[Tribune] Relations police-justice, le divorce est consommé

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Dire que les relations entre la Justice et la police se dégradent à vue d’œil est un euphémisme. Et la fronde policière qui se déroule actuellement sous nos yeux vient attester de ce que la situation est en voie de devenir catastrophique pour nos institutions. Certes, le phénomène n’est pas nouveau. Par le passé, des incompréhensions ont souvent eu lieu entre ceux qui sont chargés d’assurer la sécurité quotidienne des Français et ceux chargés d’appliquer les lois de la République et de sanctionner les délinquants arrêtés par les forces de l’ordre. Pourtant, force est de constater que, depuis quelques années, la mésentente devient chronique jusqu’à tourner désormais à l’affrontement.

Cet affrontement vient de prendre forme dans sa réalité la plus brutale et la plus objective, dans les propos récemment tenus par Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale. En effet, dans un entretien accordé au Parisien, ce dernier a déclaré qu’« avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison ». Cette déclaration fait référence à l’incarcération, il y a quelques jours, d’un policier de la BAC marseillaise accusé de violences en marge des émeutes urbaines survenues en début de mois.

S’il convient de préciser que Frédéric Veaux émettait bien là un avis personnel n’engageant en rien le gouvernement dont il ne fait pas partie, sa parole de haut fonctionnaire n’a pas manqué de faire réagir la Justice, l’opposition de gauche et d’extrême gauche ainsi que certaines institutions telle la Ligue des droits de l’homme, laquelle ne perd jamais une occasion de taper à bras raccourcis sur la police nationale.

Si la réaction de la Justice par la voix du Conseil supérieur de la magistrature peut s’entendre, on ne peut qu’être surpris par l’interprétation outrancière qu’il a faite des propos du DGPN. En rappelant que seule la Justice est légitime pour décider du placement en détention provisoire des personnes, le CSM n’a fait qu’enfoncer une porte ouverte. Et jamais Frédéric Veaux n’a voulu remettre en cause l’indépendance de la Justice, et encore moins discuter l’une de ses décisions. Il a simplement émis une opinion partagée par de nombreux membres des forces de l’ordre, mais également par une très grande partie de nos concitoyens. L’idée fondamentale étant qu’un policier qui agit en service dans le cadre de ses missions ne devrait en aucun cas être considéré et traité de la même manière qu’un délinquant. Cela ne signifiant aucunement qu’il doive bénéficier d’un traitement de faveur et encore moins exonératoire.

Face à ces déclarations, approuvées par Laurent Nuñez, l’actuel préfet de police de Paris, la gauche mélenchoniste et ses alliés du Syndicat de la magistrature n’ont pas manqué d’évoquer la « sédition » ainsi que « la gravité de la collusion des chefs de la police ». Quel dommage que ces politiques n’aient pas les mêmes réactions lorsque des députés LFI participent à des manifestations légalement interdites !

Le divorce police-Justice est donc, qu’on le veuille ou non, consommé. Et les principaux responsables de ce schisme ne sont pas les policiers mais bien les politiques qui, une fois au gouvernement, ont systématiquement cultivé les antagonismes en nommant des ministres de l’Intérieur et de la Justice incapables de parler un langage commun ou, à tout le moins, de s’entendre, dans l’intérêt des Français, sur des politiques pénales et de sécurité compatibles. Quant aux magistrats qui jettent systématiquement de l’huile sur le feu, participant ainsi activement à ce divorce, sont-ils, dans leur travail, aussi irréprochables que ça ?

Il y a, malheureusement, fort à parier qu’une fois de plus, c’est la temporisation qui s’imposera. Ceux qui nous gouvernent n’ont en effet aucun intérêt à ce que cette situation perdure, mais ils n’ont également aucun intérêt à trancher dans ce différend police-Justice. Frédéric Veaux, qui ne peut avoir parlé sans le consentement implicite de son ministre de tutelle, court donc peu de risques. Sauf, bien entendu, à ce que ce désordre policier persiste, voire prenne de l’ampleur. En tout état de cause, il est vraisemblable qu’il sera fait application comme à l’accoutumée de la célèbre phrase d’Henri Queuille selon laquelle « il n’est pas de problème qu’une absence de solution ne finisse par résoudre ».

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Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

Vos commentaires

32 commentaires

  1. À l’âge de 25 ans, j’ai immédiatement profité de mes premiers salaires pour m’acheter une voiture inutilement puissante et ostentatoire du genre qui provoquerait une attaque à Grégory Doucet.
    En 2005, les excès de vitesse sur routes désertes n’étaient pas encore considérés comme des crimes contre l’humanité et je me fais contrôler à une vitesse stupidement élevée.
    Le gendarme de la BMO de Chaumont (52) me gronde, il souligne mon immaturité, m’explique la porté désastreuse qu’aurait pu avoir mon acte et pour appuyer son propos, il m’assure qu’il en a marre de ramasser des morts sur le bord des routes.
    Je l’écoute. Il est crédible, paternel, impeccable.
    Je le remercie même, confus de honte au moment où il prend mon permis.
    C’est grâce à lui que je n’ai jamais recommencé.
    Le jour de mon procès, le juge s’écoutait parler. Il était sentencieux et vaguement ridicule dans son simulacre d’attitude professorale.
    Il me condamne à 150€ d’amende et un mois de retrait de permis, que j’avais déjà effectué.
    Je récupérais donc mon permis en sortant du tribunal.
    En quittant le tribunal je fume une cigarette et je vois mon vieux juge quitter le tribunal au volant d’une voiture encore plus puissante et ostentatoire que la mienne.
    Lui ne m’a rien appris.

