Et maintenant, Claude Brasseur : ils sont désormais tous au Paradis

Claude_Brasseur_Deauville_2011
Il était le dernier survivant de la joyeuse bande de copains d'Un éléphant ça trompe énormément (1976), d'Yves Robert, film qui lui avait valu son premier César dans un second rôle et avait été suivi, un an plus tard, par Nous irons tous au paradis. Jean Rochefort, inoubliable héros du film, était un bureaucrate en pleine crise de la quarantaine ; Guy Bedos un médecin écrasé par sa mère juive (Marthe Villalonga, dans son cœur de métier, comme on dit) ; Victor Lanoux était un séducteur impénitent ; Brasseur, lui, était un homosexuel discret et rigolard. Les trois premiers sont morts ; leur pote vient de les rejoindre, au terme d'une vie pleine de rebondissements.
Claude était la quatrième génération d'acteurs. Il était le fils de Pierre Brasseur, incarnation du séducteur plein de verve et d'assurance, face à Arletty dans Les Enfants du Paradis (« Ne dites pas non, vous avez souri ! ») ou aux côtés de Jean Gabin, Bernard Blier... et Nadine Lhospitalier, future baronne de Rothschild, dans Les Grandes Familles. Pas facile de relever le gant. Il y avait pourtant réussi, après des débuts comme assistant photographe, trois ans dans les paras en Algérie (1956-1959) et une sélection olympique dans l'équipe française de bobsleigh en 1963, pour les jeux d'Innsbruck. La légende veut qu'Elvire Popesco lui ait dit, alors qu'il allait l'interviewer : « Mais avec un nom comme ça, ce n'est pas possible que toi faire le journaliste. Tu vas faire l'acteur, s'il te plaît. » Et ainsi fut fait.
La série télévisée Vidocq, au début des années 70, puis les deux fameux films d'Yves Robert assurent sa célébrité. Son deuxième César, il le devra à La Guerre des polices (1979) où, aussi idéaliste que désabusé, amant passager de l'incendiaire Marlène Jobert, il s'oppose à un Claude Rich détestable et minéral. Par la suite, il fait un peu de tout, de la comédie romantique culte (père de Vic/Sophie Marceau dans La Boum) à la pochade de beauf (Camping), en passant par deux films de Godard et une victoire au Paris-Dakar, dans la vraie vie cette fois, avec Jacky Ickx. Côté vie privée, il a été le mari de Peggy Roche, qui se consolera avec Françoise Sagan, puis celui de Michèle Cambon, qui sera la mère de son fils Alexandre (cinquième génération d'acteurs). À l'écran, outre Marlène Jobert, il a tourné avec Sophie Marceau (comme amant, cette fois) ou Romy Schneider. On a vu plus mauvais choix.
Il choisissait ses rôles au feeling, jouait avec sincérité (une sincérité d'enfant à laquelle il tenait et que Godard, d'ailleurs, aimait chez lui) et avait trouvé, face à son père, la juste distance préconisée par celui-ci, et qui consistait à ne pas vouloir « [lui] ressembler ni ne pas [lui] ressembler ». On pourrait presque l'entendre en rire, un rire rauque et gouailleur... Tout comme on entend déjà la partie de tennis que les quatre copains pourraient disputer avant de se disputer, comme dans la célèbre scène du film, maintenant qu'ils sont tous au paradis.
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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

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