Le Sénat va-t-il (enfin) tuer l’écriture inclusive ?

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Le Sénat, chambre haute du pouvoir législatif, est resté à droite pendant que l’Assemblée nationale basculait, sans s’arrêter, du centre droit au centre gauche avec cette mollesse vociférante qui est sa marque de fabrique. Enfin, quand on dit à droite, on est peut-être un peu excessif. Disons, du moins, que le Sénat est demeuré un endroit relativement paisible, raisonnable, bourgeois même, dont Gérard Larcher, son président, est une sorte de symbole. Un Gargantua tranquille à la tête d’une assemblée qui ronronne.

Proposition de loi adoptée en commission

Il faut croire que l’héritage conservateur du Sénat a fini par ressurgir sous une forme imprévue puisque, le 25 octobre, les sénateurs ont adopté une proposition de loi tout à fait inespérée, due à la sénatrice LR de l’Aisne Pascale Gruny. Il est question (ni plus ni moins) d’interdire encore davantage l’usage de l’écriture inclusive. Déjà proscrite dans les textes du Journal officiel depuis 2017, puis dans les textes de l’Éducation nationale depuis 2021, cette pseudo-orthographe, aussi laide qu’imprononçable, est censée développer l’égalité. On parle ici de l’égalité entre les femmes et les hommes, l’égalités femmes/hommes, quoi, à ne pas confondre avec l’égalité hommes/femmes, évidemment. Les sénateur.ice.s, comme on les appelle encore, vont donc devoir débattre d’une extension de cette interdiction sur les documents administratifs, les documents commerciaux comme les annonces de vente ou les notices d’utilisation, ainsi que dans les contrats de travail, les règlements intérieurs ou les offres d’emploi. Si la loi est adoptée, on imagine d’ici la déception de ceux (pardon, de celleux) qui ont commencé, à l’université ou dans de nombreuses grandes entreprises par exemple, à utiliser de leur propre initiative cette nouvelle forme qui n’évoque que très vaguement le français.

L’examen du projet de loi aura lieu en séance publique le 30 octobre. On ne sait pas encore ce que cela donnera, mais imaginons un peu. L’écriture inclusive serait alors ouvertement stigmatisée, pour reprendre un mot qui est si cher à nos nouveaux censeurs. Ce ne serait que justice. Mettre des points partout serait pris pour ce que c’est : un marqueur idéologique, une volonté de tordre le réel, comme tant d’autres marottes et obsessions gauchistes. Pour bien faire, les sénateurs ajoutent même l’interdiction de l’emploi des pronoms chimériques de cette nouvelle langue : « iel », « al » et « ul ». On ignorait – en tout cas l’auteur de ces lignes - que les pronoms « al » et « ul » fussent en usage dans la langue française. Comme quoi…

Un terme officiel à la mutilation de la langue française ?

Les sénateurs qui défendent cette loi ont parfaitement compris que modifier la langue, communiquer dans une autre langue, c’était davantage imposer des idées que les partager avec les autres. Cependant, il reste un petit problème, lié à la nature même de l’adversaire : si cette loi bienfaisante est adoptée et met un terme officiel à la mutilation de la langue française, de quels instruments de rétorsion la justice disposerait-elle ? Et d’ailleurs, dans un pays où l’on a une chance sur trois d’être jugé par un adhérent du sinistre Syndicat de la magistrature, quel magistrat (ou plutôt quelle magistrate) condamnera un utilisateur de l’écriture inclusive ? Désormais, les juges refusent de faire appliquer la loi et se contentent de la dévitaliser. Il n’y a aucune raison que ce ne soit pas le cas ici.

On le voit chaque jour : la loi, en France, devient une simple variable d’ajustement, une règle du jeu qui n’inquiète que ceux qui souhaitent la respecter. En dépit du fait que cette proposition aille dans le bon sens, il y a fort à parier qu’en France, comme dans tous les pays sous-développés ou en voie de sous-développement, l’empilement des lois ne se heurte à l’impuissance de l’État. On verra !

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

31 commentaires

  1. Cette écriture si je puis dire inventée pour officialiser l’expression de nos chances qui la pratiquent déjà dans le meilleur des cas est une aberration. ;un signe de décadence

  2. Bienvenue chez Ubu.
    Quoiqu’il en soit, si cette loi passe… un jour ou l’autre, c’est Rousseau Sandrine qui risque de nous faire un avc cathodique en direct.
    Cette écriture est un non-sense d’une bêtise crasse qui complique plutôt que d’aider

  3. Cessez donc d’utiliser le langage gauchiste de bisounours! ce n’est pas une langue « inclusive » (qui inclut tout le monde donc) mais d’exclusion ! Les hommes d’un côté, les femmes de l’autre! Le masculin en Francais l’emportant sur le feminin, c’est le « neutre » anglais ou allemand! Maintenant que toutes ces frustrées fassent de thérapies de groupe, si elles ne se sentent pas bien!

  4. En France, tandis que l’on se débat avec du terrorisme aveugle, sanguinaire, on en vient à débattre du respect de la langue française académique à cause de quelques pédants et utopistes maniérés. Si tous les français de bon sens résistaient à leur manière à cette exubérance, par exemple en renvoyant les courriers illisibles, marque d’irrespect à l’égard du lecteur, le législateur n’aurait pas à intervenir. On s’étonnera ensuite qu’il soit nécessaire de multiplier les fonctionnaires, que notre administration et nos lois soient un réseau de barbelés inextricables, improductifs. Mais c’est la France dite « progressiste ». Cherchez l’erreur.

  5. La « mollesse vociférante » (merveilleuse expression) et le en même temps vont ils empêcher toute action bénéfique ?

  6. Ce n’est pas sans rappeler les débats autour de l’Espéranto qui devait devenir la langue commune à plusieurs pays. Heureusement nous y avons échappé

  7. S’il fallait un marqueur de la décadence de l’Occident, l’écriture inclusive serait en bonne place. Il faut que les esprits soient bien malades pour défendre ce type d’énormité. Si les sénateurs ont encore un peut de bon sens, ils doivent mettre fin à cette folie.

  8. Enfin, un lieu où la raison ne se perd pas.L’écriture inclusive c’est arracher nos racines et devenir inaccessible à tous.
    C’est presque une folie meurtrière. Pourquoi démolir la France. Cette culture de « bobos » doit être complètement interdite !!!!.

  9. Bravo ! Quant au syndicat de la magistrature, pas besoin d’aller jusque là. Une procédure disciplinaire interne suffit largement.

  10. Oui et que toutes ses âneries de gauchos soient interdites dans tous les administrations, média et document publiques

  11. Bravo au sénat et il faut tout simplement l’interdire partout . Quand à ceux qui ne respectent pas la loi il y a des moyens pour sévir il suffit de vouloir , d’avoir le courage de le faire .

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