Je viens d’un pays qui n’existe plus, je viens d’un paradis perdu…

Georges Marchais

Sera-t-il permis de s’offrir un petit quart d’heure de nostalgie ? Même au risque de ne recevoir pour toute réponse qu’un « OK boomer ! » méprisant ? Allons-y sans peur.

J’ai connu un pays…

J’ai connu un pays où l’école primaire des filles était séparée (et voisine) de l’école primaire des garçons, où l’on chantait « Les filles à la vanille, les gars au chocolat ».

J’ai connu un pays où l’instituteur communiste (il vendait chaque dimanche matin L’Humanité Dimanche et Pif Gadget devant la boutique du boulanger) était exigeant et nous apprenait à lire, à compter, à penser, sans craindre d’être contesté. Et où le même instituteur, lors de la « classe de neige » (qui durait un mois), nous emmenait à la messe, selon le vœu de nos parents.

J’ai connu un pays où nous n’avions pas de réfrigérateur mais une glacière, avec la venue régulière du livreur de glace.

J’ai connu un pays où personne n’aurait eu l’idée de se promener dans la rue avec des baskets.

J’ai connu un pays où les policiers se trouvaient dans une petite guérite blanche au centre des carrefours et y réglaient la circulation avec un bâton blanc.

J’ai connu un pays où ni nous ni nos voisins n’avaient de voiture, et où nous partions en vacances en train, puis en taxi (voire à pied).

J’ai connu un pays où l’on pouvait laisser de longues heures son vélo dans un village, sans antivol et sans crainte de se le voir dérober.

J’ai connu un pays où, pour téléphoner, on actionnait un levier qui avertissait une opératrice à qui l’on dictait le numéro de téléphone souhaité.

J’ai connu un pays où n’existait qu’une seule chaîne de télévision (ce qui n’avait d’ailleurs pas d’importance, puisque chez nous, il n’y avait pas la télévision).

J’ai connu un pays où un garçon pouvait rêver de devenir pilote de chasse sans être accusé d’être un pollueur et un destructeur de la planète.

J’ai connu un pays où l’on savait qu’un voisin de notre rue était mort, car la porte de l’immeuble où il résidait était ornée de décorations funèbres.

J’ai connu un pays où l’on pouvait recevoir chaque mois un salaire par chèque sans avoir de compte bancaire.

J’ai connu un pays où il n’y avait pas de limitation de vitesse sur les autoroutes ni d’obligation de la ceinture de sécurité.

J’ai connu un pays où il y avait des wagons de 1re classe dans le métro.

J’ai connu un pays où tout le monde fumait, dans la cour du lycée, dans les émissions télévisées, dans les avions, dans les trains, dans les autobus, partout.

J’ai connu un pays où le Parti communiste collait des affiches « Fabriquons français », « Avec Marchais, produisons français ! » ; où le maire communiste de Vitry-sur-Seine attaquait un foyer d’immigrés maliens à coup de bulldozer pour protester contre l’excès d’immigration.

Tout n’était pas rose ni parfait, dans ce pays disparu. Et pourtant, comme le chantait le grand Brassens, « passant par là quelque vingt ans plus tard, il a le sentiment qu’il le regrette » (« La Princesse et le Croque-notes »).

 

Alexandre Dumaine
Alexandre Dumaine
Journaliste, écrivain

Vos commentaires

55 commentaires

  1. Je me souviens avoir passé mon certificat d’études primaires en ….1968.
    Mon »instituteur »était encore de ceux qui préféraient enseigner et instruire ses élèves que de les endoctriner.
    Mon père m’a félicité,donné une pièce et m’a assuré que la France était fichue….

  2. Bien sur nous les boomers partageons cette nostalgie..Mais au nom du réalisme qui persiste depuis toujours ( Héraclite, philosophe de l’antiquité grecque disait déjà « on ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve » càd : tout se transforme)
    il importe de « positiver » (en langage actuel) càd savoir reconnaitre les acquis des progrès scientfiques au cours des siècles, et….utiliser notre courage pour faire éclore son corollaire indispensable à l’espoir : le PROGRES MORAL.
    Haut les coeurs !!

