Préférence nationale : Laurent Fabius et le Conseil constitutionnel sont-ils partisans ?

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Lundi 6 mai paraissait un entretien de Laurent Fabius dans les colonnes du Monde. Se posant en gardien impartial de la Constitution, l’ancien Premier ministre socialiste y affirmait que la « préférence nationale », thème majeur du RN, serait anticonstitutionnel. Vraiment ?

Le Conseil constitutionnel avait été critiqué avec virulence, en janvier dernier, pour avoir retoqué de nombreux articles de la « loi Immigration », notamment ceux concernant la préférence nationale en matière de prestations sociales. Laurent Fabius prétend tout au long de l’entretien n’appliquer qu’une interprétation littérale de la Constitution dont il se veut le garant. « Nous prenons nos décisions en droit, affirme-t-il, et non en opportunité politique. Depuis sa création, le Conseil ne s’est jamais reconnu le même pouvoir d’appréciation que le Parlement. Ce qui me frappe dans les critiques actuelles, c’est cette confusion fréquente entre le droit et la politique. » Pourtant, le droit évolue sans cesse, précisément car il émane de décisions politiques. Qui oserait affirmer que le droit de vote des femmes n’est pas le fruit d’une décision politique du général de Gaulle ?

Dans le même entretien, Fabius affirme que « la parole est libre et le Conseil constitutionnel doit protéger cette liberté d’expression ». Vraiment ? Certains s’étonneront sans doute alors que le Conseil ne se soit pas opposé aux récentes lois la limitant. À travers les éléments de langage bien rodés de l’animal politique perce la réalité : le Conseil constitutionnel, bien loin d’être un gardien du droit, est un acteur politique et idéologique majeur, puisque doté d’un immense pouvoir. Mais alors, en cas de victoire de Marine Le Pen à la prochaine élection présidentielle, qu’adviendrait-il ? Le nouvel exécutif ne serait-il pas en butte à l'hostilité du Conseil constitutionnel ?

« Le moment schmittien »

« Le RN, si élu en 2027, s’assurerait de la bonne tenue du référendum [sur l'immigration] », nous assure Laurent Jacobelli, porte-parole du RN. L’avocat Pierre Gentillet, également interrogé par BV et auteur d’un fil, sur X, déboutant les arguments de monsieur Fabius, nous explique : « Le Conseil constitutionnel a une lecture politique du droit et des libertés. » À ses yeux, l’élection d'un ou d'une candidate RN en 2027 pourrait mener à l’un des moments politiques les plus intéressants de l’histoire de la Ve République : « Il y aurait un choc des gardiens. Le Conseil constitutionnel est garant de la Constitution, le Président doit, selon l’article V de celle-ci, veiller à son respect. Qui des deux est le gardien de la Constitution ? Ce serait un véritable "moment schmittien". » (Dans Théologie politique, Carl Schmitt écrit que « le souverain est celui qui définit l’exception ».)

Les deux lectures de l'article 11

Au cœur d'un possible combat juridico-politique, l’article 11 de la Constitution. Deux lectures s’affrontent. Stricto sensu, l’article en question ne permet aucune modification sur les questions migratoires. Là-dessus, Laurent Fabius a raison. En revanche, de Gaulle utilisa cet article en 1962 pour faire adopter le suffrage universel (qui, depuis, paraît une évidence…) alors même que la Constitution ne prévoyait pas ce cas de figure. À l’époque, Léon Noël, président du Conseil constitutionnel, considéra que ce dernier n’avait pas le pouvoir d’annuler le référendum car celui-ci constituait « l’expression de la souveraineté nationale ». Depuis le 14 mars 2001, en revanche, la jurisprudence « Hauchemaille » fourbit les armes du Conseil constitutionnel : « Dans le cas où le Conseil constitutionnel constate l’existence d’irrégularités dans le déroulement des opérations, il lui appartient d’apprécier si, eu égard à la nature et à la gravité de ces irrégularités, il y a lieu soit de maintenir lesdites opérations, soit de prononcer leur annulation totale ou partielle. »

Tout le problème réside dans le flou juridique créé : le Conseil a-t-il le contrôle sur la forme ou le fond du référendum ? Un chef de l’État, s’il engage une telle bataille face au Conseil constitutionnel, doit s’attendre à une immense pression, notamment médiatique. S’il tient et que le référendum a lieu, il le gagnera sans doute. S’il le perd, en plus de perdre la légitimité populaire, s'instaurera une nouvelle jurisprudence consacrant le pouvoir du Conseil constitutionnel.

Louis de Torcy
Louis de Torcy
Etudiant en école de journalisme

Vos commentaires

64 commentaires

  1. On connait bien le commentaire qui dit tout sur le C.C : « il a rendu plus de services que d’arrêts »

  2. Pourquoi chercher midi à quatorze heures ? Le Conseil Constitutionnel est composé de gauchistes, qui appliquent leur idéologie. Le plus simple est de le supprimer et faire des économies par la même occasion.