  2. Que les policiers, qui, certes, ne sont pas parfaits, mais indispensables au maintien de l’ordre public, lisent la harangue de Baudot, qui figurait dans les buts du syndicat de la magistrature. Ce syndicat fondé par des « soixante huitards » dépités ont tout simplement et brillement pris le pouvoir. Face à ces militants, la masse des magistrats n’ose pas. Ces militants ne font pas de droit mais ce qu’ils veulent, ce qui est codifié dans cette harangue. Lisez la sur internet et vous aurez compris.

  3. O tempora o mores ! Naguère encore un ministre mis en examen démissionnait « pour préparer sa défense » : faut-il être à ce point sur de son impunité pour pavaner devant les micros et se dire maître de son emploi du temps ? Comme certains magistrats ont raison de poursuivre dans leur entêtement idéologique , ils savent qu’ils ne seront pas désavoués !

  4. Quel divorce? Il n’y a jamais eu de « mariage » entre Police et Justice, mais éternel antagonisme. il a déjà fallut du temps pour rapprocher Policiers et Gendarmes! Une seule personne à mon sens pourrait arbitrer avec juste raison: Michèle ALLIOT-MARIE, qui a été tour à tour à l’Intérieur, aux armées, et…à la Justice. Qu’en penserait-elle?

    • Aller chercher un pantin usagé dans son placard ne me semble pas une idée lumineuse. D’autant que le bilan passé dudit pantin parle pour elle : politique de Queuille systématique, rompue par quelques flagrances médiatiques se terminant rapidement dans le mur. On a déjà donné!

  5. A la décharge des justiciables rappelons que la police avait (trop) carte blanche pour cogner lors des Gilets Jaunes. La reprise en main est difficile, et il est pratique pour le gouvernement – le Parquet – de se tomber sans autre examen sur quelques flics qui s’y croient un peu trop encore. Mais le problème n’est pas dans l’incarcération que le juge a le droit de décider ici; il est dans ce deux poids deux mesures, où tant de délinquants et même criminels sont mis ipso facto sous contrôle judiciaire; ce qui serait arrivé à Nahel s’il n’avait pas été tué: il n’aurait jamais vu la case prison, cet « ange » de la politique française.

    • « A la décharge des justiciables rappelons que la police avait (trop) carte blanche pour cogner lors des Gilets Jaunes.  » Ce qui prouve amplement que son rôle a été dévoyé par le pouvoir, la transformant en milice à ses ordres au détriment du service public. Ne donc pas s’étonner du dérapage, qui ne sera pas le dernier. les mauvaises habitudes se perdant beaucoup plus lentement et difficilement que les bonnes.

    • La police a tout simplement fait son job pendant les gilets jaunes.
      C’est lors des autres manifestations qu’elle a été beaucoup trop souple.
      Un casseur mérite le bâton, peu importe qui il est.
      Aujourd’hui les gens utilisent les mots « lutte » et « combat » sans savoir ce qu’ils veulent dire, alors ils pleurnichent quand ils prennent une beigne, mais une manifestation, c’est « se battre » pour ses idées et quand on se bat, on finit par saigner du nez.
      Si les gilets jaunes n’avaient pas été infiltrés par l’extrême gauche et si ils étaient restés sur les ronds-points, il y aurait eu moins de casse, moins de blessés et les taxes seraient plus basses.
      On aurait même sûrement eu le RIC et on serait débarrassés de Macron depuis longtemps.

  6. Ce n’est pas les policiers qu’il faut sanctionner mais ces « Juges Rouges » qui adorent les voyous !! Quand va t on faire élire les juges par le peuple ??

  7. Il n’ y a plus de justice contre la racaille et la drogue. L’islam a envahi la justice grâce au garde des sceaux. La majorité des Français a compris et devrait demander un référendum pour voter la peine de mort. Parce que Macron et son gouvernement sont des lâches suivi par les parlementaires.

  8. Cela fait bien longtemps que le divorce est consommé. En fait, cela fait 40 ans avec la nomination de Badinter en 1981 comme ministre de la justice que le recrutement et la formation des juges ont fait leur œuvre. Depuis cette époque la parole d’un policier est moins écoutée que celle du délinquant, les procédures ont été complexifiées pour permettre les vices de procédure et ne pas mettre les voyous en prison. Des réactions avaient eu lieu de par le passé mais passées sous silence par la presse déjà bien-pensante comme 100% des policiers du commissariat du Mans tournant le dos à Edith Cresson, alors première ministre, pendant toute son allocution.
    La réaction d’aujourd’hui exprime un ras-le-bol généralisé que les gouvernements ont glissé sous le tapis. Contrairement à ce que l’ensemble de la presse affirme, les arrêts de travail des policiers ne sont pas des arrêts de complaisance pour manifester leur grogne, c’est juste qu’habituellement ils ne s’arrêtent pas par sens du devoir.
    Donc oui, combien de salariés « ordinaires » accepteraient un salaire de misère, une inutilité grandissante de leur travail et une perte de sens totale ? Personne ! Comment continuer dans ces conditions ?…

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