La pouponnière d’État

lebensborn

Dès 1941, l’Allemagne, connaissant une période de dénatalité, avec des avortements exponentiels, incitait les pères de famille à faire beaucoup d’enfants, mais aussi des enfants en dehors du mariage. On connaît aussi les Lebensborn, ces « fontaines de vie » gérées par les nazis, dès 1935, où l'on choisissait des femmes, triées sur le volet aryen, qu’on amenait à des officiers dans des lieux ad hoc. Les couples étaient « appareillés » : de même qu’on parle, maintenant, « d’appariement » pour les couples choisissant leur bébé sur catalogue. 20.000 enfants Lebensborn seraient nés ainsi.

Ce fait est peu connu en France, quasiment tabou. On se justifie de cette ignorance (comme de celle des enlèvements des juifs, à une certaine époque, dans les nuits de nos villes) en se disant que la guerre, ô paradoxe, tue et fait naître. C’est de ces orphelins Lebensborn en quête d’identité qu’un journaliste avait recueilli, en 2012, les témoignages, dans un livre paru, chez Flammarion, La Fabrique des enfants parfaits. Devenus adultes, ces enfants témoignent, des décennies après : tel se croyait orphelin de guerre qui se découvre né ainsi et qui cherche ses origines. Ils témoignent pour qu’on n’oublie pas les « orphelins Lebensborn ».

Depuis l’enlèvement des Sabines, on sait comment se font les peuples. En ouvrant ses portes aux immigrés, on a crédité la chancelière du désir, sincère, d’expiation du passé de son pays. Même si l’on pouvait penser aussi qu’elle tissait des liens et plus : l’Allemagne manquait de main-d’œuvre qualifiée.

C’est un fait : la France ne fait pas assez d’enfants. De là la politique nataliste de Macron, dont on connaît l’ambition avec la création de crèches, la scolarisation à trois ans avec l’étude de deux langues. De même que la Chine a imposé la politique de l’enfant unique, lui étend la fabrique d’enfants à toutes : le baby-boom Macron laissera une trace dans l’Histoire. Jean-Marie Le Pen, sur lequel on peut compter pour le poil à gratter, dit qu’il n’est personnellement pas opposé au lobby LGBT car mieux vaut, dit-il, des enfants sans père que pas d’enfants du tout. Ou que (c’est nous qui ajoutons) des femmes en volent dans les supermarchés.

Un deux trois, soleil ! Nicole Belloubet, Agnès Buzyn et Frédérique Vidal faisaient penser à trois élèves de première venues présenter sur l’estrade leur plan de TPE. Pendant que l’une ou l’autre parlait, les deux autres — de vraies gamines ! — faisaient des apartés, gênées, avec fous rires. Ce qui n’empêchait pas Mme le garde des Sceaux de dérouler, d’une voix sereine, son projet de loi : critère de fertilité balayé, discrétion pour tous, filiation à trois vitesses, levée d’anonymat choisie, déclaration anticipée et sécurisée de filiation, devant notaire, avant que l’enfant soit né : tout y était de la fabrique d’enfants. On n’attend plus que le commentaire de Mme Schiappa. Et on se demande, devant ce micmac législatif, si on n’assiste pas à un mauvais rêve. À une illusion comique ? Admirons le garde des Sceaux d’avoir gardé son sérieux.

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Marie-Hélène Verdier
Agrégée de Lettres Classiques

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