Hommage aux Invalides : « leur sacrifice nous oblige »… à ne pas faire n’importe quoi

Hommage Pont Alexandre III

« Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie. » C’est une foule recueillie qui se presse sur le pont Alexandre-III, en ce mardi matin, pour saluer les dépouilles des deux fusiliers marins tombés au Burkina Faso : des anciens combattants, des militaires en uniforme, des retraités, des étudiants, des mères de famille venant de déposer leurs enfants à l’école, des cadres en cravate peut-être un peu là par hasard mais qui s’arrêtent interdits, des garçons de café en tablier et des serveurs à veste blanche venus en voisins. La dernière fois que des Français se sont spontanément dirigés là, c’était pour les gilets jaunes dans une ambiance de guérilla. Comme dans une allégorie de René Girard, il semblerait qu’il faille à notre pays un sacrifice humain pour retrouver paix et unité.

Sacrifice, c’est justement le mot prononcé par Florence Parly : « Leur sacrifice nous oblige. »

Nous oblige à quoi, au juste ?

Nous oblige à faire cas du mot « Français ». Lors de l’hommage officiel aux Invalides, Emmanuel Macron a eu cette phrase, comme sortie d’un autre âge : « La France n’abandonne jamais ses enfants. » Cela s’appelle - lâchons le mot, même s’il est devenu, n’est-ce pas, moche et vulgaire - la mère patrie.

C’est parce qu’ils étaient français que la France est allée libérer ces otages, comme un bon père de famille va chercher ses enfants dans l’adversité. Il est une notion oubliée, chère à nos grands-mères : le devoir d’État. C’était le devoir d’État de l’État, en quelque sorte.

Sans doute ces otages se sont-ils montrés irresponsables (ils n’ont pas fait leur devoir d’État de touriste : se montrer prudent !), peut-être même, qui sait, trouvaient-ils chic et spirituel, avant leur départ, de se déclarer « citoyens du monde », ne maniant le mot patrie qu’avec ironie.

C’est pourtant cette bonne vieille patrie - et des soldats qui, aimant celle-ci à en mourir, ont fait leur devoir d’État - qui les a sauvés. À dire vrai, aucun de ces otages, aucun d’entre nous, à titre personnel, ne mérite que deux jeunes gens donnent leur vie. Seule une qualité commune, belle, précieuse, sacrée, qui nous dépasse et nous transcende le permet : celle d’être français. Ne méprisons pas ce privilège et ce titre magnifiques, ne le bradons pas au premier venu.

Nous oblige à faire cas de leurs frères d’armes, sans attendre qu’ils tombent à leur tour. Parce qu’ils ont le sens du service et pas le droit de grève, il faudrait muer leur budget, c’est tellement commode et peu bruyant, en variable d’ajustement ?

Nous oblige à faire cas de là où ils viennent :
La France périphérique, d’abord, cette France des territoires, comme on dit, que l’on dit désertée, oubliée, reléguée, et qui, pourtant, est encore capable de donner de si beaux fruits. L’un était de Mayenne, l’autre d’Alsace : c’est là qu’ils seront enterrés. Spectacle ô combien touchant que celui de leurs parents, simples et humbles, braves gens mués en gens braves, debout devant le spectacle contre-nature du cercueil de leur fils, fût-il couvert du drapeau tricolore.

L’institution militaire, ensuite, dont la rigueur, la transmission, les traditions, le sens de la hiérarchie et de la discipline, l’obéissance, la sélection - toutes valeurs contraires à l’esprit du temps et enterrées depuis des lustres par l’Éducation nationale qui s’ébaubit candidement de ses soucis - ont modelé le colonel Beltrame, les maîtres Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, mais aussi les pompiers de la rue de Trévise ou ceux de Notre-Dame.

Et certain rapporteur d’extrême gauche de la commission Défense de l’Assemblée nationale, dont l’idéologie, en fait de vocation, ne suscite guère que celle d’antifa, de Black Blocs ou de zadiste, voudrait jouer à l’apprenti sorcier dans cet écosystème sans doute imparfait mais presque miraculeux au motif qu’il ne serait pas assez lessivé à la laïcité ?

Leur sacrifice nous oblige… à ne pas faire n’importe quoi.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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