Aujourd’hui, ils attaquent des commissariats ; demain, ce sera nos maisons

Ces informations sont, en général, assez peu diffusées et médiatisées. Pourtant, chaque année, une vingtaine de commissariats, de casernes de gendarmerie ou de postes de police municipale sont pris pour cibles par des individus agissant en bandes organisées. Dans la nuit de jeudi à vendredi dernier, le commissariat de Louviers-Val-de-Reuil, dans l’Eure, a ainsi été attaqué par une trentaine de jeunes âgés de 15 à 20 ans. Au cri de « Allah Akbar », ils ont, pendant près d’une heure et demie, lancé de nombreux projectiles et engins incendiaires contre le bâtiment de la police nationale, mais aussi contre les quelques policiers qui en assuraient la garde. Ce n’est qu’avec l’arrivée de renforts en provenance d’Évreux, de Vernon et de Rouen qu’il a pu être mis fin à l’assaut de ceux qui, ouvertement, menaçaient de « cramer des flics ».

Ce genre d’attaque, qui fait le plus souvent suite à des périodes de violences urbaines ou qui intervient lors d’interpellations houleuses, a malheureusement tendance à se multiplier.

Ainsi, force est de constater que les violences à l’encontre des forces de l’ordre n’ont plus besoin, aujourd’hui, d’être précédées d’un quelconque prétexte ou motif. De la même manière qu’un véhicule de police est caillassé au détour d’une patrouille, sans même qu’il s’agisse nécessairement d’un quartier sensible, les commissariats deviennent des cibles de plus en plus faciles.

À cela, plusieurs raisons. En premier lieu, la vulnérabilité de locaux occupés, en particulier la nuit, par un nombre restreint de fonctionnaires. Un commissariat peut ainsi être tenu par deux, voire un seul agent, alors que deux ou trois autres policiers patrouillent. Cet effectif, nettement insuffisant, expose non seulement les policiers eux-mêmes, mais aussi l’ensemble de la population dont ils doivent assurer la sécurité. Ensuite, le développement, dans un nombre important de villes et de quartiers, y compris en province, de bandes organisées qui n’hésitent plus à entreprendre des actions violentes contre les forces de sécurité. Ces attaques sont le plus souvent destinées à marquer leur territoire et à fragiliser la présence de l’État dans des endroits où ses représentants ne sont pas les bienvenus. Enfin, la vie « côte à côte » dont parlait Gérard Collomb, l’ancien ministre de l’Intérieur, qui est en train de virer au « face-à-face » ». Et cela, bien plus vite qu’il ne l’annonçait.

Depuis plusieurs années, les spécialistes de la sécurité intérieure dénoncent l’abandon par la puissance publique de nombreux territoires. Cet abandon, en dehors d’une politique sécuritaire inadaptée, car basée sur la fausse idée que l’intégration pacifique de populations marginalisées finirait par s’imposer, a été fortement aggravé par la baisse drastique du nombre de policiers et de gendarmes. De nombreux commissariats sont, aujourd’hui, en sous-effectifs chroniques. Les départs à la retraite ainsi que les mutations ne sont jamais totalement compensés. Si bien que les points de vulnérabilité de notre système sécuritaire se multiplient.

Si, après nos commissariats, nous ne voulons pas que nos maisons soient attaquées, c’est une réforme en profondeur qu’il faut mettre en œuvre. Tout d’abord, en recrutant des policiers et des gendarmes et en revoyant la répartition des missions entre les différentes forces de sécurité intérieure. Ensuite, en remettant à plat la carte des circonscriptions de sécurité publique, pour déterminer où les effectifs doivent, en priorité, être renforcés. Enfin, en se donnant de nouveaux moyens juridiques et matériels, pour que les locaux des forces de l’ordre puissent être protégés efficacement.

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Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

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