre les meutes de journalistes et elle qui demeure infatigable », sourit un élu de l’Assemblée nationale. Le député de l’Yonne Julien Odoul (RN) qui accompagnera la délégation menée par Jordan Bardella ce vendredi, mais qui a également prévu de s’y rendre mercredi pour y saluer les représentants de sa région de Bourgogne, assure pour sa part : « C’est un moment incontournable pour nous, un moment où l’on peut saluer le travail de nos agriculteurs et admirer leur savoir-faire. »

Pour le RN, en effet, l’enjeu électoral est primordial : la quasi-totalité des députés du groupe de Marine Le Pen ont été élus dans des circonscriptions rurales ou ont bénéficié d’un soutien massif de ces territoires compensant les faibles scores des zones urbaines. « Je ne suis pas arrivé en tête dans la ville de Sens », explique Julien Odoul, « mais je suis arrivé en tête dans tous les bureaux alentour. » Un calcul que l’ex-députée RN Anne-Sophie Frigout n’a pas oublié. Celle qui a vu son élection de juin annulée a échoué, fin janvier 2023, à garder son siège face à une candidate Renaissance, cette fois sans candidature dissidente : la carte électorale est sans appel. Anne-Sophie Frigout a eu de gros scores hors de Reims mais a été coulée par les bureaux de vote urbains qui ont porté la candidate Renaissance aux nues. « On parle à un électorat qui subit de plein fouet cette fracture de la mondialisation », analyse encore Odoul.

Reconquête a prévu de s’y rendre ce mardi matin. Éric Zemmour et ses trois vice-présidents arpenteront le Salon toute la journée pour rencontrer les agriculteurs. Stanislas Rigault s'enthousiasme : « Ce Salon, c’est la France réelle qui ne veut pas disparaître. » Côté LR, le président des Républicains Éric Ciotti s’est rendu lundi après-midi porte de Versailles pour notamment féliciter les lauréats de la Médaille d’or du Salon qui ne sont autres que des viticulteurs niçois.

Grande absente du Salon, la NUPES semble définitivement bouder le monde agricole, préférant se concentrer sur la lutte contre les pesticides et l’élevage intensif. « Ce sont pour la plupart des députés élus dans les banlieues et dans des zones très urbanisées », analyse un député du RN. « La NUPES méprise cette France rurale ancrée dans le terroir et les traditions », cingle le député Odoul. « Ils sont la France de la créolisation et du communautarisme quand nous sommes celle qui est éternelle », lance Stanislas Rigault. Quelles que soient les raisons invoquées par les uns et les autres, le Salon de l’agriculture reste l’un des symboles d’une France qui se bat pour exister, si ce n’est simplement pour survivre. Dans cette bataille, toute main tendue est bonne à prendre.

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