Oui, la crise sera plus violente en France qu’ailleurs

crise économique

La récession du premier semestre a été, en France, plus violente qu’ailleurs ; notre PIB a chuté de 35 %, pendant les huit semaines de confinement. Cette production perdue ne sera jamais rattrapée. Selon l’INSEE, notre PIB pourrait, pour finir, s’effondrer de 14 % en 2020, ce qui serait un triste record dans le monde, seulement approché par l’Espagne et l’Italie.

En effet, on estime qu’en moyenne, la récession sera de 6 % sur la planète et entre 9 % et 11 % dans la zone euro. Pourquoi sommes-nous atteints à ce point ? D’abord, notre PIB repose beaucoup sur la consommation des ménages alors que d’autres pays, comme l’Allemagne ou la Suisse, s’appuient sur des exportations vigoureuses. On estime à 55 milliards d’euros les sommes non dépensées par les Français et provisoirement économisées. Comme la pandémie n’est pas terminée (loin de là) et que les restrictions à la vente dans les commerces persistent, le déficit de consommation va se creuser jusqu’à la fin de l’année, où il risque d’atteindre 100 milliards d’euros. Le pouvoir devra rassurer les Français et les inciter à puiser dans ce nouveau bas de laine afin de le dépenser en partie ou intégralement.

Deuxième raison qui explique notre déroute : nous sommes dépendants du tourisme. On pourra peut-être sauver le tourisme local (surtout si l’intégralité des restaurants rouvrent et se remplissent), mais il manquera à l’appel les étrangers qui ne viendront pas et ne dépenseront pas chez nous leurs précieuses devises. 2020 sera une année définitivement perdue de ce point de vue.

Troisième raison de notre naufrage : nos secteurs industriels les plus performants sont ceux qui sont le plus touchés par la récession mondiale. C’est le cas de l’aéronautique alors que le trafic aérien a plongé, que nombre de compagnies aériennes vont faire faillite et que les commandes vont se réduire comme une peau de chagrin. Un second secteur clé en crise est l’automobile, avec Renault, qui est au bord du gouffre. L’État va prêter des milliards pour sauver ce qui peut l’être.

Nous serons donc durement touchés. Il reste, néanmoins, des raisons d’espérer : le chômage partiel généralisé a coûté très cher, mais il a permis aux entreprises d’attendre des jours meilleurs sans se séparer de leur main-d'œuvre. Elles n’auront pas besoin de former de nouveaux employés lorsqu’elles redémarreront. La protection sociale, qui est l’une des plus élevées au monde, permettra de maintenir des ressources minimales pour l’immense majorité des Français. Notre situation n’a rien à voir avec celle des États-Unis, par exemple, où les chômeurs ne sont aidés que pendant une courte période. La consommation devrait donc rapidement rebondir et redonner des couleurs au PIB.

Néanmoins, les menaces persistent. La dette sera à 120 % du PIB, fin 2020, et montera encore en 2021, voire en 2022. Les faillites actuelles du Liban et de l’Argentine montrent qu’un haut niveau d’endettement est souvent mortel pour un État. On peut craindre, aussi, une reprise catastrophique de l’épidémie et un nouveau confinement qui nous achèverait. De même, l’agitation sociale et ethnique, la guerre civile menaçante peuvent faire chuter notre PIB comme l’ont fait les grèves contre les retraites et les gilets jaunes. Espérons que le pire n’est pas devant nous.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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