  3. Ce monsieur se considère au dessus du Peuple , mais pas que , au dessus du Président de la république mais pire encore au dessus des lois . Il va falloir mettre ce monsieur au rancart car il a assez contrevenu aux décisions de la majorité du peuple français, un ersatz de Stalinien en somme.

    • Il existe une petite foultitude de gens qui se considèrent comme le « gratin » au dessus du bas-peuple (il est vrai que, quand vous faites un tour au supermarché, vous pouvez effectivement vous prendre pour une  » race supérieure » et la masse qui virevolte pour un troupeau de bovins attardés..): Celui-ci en est un des pires exemple car toujours impuni, donc récidiviste..

  4. Tout ces nommés au conseil constitutionnel et au conseil d’état (les cousins germains du PNF et de l’ARCOM) tous dirigés par des socialos communistes et islamos gauchistes étant des élus déchus et mis à ces postes pour avoir la main mise sur le pouvoir politiques et désavoués par 60 à 70% du peuple de France. On ressent très nettement que l’état est sous tutelle de ces organismes partiaux et que l’assemblée nationale tout comme le sénat ne servent plus à rien.

  5. Chers commentateurs, vous oubliez qu’en France nos  » dirigeants  » politiques sortent tous de la même école avec un carnet d’adresses bien rempli. Et puis il y a papa ou maman pour trouver une place. Et puis tout ce monde doit se taper sur le ventre en regardant les français tirer le diable par la queue !

    • Eh oui: Le « carnet d’adresses », y’a que ça . Certains, bien formés/embrigadés dès l’entrée au lycée ou les premiers pas après le bac par papa ou les copains, n’ont dès le départ juré que par celà, et non par l’aventure de la vraie vie sans parachute…

  6. Voilà un monsieur qui a quelques scandales derrière lui, qui se retrouve a cette fonction on se demande pourquoi..payé grassement par le contribuable Français et qui se permet d’être contre la liberté de penser et de s’exprimer d’un grand nombre de Français qui souhaitent le rester. A quand l’état cessera de « planquer » ces anciens incompétents.

  7. Etrange, comme c’est étrange ! La Constitution, par essence, n’est-elle pas par nature, dans son tout, à préférence nationale ? A notre connaissance, aucun autre pays l’applique. Tous les droits et devoirs qu’elle exprime, certainement exhaustifs par leur généralisme, s’appliquent donc en priorité aux français. Mais nous ne sommes pas constitutionnalistes !

  8. Votre titre et l’archétype de la question rhétorique. Fabius est un coucou politicard à qui on a donné le pouvoir d’un dieu, il casse et brise en crachant sur toute forme de démocratie.

  9. La réponse est dans la question. Rien de nouveau chez ces acolytes de Mitterand qui déclarait déjà « la force injuste de la loi » !

  10. Le conseil constitutionnel, sort souvent de son rôle d’arbitre suprême, il fait une « tambouille » politique d’arrière cuisine et quand je vois qui est à sa tête: l’empoisonneur avec son sang contaminé, ça me révulse et ses complices ne valent pas mieux que lui, sans quoi ils ne l’auraient pas accepté au sein de cette institution, qui n’est qu’une mascarade, servant les pouvoir à faire passer des choses iniques, comme pour Sarko, quand il s’est « assis » sur les résultats du référendum de 2005.

  11. Qui pourrait être contre l’existence du C.C. ? Pourtant tout dépend de « qui on y met ». Les règles sont telles qu’aujourd’hui on n’y trouve que des Socialistes bon teint . Même moribond, le P.S. continue de détruire la Démocratie .

  12. Si le RN arrive au pouvoir (on peut l’espérer) un des premiers chantiers sera sans doute la réforme de la Constitution , préalable à toutes réformes de fond .

    • Absolument ! Et le nettoyage par la diète amaigrissante du fatras de lois, traités, décrets, arrêtés et codes de toutes sortes..

    • J’ajoute : leur traduction en langue française intelligible, et avec points et virgules, par tout un quidam doté du niveau certif., comme il y a deux voire un siècle: Gutenberg, au secours !

  13. Juste une bande de personnages dont certains portent un lourd passé juridique , autoproclamés censeurs de la démocratie ayant dévoyés l’esprit la constitution et qu’il faudra un jour rendre ramenés à plus de modestie .

  14. Mais qui donc détient le pouvoir et applique la volonté du peuple largement majoritaire sur un sujet pour ne citer que celui-ci comme l’immigration dans ce pays ? Le président et son gouvernement, l’assemblée nationale, les institutions Européennes, le conseil constitutionnel, les juges rouges, les syndicats, les associations, la rue, le wokisme, ou encore certains groupes de pression et la finance mondiale, j’en oublie probablement. Tout cela nous est vendu comme démocratique mais ressemble fortement à un grand bazar constitutionnel voir aux prémisses d’une dictature. Il y a des moments dans l’histoire où l’on pourrait être amené à regretter la monarchie absolue, voire certaines oligarchies russe ou arabe, car ce pays semble vouloir se saborder, paralysé et contrôlé par des forces diamétralement opposées aux intérêts de la France et surtout à son peuple.

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