Macron désavoue ses ministres, l’Algérie se délecte de cette « dichotomie »

En contredisant son gouvernement, Emmanuel Macron offre à la presse algérienne une tribune pour sa propagande.
Presse algérienne Retailleau-Macron-bayrou

Emmanuel Macron est à l’honneur, dans les médias algériens, depuis sa déclaration du 28 février où il a désavoué son Premier ministre et son ministre de l’Intérieur sur les accords de 1968. Non mécontente d’observer cette « dichotomie entre une partie du gouvernement français et l’Élysée », comme le souligne El Watan dans l’édition de ce mardi 4 mars, la presse algérienne n’a pas manqué d’exploiter cet épisode qui affaiblit encore un peu plus la crédibilité de la France face à l'Algérie.

Un Président contre ses ministres

« L’accord de 1968, c’est le président de la République », a martelé, ce vendredi, Emmanuel Macron, piétinant ainsi les déclarations de François Bayrou, deux jours plus tôt. L’occasion était trop belle pour ne pas la saisir. « Macron [...] remet à leur place Retailleau et ses acolytes », écrivait L’Expression, ce 2 février, dans un article titré « L’Algérie n’a jamais été dans la provocation, Macron le reconnaît implicitement ». Lors d’un comité interministériel sur l’immigration, le Premier ministre avait annoncé vouloir durcir le ton face à Alger, menaçant de revoir les accords de 1968 si le président Tebboune ne prouvait pas, sous six semaines, son engagement à reprendre ses ressortissants. Un ultimatum balayé d’un revers de main par Macron qui, brandissant le drapeau blanc, a jugé qu’une telle remise en cause n’aurait « aucun sens », a relevé Le Figaro, avant de s’en prendre, indirectement, à la méthode de Bruno Retailleau pour faire asseoir l’autorité de la France. « On ne peut pas se parler par voie de presse, c’est ridicule, ça ne marche jamais comme cela », a lancé le chef de l’État, en allusion aux déclarations publiques du ministre de l’Intérieur après l’attentat de Mulhouse, où un Algérien sous OQTF avait pu rester en France, malgré quatorze refus de son renvoi par Alger.

La presse algérienne jubile

Content d’avoir le Président français de son côté, le journal continue : « Macron semble vouloir calmer le jeu, prenant ses distances avec les "pyromanes" de son gouvernement », comparant les propos du Président à « une prise d'otages avec deux "ravisseurs" à ses côtés », que le média se réjouit de voir « désavoués » par le chef d’État. Jugeant, dans un autre article, la « pertinence » du Président français, L’Expression pointe qu’« à travers sa déclaration, Macron corrige Retailleau et remet les pendules à l'heure ». Un point de vue partagé par TSA Algérie, qui parle également de « désaveu » et ajoute qu’il s’agissait d’une clarification de « la position officielle de la France » sur la question. « Macron recadre sèchement son gouvernement », titrait, quant à lui, Le Moudjahid, évoquant un « cafouillage » et ajoutant que « le Président Emmanuel Macron est venu mettre le holà à cette instrumentalisation éhontée ».

Non sans s’appuyer sur l’analyse de certains médias français, comme Le Huffington Post, les médias algériens n'ont pas manqué de relever les propos du chef de l'État arguant que « les choses se font bien quand elles se font avec exigence, mais il ne faut pas qu’elles fassent l’objet de jeu politique », sous-entendant que les positions de Bruno Retailleau face à l'Algérie ne relevaient que d'un projet de campagne politique en vue de 2027. Un point de vue repris par la presse algérienne pour qui la fermeté de notre ministre de l'Intérieur s'inscrit dans les « calculs [...] d’un boutiquier dont l’horizon indépassable est celui des sondages dont il scrute avidement les mouvements et les promesses politiques d’avenir ».

