2018, l’année de la révolution monétaire : initiative « monnaie pleine » pour la Suisse

Les maux de la planète proviennent du mondialisme commercial et de la spéculation financière et monétaire. Or, les Suisses s'apprêtent à voter, en 2018, la nationalisation de la monnaie, ce bien public : c'est l'initiative monnaie pleine.

Initiative, car il s'agit d'une votation référendaire obtenue par le peuple suisse.

La monnaie pleine est théorisée dans les années 30 aux États-Unis (Irving Fischer), reprise en France (Allais) et, à présent, par des dizaines d'économistes, juristes, philosophes. En effet, l’argent électronique de nos comptes en banque n’est pas de la monnaie légale, mais une simple reconnaissance de dette par la banque, à payer en argent liquide sur demande (si elle le peut). Le Conseil fédéral a reconnu que "l’argent bancaire est un substitut monétaire". L'argent bancaire n’est pas couvert par de la monnaie légale possédée par la banque : en Suisse, les banques ont une obligation de couverture de 2,5 % (seulement 1 % dans le reste de l'Europe). La monnaie "pleine" sera garantie par l’État : un titre au porteur en pleine propriété, pas une simple créance à se faire rembourser.

La monnaie pleine n’aura plus besoin de couverture, car il n’y aura plus qu’une sorte de monnaie : celle de la banque centrale. Les comptes privés seront gérés par les banques hors de leurs bilans. Le monopole étatique de création monétaire (billets et pièces) sera étendu à la monnaie électronique (90 % de la masse monétaire). Les banques commerciales ne pourront plus émettre la monnaie, comme elles le font aujourd’hui, notamment en octroyant des crédits, portés au bilan. Elles devront disposer réellement de l’argent qu’elles prêtent, en se le procurant auprès des épargnants, sur le marché ou à la banque centrale.

Les objectifs de la monnaie pleine sont : stabilité économique et financière par le contrôle de la masse monétaire, sécurisation de l’argent rendu indépendant du système bancaire, égalité entre les opérateurs économiques (suppression de l'avantage indu des banques), désendettement public, restitution au Souverain du pouvoir monétaire, sans lequel il n’est pas souverain.

Le contrôle de la masse monétaire évitera les "bulles", l’argent ayant une contrepartie économique réelle. Aujourd’hui, 90 % de notre argent est créé par la dette et dépend de la solvabilité des banques commerciales. Lorsqu’une banque fait faillite, l’État est obligé de la sauver (avec l’argent du contribuable), car si les paiements sont paralysés, l’activité économique s’effondre.

Depuis Aristote, on sait que la finance (chrématistique) ne fait pas partie de l'économie. La monnaie a, pour le philosophe, trois fonctions sociales : échange, comptabilité (et évaluation), réserve. Cela implique que l'émission monétaire soit maîtrisée et adaptée aux besoins de l'économie. Tout laxisme provoque l'excès d'argent artificiel, l'enrichissement sans cause des uns, la dette folle et des "bulles" dont l'éclatement est désastreux pour les faibles. Tout droit (y compris celui de créer la monnaie) a une fonction sociale (Louis Josserand) dont l'oubli appelle une correction par la société. Maurice Allais, prix Nobel d'économie, avait établi (La Crise mondiale d'aujourd'hui) que la "création monétaire" ex nihilo "par le système bancaire est identique [...] à la création de monnaie par des faux-monnayeurs. [...] Concrètement elle aboutit aux mêmes résultats." Concluons par une citation prêtée à Thomas Jefferson ("Letter to the Secretary of the Treasury", Albert Gallatin, 1802) :

Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquise.

N'est-ce pas ce qui s'est produit en 2008 aux États-Unis et que l'on voit à l’œuvre tous les jours dans le monde et en France ?

Si la monnaie pleine est adoptée par le sensé et démocratique peuple suisse, l'aberration de la finance mondiale sera mise en cause. Même si tel ne devait pas être le cas, nul ne pourrait plus ignorer le problème. L'énorme dette mondiale, les flux démentiels de capitaux seront remis en ordre. Ce sont les peuples qui dirigeront leur monnaie et la finance, et non plus l'inverse. Alors le FMI disparaîtra et le contrôle international de la monnaie et de la finance sera confié aux Nations unies.

Henri Temple
Henri Temple
Essayiste, chroniqueur, ex-Professeur de droit économique, expert international

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