Deux ans après Samuel Paty : les professeurs s’autocensurent 

Samuel Paty

Selon un récent sondage IFOP, une très grande majorité de professeurs préfèrent désormais s’autocensurer plutôt que de risquer le conflit avec leurs élèves sur les questions de religion. Deux ans après l’assassinat de Samuel Paty, les stratégies d’évitement « se multiplient dans le corps enseignant », note l’institut.

Une forte majorité d’autocensure

« La moitié de "la France des profs" a peur. » Les conclusions de l’enquête IFOP pour le magazine Écran de veille laissent peu de place au doute : plus que jamais, les enseignants craignent pour leur vie. Ainsi, 56 % des professeurs du secondaire public interrogés admettent s’être déjà autocensurés dans leur enseignement afin « d’éviter de possibles incidents provoqués par certains élèves » au nom de convictions religieuses. Un chiffre qui atteint même 65 % dans les zones d’éducation prioritaires. Avant la mort de Samuel Paty, en 2018, ils n’étaient que 36 % à éviter certaines thématiques.

Sans grande surprise, les enseignements les plus contestés au nom de la religion sont l’éducation à la sexualité, la mixité filles-garçons, la laïcité ou encore les cours d’histoire sur les religions ou les génocides. Si ce phénomène connaît une hausse continue depuis 2018, il semble s’accélérer ces derniers mois. Ainsi, « depuis septembre 2021, près d’un enseignant du public sur deux a été confronté à au moins une atteinte à la laïcité ». Refus de mixité, absences répétées aux cours de natation, revendications confessionnelles à la cantine, port du voile… les exemples se multiplient.

Or, face à l’augmentation de ces attaques, le corps enseignant s’inquiète de l’action du ministre sur les questions de laïcité et de fait religieux à l’école. 77 % des professeurs considèrent ainsi que l’Éducation nationale n’a pas tiré les enseignements de l’assassinat de Samuel Paty. Par peur de représailles, plus de six enseignants sur dix renoncent donc à présenter des caricatures de personnages religieux à leurs élèves. En outre, 59 % d’entre eux appréhendent d’avoir à gérer des situations d’élèves qui veulent porter des tenues traditionnelles ou religieuses dans leur classe. Il faut dire que depuis la mort de Samuel Paty, les intimidations contre les professeurs n'ont pas cessé, entraînant un climat de peur au sein de l’Éducation nationale. Récemment, à Évry-Courcouronnes (Essonne), un enseignant d’histoire-géographie était menacé de « subir le même sort que Samuel Paty ». Quelques jours plus tard, un parent d’élève menaçait de « trancher la tête » du professeur de mathématiques de sa fille.

Entrisme islamique

Comme l’indiquait une note des renseignements territoriaux du mois d’octobre 2022, « la frange fondamentaliste islamiste qui n’a jamais accepté et a toujours dénoncé la loi de 2004 bénéficie actuellement d’un contexte favorable dont elle entend profiter ». En effet, plus d’un enseignant sur quatre – et près de 50 % au lycée – ont déjà observé le port par des élèves de vêtements à caractère religieux type abaya ou qamis. Un phénomène qui, au vu du sondage, semble s’accélérer ces dernières semaines. Mais peu de professeurs relaient cette information à l’administration. Les atteintes à la laïcité relevées par les équipes Valeurs de la République sont donc largement sous-estimées.

Face à ce phénomène, Pap Ndiaye « réaffirme sa volonté de protéger l’ensemble de la communauté éducative, et en particulier les professeurs menacés dans l’exercice de leur fonction ». S’il assure vouloir renforcer le soutien et la formation des personnel face aux atteintes à la laïcité, la volonté politique ne semble pas encore au rendez-vous. Face à la « stratégie salafo-frériste », relevée par les services de renseignement, il serait temps que l’exécutif se décide à agir.

Picture of Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

25 commentaires

  1. Pour se protéger, le mieux est de se préparer, que diriez-vous de vous inscrire à un cours de sport de combat ? J’ai inscris mon fils à l’âge de 12 ans dans un club de karaté, maintenant, il est marié et a deux enfants de 22 et 18 ans, qui sont respectivement CN 3 ème dan et CN 1 ère dan. Personne ne va les embêter et si c’est le cas, ils sauront quoi faire, moi aussi après 30 ans de pratique.
    Aux USA, il est question d’armer les professeurs.
    Et vous, vous avez prévu quoi ?

  2. Face à la « stratégie salafo-frériste » , relevée par les services de renseignement , le Ministre de l’ E.N Pap Ndiaye a inscrit ses enfants dans des écoles privées !

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