Le linceul de Turin daterait bien de l’époque du Christ

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Cette pièce de lin, vénérée par les uns, contestée par les autres, vient de connaître un nouveau rebondissement. Pierre de Riedmatten, président honoraire de l’association Montre-nous ton visage et auteur du livre Le Saint Suaire, nous explique pourquoi le test au carbone 14 qui datait le tissu au Moyen Âge est devenu caduc.

Iris Bridier. Une nouvelle technologie vient, récemment, de dater le linceul de Turin de l’époque du Christ. En quoi consiste-t-elle ?

Pierre de Riedmatten.  En 2013, le professeur Giulio Fanti (université de Padoue) avait déjà montré, par une analyse en spectroscopie infrarouge et en spectroscopie Raman, que le tissu du linceul avait pu être fabriqué au tournant de l’ère chrétienne. En examinant une douzaine de tissus de lin, datés de 3.500 ans av.-J.C. jusqu’à l’époque actuelle, il avait en effet observé une diminution de l’amplitude du pic d’absorption spectroscopique de la cellulose, ce qui permet de caractériser le vieillissement cristallographique de cette molécule. Après avoir établi la loi correspondant à ce vieillissement, il a testé un petit échantillon de lin provenant du linceul de Turin et il a pu ainsi le dater de l’époque du Christ, à +/-250 ans près.

Une nouvelle étude, conduite par l’Institut de cristallographie de Bari (Italie), a été publiée le 11 avril 2022 dans la revue Héritage. La nouvelle technologie utilise les rayons X, en suivant la même démarche : déterminer une loi de dégradation structurelle de la cellulose sur une douzaine de tissus de lin, anciens et récents. Le test d’un très petit échantillon (0,5 mm x 1 mm), indiqué comme provenant du linceul de Turin, a permis ainsi de le dater de 2.000 ans : le résultat est en effet très proche de celui d’un fil provenant de tissus trouvés récemment à Massada, forteresse juive prise par les Romains en l’an 73.

I. B. Quelles ont été les conclusions de ces nouvelles expériences ?

P.d.R. Selon cette nouvelle approche, le tissu daterait bien de l’époque du Christ. D’autres éléments donnent aussi des informations objectives sur la très grande ancienneté de ce tissu : une couture longitudinale très particulière n’existe sur aucun tissu ancien d’origine européenne, mais on la trouve justement sur les tissus découverts dans la forteresse de Massada citée plus haut ; les traces de pièces de monnaie, visibles sur les yeux de l’homme du linceul, correspondent à celles fabriquées entre 29 et 32 à Jérusalem (or, le Christ a été crucifié dans les années 30 à Jérusalem) ; enfin, preuve que le linceul était au Moyen-Orient bien avant la date donnée par le 14C, il y a, dans le tissu, des trous d’une forme très particulière qui ont été reproduits à Constantinople dans un manuscrit daté au plus tard de 1195 (manuscrit Pray conservé actuellement à Budapest).

I.B. Qui est l’homme du linceul ?

P.d.R. Selon les traces d’écritures découvertes récemment autour du visage de l’homme du linceul, il s’agit d’un certain Jésus, nazaréen, condamné à mort. L’empreinte laissée sur le tissu montre que ce condamné a subi, et dans le même ordre, tous les supplices de la Passion du Christ, avec beaucoup plus de détails, notamment pour la couronne d’épines, la flagellation, le portement de croix, la plaie du côté…

Au total, bien que ce linge ne soit pas un article de la foi chrétienne, car il montre un homme mort et non pas le Ressuscité, il ne peut que conforter notre foi personnelle et nous inciter à méditer sur les plaies du Christ.

I. B. Ces nouveaux résultats vont-ils faire cesser toute controverse ?

P.d.R. Il y aura toujours des controverses. Mais les « données brutes » des tests au carbone 14 de 1988 ont été fournies récemment par le British Museum. Leur analyse statistique (publiée en 2019) montre que les écarts de datation entre les trois laboratoires atteignent 255 ans, ce qui est totalement incompatible avec l’homogénéité des mesures, alors que, sur le plan textile, les trois échantillons sont parfaitement homogènes. Par ailleurs, personne n‘a jamais pu reproduire cette image qui est absolument unique (tridimensionnelle, en négatif alors que les taches de sang sont en positif). Elle est toujours « provocation à l’intelligence », comme l’a dit le pape Jean-Paul II en 1998.

I. B. L’Église a-t-elle reconnu cette relique ?

P.d.R. Tous les papes sans exception ont toujours vénéré le Saint Suaire. Aujourd’hui même, le pape François a célébré une messe devant le linceul, à Turin, en commémoration de la bulle du pape Jules II qui instaura la fête du Saint Suaire, le 4 mai 1506 [NDLR : le lendemain du 3 mai, fête de la Sainte Croix].

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Je ne crois pas à cette analyse apologétique, je suis moi même chercheur (non professionnel) dans l’historicité des trois monothéismes et des personnages qui y sont cités, et je suis de près ce genre d’étude. Les trois analyses au C14 de 1989 par des labos de Tuckson, d’Oxford et de Zurich, ramènent le même résultat : le suaire et son image est une oeuvre médiévale. Je n’ai pas assez de place ici, mais il existe de nombreux arguments pour contredire ce faux « miracle ».

