[POINT DE VUE] Nos bistrots au patrimoine mondial de l’UNESCO : magnifique idée !

C'est au député RN Julien Odoul que l'on doit ce coup de génie. Il vient, en effet, de déposer une proposition de résolution à l'Assemblée nationale pour que les bistrots et cafés français soient inscrits au patrimoine mondial de l’humanité, ce conservatoire immatériel des choses, petites et grandes, que l'espèce humaine a su produire, au cours des siècles, pour se sentir un petit peu moins absurdement seule à la surface de la Terre. Chaque nation a déployé son génie propre jusque dans les menus détails. On trouve dans cette liste, entre mille autres, l'art de la pizza (pour l'Italie) ou le repas du dimanche en famille (en France).
Des institutions de notre pays
Oui, les cafés et les bistrots, eux aussi, sont des institutions de notre pays. Du moins, ils l'étaient. Nés avec l'importation des premiers sacs de café, ils sont rapidement devenus des lieux de vie typiquement français. Le Procope, à Paris, est, paraît-il, le plus vieux café de France : 1686 ! D'autres l'ont rapidement suivi. Au XIXe siècle, tous ces établissements sont devenus, à Paris, des lieux de vie à part entière et, à la campagne, des concurrents directs de l'église paroissiale. La littérature a retenu, sous la plume de Zola par exemple, le rôle majeur que tenaient les cafés dans le monde ouvrier. Autrefois (il faut lire Dumas, cette fois), c'étaient plutôt l'auberge, la taverne ou le relais de poste qui jouaient le même rôle social.
On ne buvait pas que du café, dans les bistrots. Il n'était pas rare que la paie du père de famille soit dilapidée au comptoir. Le curé d'Ars lui-même fit fermer trois débits de boissons afin que ses ouailles se concentrent sur l'essentiel. Mais les bistrots sont aussi (étaient aussi ?) des lieux de philosophie gouailleuse. On en fit même des livres (les Brèves de comptoir). Quoi qu'il en soit, le propos de M. Odoul, rédigé d'une manière simple et élégante, ne vise pas si loin mais vise plus juste. Ce qu'il veut défendre (et comme il a raison !), c'est le lien social que créent ces établissements. Ecoutons-le : « Mais au-delà des chiffres, c’est toute une géographie sociale et humaine qui se déstructure. Deux tiers des communes rurales sont désormais dépourvues de tout commerce, bistrot compris. Dans certains villages, le café est le dernier lieu où l’on se croise, où l’on parle, où l’on vit ensemble. Là où il disparaît, le silence s’installe et, avec lui, l’isolement. » Oui, dans cette France des « sans-dents » (Hollande) « qui ne sont rien » (Macron), cette France des gens qui « fument des clopes et qui roulent au diesel » (Griveaux), cette France qui n'intéresse pas les grandes villes, il n'y a plus que les bistrots pour porter à bout de bras une fraternité de plus en plus hypothétique.
La France des « territoires »
Pour preuve de sa parfaite compréhension des enjeux, M. Odoul propose que cette résolution s'accompagne d'une politique d'aménagement du territoire volontariste. Là encore, il a raison : défendre la France des « territoires », c'est le faire concrètement. C'est préserver ces PMU à l'odeur si caractéristique, c'est maintenir le zinc sur lequel tant de vies simples se sont fracassées ou réparées. Maintenant que les églises, elles aussi, sont vides, les cathos n'ont plus d'excuse pour ne pas donner un coup de pouce à ce beau projet.
Alors, vive les bistrots, les cafés, la diagonale du vide et les clubs de nationale ! Vive les sports hippiques, les discussions sans voyelles à l'heure de la fermeture, le bruit des journaux qu'on déplie devant un grand crème et un croissant, et les gros rires, le soir, devant la télé, quand elle passe des meetings politiques. Et surtout, bravo à Julien Odoul !

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24 commentaires
L’idée est très bonne. Excellent même. Mais… c’est l’idée, le souvenir, des bistrots qui serait inscrite au patrimoine mondial _ son souvenir _ , ou l’encouragement voire le soutien à l’ouverture de ce qu’on appelle les bistrots ( cafés, brasseries etc ) ? Car actuellement, ils ont tendance à fermer. Certes, il y a des « burgers » ou/et autres concepts ; mais les fameux cafés étaient assez uniques. Dans bien des pays, européens U.E ou pas, d’ailleurs , il n’y a pas ( à ma connaissance ) de cafés avec zinc etc ( mais plutôt qui : des pubs ou des salons de thé )
Le bistrot, c’est LE centre névralgique d’un village, que cela plaise ou non.
Le Patrimoine Mondial est devenu le fourre-tout de l’humanité !
Ca ne veut plus rien dire…
entièrement d’accord ! à supprimer.