Même en France, l’épisode a suscité de nombreux points d’interrogation. « À quoi joue Macron ? », se demandait, ce 4 mars sur la matinale d’Europe 1, le directeur des rédactions du Figaro, Alexis Brezet. La question est légitime : alors que le bras de fer entre Paris et Alger atteint un niveau inédit, Emmanuel Macron semble offrir à la propagande antifrançaise une tribune en or. Il craint, surtout, la réaction de la diaspora algérienne, comme l'écrit Marc Baudriller dans nos colonnes. Un cadeau inattendu à une presse algérienne qui ne demandait pas mieux pour alimenter une campagne de dénigrement déjà bien rodée.

Vos commentaires

67 commentaires

  1. La technique du « good cop, bad cop » (que j’ai souvent moi-même utilisé ) me parait, sur ce sujet, intéressante.

  2. Ce président n’aime ni la France ni les Français. Il essaie de se trouver un siège au niveau de l’Europe.
    Il n’est plus crédible vis a vis de nous électeurs. Il joue les gros bras avant d’aller voir Trump et se dégonfle devant lui et il fait pareil avec l’Algérie.
    Peut-être qu’il a peur des algériens de France mais il devrait avoir plus de craintes des français.
    Nous ne voulons plus de ces accords avec l’Algérie qui n’avaient pour but que d’aider au départ la population pieds noires.
    Nous voulons la suppressions des visas pour certains algériens , le retour des OQTF. Plus d’aides pour l’Algerie . Transférons ces aides pour nos agriculteurs, nos hôpitaux….
    Nous voulons le départ de Macron tout simplement.

  3. La prérogative du président sur la politique extérieure n’est qu’un convention . Elle n’est pas gravée dans le marbre (???) de la constitution . C’est au gouvernement de gouverner .

  4. c était , et sans en etre content , je l avais prévu le role assigné a retailleau…. faire des moulinets et des propositions qui n auraient aucune suite et ensuite de prendre a témoin les gogos de droite en disant  » voyez comme j avais de bonnes idées mais je n ai pas pu les mettre en pratique  »
    évidement puisqu il a accepté de faire parti d un gouvernement qui n a pas la moindre intention de faire quoique ce soit….( après avoir assuré qu il ne pourrait pas etre le ministre de macron)
    il reprend le role confié auparavant a charles pasqua…..
    seul une personne particulièrement naive et crédule pour ne pas dire autre chose peut croire un seul instant a la sincérité du personnage….

  5. Macron ne nous aura rien épargné !
    Après Hollande je pensais que nous avions atteint le fond, mais c’était sans compter sur cet inqualifiable ex-ministre socialiste.
    S’il réussit son coup de prendre la tête de l’Europe qu’il cajole depuis toujours ce sera une catastrophe !

  6.  »Concernant les actes accomplis par le Président dans le cadre de sa fonction, la révision de 2007 confirme le principe de l’irresponsabilité du chef de l’État. Aucune action ne peut être engagée contre lui pour des actes accomplis en sa qualité de Président, même après la fin de son mandat. Cette immunité est valable à la fois dans les domaines pénal, civil et administratif. Elle vise à protéger la fonction présidentielle et non son titulaire, selon le rapport de la commission Avril. »

  7. CLO
    Quand Mr MACRON parlait du COVID il parlait de guerre. Et tous les sujets, l’imigration, les retraites, les paysans, le narcotrafic n’avaient plus d’existence.
    Aujourd’hui qui pourrait l’empècher de postuler à la présidence de l’Europe : L’Algérie et l’ensemble de la communauté algérienne dont un grand nombre est en prison, les attaques au couteau, les intrusions armés dans les écoles, les trafics de drogue et le feu dans les médiatèques.
    Mais « rassurez-vous » ce soir il ne parlera que de la « guerre » pour faire oublier le reste.
    Quand une entreprise est mal gérée le conseil d’administration vire le PDG.
    Le peuple devrait pouvoir remplacer celui qui mène la France dans le mur.

  8. Pleutre on le savait, qu’il n’aime pas la France, on l’avait compris mais à ce point !? M. Retailleau devrait démissionner s’il veut garder sa crédibilité.

    • Retailleau… il est fini. Il a trop montré qu’il n’est qu’un ministre de la parole, pas du tout prêt à concrétiser son discours.

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