L’apparition multi-périodique du Seigneur Météo est la grand-messe préférée des seniors français ainsi que de tous ceux qui peinent à trouver le sommeil en s’interrogeant sur la tenue adéquate à porter le jour d’après. Les grands devins du PAF jouissent d’une popularité n’ayant pour égale que celle des ténors de l’info en prime time.

Tout aura été essayé pour retenir le chaland. Il faut savoir fidéliser les infidèles compulsifs de la zappette pour bien monnayer les pages de réclame. Du scientifique au loufoque, de l’esthétique érotique à l’incertain plaisantin… On a même eu droit, jadis, au catogan queue de rat d’Alain Gillot-Pétré. Il en faut pour tous les goûts, pour tous les styles, pour toutes les cibles. Mais dans cet hétéroclite équipage, on peut y constater une constante universelle : la subjectivité du beau temps.

Dans un monde relativiste où tout est question de point de vue, il n’en reste pas moins que la bénédiction pour les uns est souvent une malédiction pour les autres. D’une mine compassée, les présentateurs météo s’excuseraient presque en annonçant la fraîcheur scandinave, les ciels nuageux ou l’ondée salvatrice. Quand les paysans éreintés, les vieux abandonnés, les travailleurs de force du bâtiment, les forçats du bitume en fusion, les policiers en patrouille, les routiers polonais, les avaleurs de kilomètres observent d’un œil inquiet le soleil de plomb qui s’annonce à l’horizon, les fonctionnaires en arrêt maladie, les étudiants, les sénateurs, les vacanciers, les députés européens, les intermittents du spectacle, les associatifs et autres inactifs se réjouissent et s’enduisent de graisse de phoque, de monoï au coco, d’huiles parfumées à fort indice UV comme autant de grasses volailles s’apprêtant à rôtir. Il est vrai que les touristes piaffant pour courir s’étaler sur nos plages pèsent plus dans l’Audimat™ que les quelques laborieux du labour qui survivent encore. Après tout, ces derniers n’ont qu’à aller se faire pendre… non pas ailleurs mais chez eux… tout à côté… aux poutres de la grange.

Señor météo, cuando dit qu’il fait beau… que je puisse siroter une Corona.

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20 juillet 2020 à 23:50

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