      • Oui je l’ai lu, et je ne suis pas d’accord avec de nombreuses choses, notamment en ce qui concerne la pseudo reconnaissance de l’Église du « Saint Suaire ».
        Il faudrait aussi tenir compte des recherches de l’historien Andréa Nicolotti, une référence du suaire depuis 2002, et rappeler le travail du chanoine Ulysse Chevalier, et son travail de recherches historiques via de nombreuses archives, afin de retrouver l’origine du suaire, ou lire parmi ces archives, une lettre adressée au pape Boniface IX

  2. ils s’en donnent du mal pour prouver que c’est un faux mais rien n’y fait la vérité revient au galop…

  3. La dernière phrase du dernier paragraphe est curieuse et remarquable. Changez la virgule de place et ça devient « aujourd’hui, même le pape François etc….Je pense à la polémique de la Croix avec le Christ qui dit  » aujourd’hui je te le dis, tu seras avec moi au paradis » ou aujourd’hui, je te le dis, etc…toujours cette virgule et le sens change fortement ! Remarquable dans un texte actuel qui traite de ce sujet !

  4. Donc Jésus était bien mort, et rien ne prouve qu’il soit ressuscité. Un petit fragment d’ADN pourrait-il prouver qu’il n’avait pas de père biologique ?

    • Tant mieux si la légende dorée (et fascinante) est vraie. Mais même sans cela il demeure l’extraordinaire enseignement des 5 évangiles (compris celui de Thomas). Et le grand courant philosophique chrétien qui en découle

      • Rassurez-vous, je tiens à notre héritage judéo-chrétien et sans oublier ses méfaits, crimes et dérives, je reconnais les apports et bienfaits du christianisme.

  5. Une chose me dérange c’est que le corps du Christ a recouvert d’un linceul après avoir subi le traitement habituel selon la tradition, de nettoyage selon la toilette des morts, donc son corps n’était plus sanglant , évidemment qu’après la mort le sang ne peut pas couler, donc comment expliquer cette impression sur le tissu. Certaines personnes considéré comme morte on repris vie il n’y a pas eu un tel phénomène. Et cependant je reste croyant dans la vie éternelle mais pas dans un corps physique

    • Les écritures précisent que le sabbat venant la toilette aurait dû avoir lieu ultérieurement

  6. Je ne comprends pas pourquoi l’étude précédente au carbone 14 a affirmé le contraire …
    L’image est troublante et magnifique de toute façon …

    • En admettant que ce soit un faux, personne n’a réussi à expliquer comment le faussaire a procédé. Que Jésus en tant qu’homme ait existé est difficilement discutable. L’existence de Jésus en tant que fils de Dieu relève de la foi. Le Saint Suaire n’y change rien. Fort probablement Jésus était un rabbin itinérant appartenant au courant pharisien. Je ne crois pas qu’il ait été instruit par rabbi Hillel mais fort probablement par l’un de ses élèves.

  7. « Pour ceux qui croient, aucune preuve n’est nécessaire, pour ceux qui ne croient pas , aucune preuve n’est possible  » Stuart Chase

  8. 2000 ans après la mort du Christ on ne peut que s’interroger sur la vie de Jésus et espérer trouver un jour la vérité.

    • Mais même sans cela il demeure l’extraordinaire enseignement des 5 évangiles (compris celui de Thomas). Et le grand courant philosophique chrétien qui en découle

  9. Ces dernières études concernant le Saint Suaire nous apporte un éclairage nouveau, même si comme vous le dites il y aura toujours des controverses, mais l’image de cet homme crucifié est et reste une « provocation à l’intelligence ».
    Merci à vous Madame Bridier.

  10. Très impressionnant et émouvant. Et il est plus que vraisemblable que les disciples aient recueilli et vénéré les linceuls du Christ… Avant de devenir le nom du courant religieux judéo-chrétien, ‘Nazaréen’, de l’hébreu hébreu ‘Nazir’, est d’abord le nom que la loi mosaïque donnait à celui qui faisait le vœu du ‘nazaréat’ : sobriété en tout, jeûne, renoncer au vin, laisser croître les cheveux (Juges 13.14).

    • J’ai appris au catéchisme que « Nazaréen » était pour « habitant de Nazareth ».

      • Je pense que : 1/ ou c’était une erreur 2/ou l’un n’empêche pas l’autre (on dit bien les  »albigeois » pour habitants d’Albi et pour  »hérétiques ». Voir mes références.
        BAV
        TDLN

  11. La preuve par la négative plaide en faveur de l’authenticité du linceul : aucune technique connue n’aurait pu permettre de le fabriquer artisanalement, surtout au Moyen Age.

    • Le suaire de Turin n’est pas unique historiquement, entre 1250 avec le roi Louis IX, et le 14e siècle, il y eut une démultiplication de ce type de reliques (voire à ce sujet, les travaux des historiens Nicolas Sarzeaud et le professeur Pierre-Olivier Dittmar…).

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