Européennes : Juppé voudrait être le mentor de Macron

Alain_Juppé_à_Québec

On est rassuré : Alain Juppé n'a plus "d'ambition électorale". C'est ce qu'il a déclaré dans une conférence de presse, ce dimanche, à l'issue des « Vendanges de Bordeaux », un séminaire de réflexion où il avait réuni ses proches. Avant de préciser : "nationale". Car il ne lui déplairait pas de jouer un rôle à l'occasion des élections européennes. Depuis qu'un sondage le désigne, avec Nicolas Sarkozy, comme la personnalité politique qui incarne le mieux la droite, il ne boude pas son plaisir. À défaut d'être le premier, puisque la place est prise, il rêve d'être un mentor.

Il reconnaît qu'il y a, actuellement, une montée du populisme et du discours europhobe mais, en même temps, "il y a la conscience qu’il vaut mieux être ensemble que séparés". Il faut redonner aux Français l'envie de l'Europe. On dirait qu'il singe Macron, même dans ses paroles. "Il faut un vrai débat sur les valeurs", assure-t-il, comme s'il s'agissait d'une primeur. Et de les énumérer : "l’amour de la liberté, pas du libéralisme", "une exigence de justice, de justice sociale", "l’égalité des chances, la solidarité envers les plus faibles" et, bien sûr, "la paix". En lieux communs, il s'y connaît !

Pour lui, "l’Europe ne marche pas si mal, même si elle est perfectible". Il faut, par exemple, "prendre à bras-le-corps la question des migrations", mettre en place "une politique migratoire sur le respect du droit d’asile", instaurer "le contrôle des flux en fixant des quotas". Il regardera "quelle est la liste qui porte le mieux les idées [qu'il a] exprimées". Avis aux amateurs. Si Macron ne comprend pas qu'il lui tend la perche ! Il n'exclut pas, non plus, que Laurent Wauquiez – sait-on jamais ? – mette de l'eau dans son vin et se rapproche de ses positions.

Il faut dire que "la diaspora juppéiste", comme l'appelle un de ses membres, s'est dispersée dans plusieurs directions. Certains ont rejoint Macron, à commencer par Édouard Philippe, le plus juppéiste des juppéistes ; d'autres se situent dans le flou, entre soutien et opposition, attendant, en bons opportunistes, de voir comment le vent tourne ; d'autres restent chez Les Républicains, espérant influer sur la ligne politique du parti. Quant à lui, au-dessus de la mêlée, il a des pions dans tous les camps. Tactique élastique pour parer à toute éventualité.

Alain Juppé ne cache pas sa sympathie pour Emmanuel Macron : "Nous avons tous un a priori favorable", soutient-il, puisque "nous avons tous voté Macron au deuxième tour de la présidentielle". C'est son rôle de signaler les manques.

« Ce n’est pas une attitude critique, nous refusons tous l’opposition bête et méchante, mais nous avons la volonté d’aider, soit de l’extérieur soit de l’intérieur. »

Voilà qui est clair. Il soutient Macron et lui demande, en retour, de tenir compte de ses conseils.

Si la plupart des « vendangeurs » présents ce week-end à Bordeaux se déterminent surtout en fonction de leurs intérêts, ils ont en commun leur détestation de Laurent Wauquiez. Ainsi, Valérie Pécresse, qui souhaite peser de l'intérieur sur la ligne de sa famille politique, écrit dans un tweet : "J'étais aux Vendanges de Bordeaux aux côtés d'Alain Juppé, le rendez-vous de l'amitié. J'y ai plaidé pour une droite patriote et européenne, celle que je défends avec Libres !" Elle attend (sans conviction) que "[ses] propositions sur l'Europe soient reprises par Les Républicains" et en profite pour faire la promotion de son mouvement. Ça, c'est de la politique !

En définitive, ces « Vendanges de Bordeaux » risquent de ne donner qu'une horrible piquette.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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