  3. Un monde où il n’y avait pas besoin de prendre rendez-vous : chez le médecin, le spécialiste, et même le coiffeur! Améli n’existait pas et l’on ne s’en portait pas plus mal.
    Le chanteur de rue passait deux fois par semaine et le facteur deux fois par jour sans motocyclette ou automobile. Pas d’associations de ci de ça. Tous les gens du quartier se connaissaient et le soir les bancs de la place étaient pleins.

  4. Apothéose d’un Paradis perdu !
    Pour comprendre ce texte, il faut avoir vécu une époque où la Liberté était, encore, pleine et entière… J’en suis !
    Mais essayer de la raconter est souvent peine perdue…

  5. Il m’arrive souvent, après le repas, de boire mon café dans un verre. Votre article, Monsieur Dumaine, me fait réaliser que c’est tout simplement un clin d’œil à mes grand-parents, qui d’ailleurs, comme souvent à cette époque, retournaient leur assiette pour manger le fromage.
    Économie de vaisselle, économie d’eau.

  6. Je me souviens que dans la cour d’école devenue mixte, des galopins m’avaient ligotée à un arbre. Je n’en revendique aucun traumatisme. De nos jours, ce serait une autre histoire.

    Je me souviens aussi du filet d’eau froide que ma mère laissait couler sur le beurre, des appels du vitrier dans la rue, des chanteurs de rue auxquels, depuis la fenêtre, nous lancions une pièce enveloppée dans du journal, les sabots des chevaux sur les pavés.
    Ensuite, tout a été trop vite. La machine s’est emballée

  7. Notre pays, à cette époque n’ était pas aux mains des envahisseurs islamiques ni des traîtres à la Patrie qui les soutiennent !! Notre pays était patriote et il ne l’ est plus loin de là !!!

  8. Et moi ,j’ai connu un pays où des peintres ou des maçons perchés sur leur échafaudage sifflaient les jeunes femmes qui passaient sous leurs pieds sans se retrouver devant un juge parce qu’elles aimaient bien ça quand même.

  9. Je souscris pleinement et à 75 ballets , je me retrouve dans ce monde que je n’aime pas du tout et encore moins celui qu’on nous prépare .

  10. J’ai connu aussi ce pays et je suis retourné dans mon village … dont je n’ai reconnu que l’église … Pour le reste, c’est un pays non seulement perdu mais oublié.

  11. A son époque il était contre l’immigration qui prenait le travail des Français il aimait la France .
    Je ne suis pas du tout communiste pour dire ça ,je suis vieux et je me souvient de ses paroles .

  12. C’est de mon pays que vous parlez Monsieur et je le regrette autant que vous .

  13. Heureusement, dans cette époque difficile, il y avait des gens formidables qui nous ont vraiment aidés et nous ont permis de voir, d’entrevoir, les choses qui sont décrites ici. La grande différence, c’est qu’en dépit des difficultés, nous avions l’espoir de faire notre place dans cette France, quand aujourd’hui nous sommes obligés de voir Zemmour comme l’ultime recours de vivre dans la France dans la quelle nous avions fini par faire notre place et nos enfants.

  14. A l’époque,nos élites ne cherchaient pas à se distinguer en mâchouillant de l’anglais pour devenir valets de pieds des States, elles étaient fières de notre pays. Désormais la France diluée dans l’UE n’est plus qu’une Little America dont elle ne copie que le médiocre.

  15. Attention danger ! La nostalgie de sa jeunesse n’a rien de condamnable mais cela ne fait pas une pensée politique et ça n’a rien à voir avec le temps long historique. Dans le temps béni par l’auteur de ces lignes, les accidents de la route faisaient 30 000 morts par an, et ma famille moi après avoir connu les atrocités du FLN vivions un retour en Métropole difficile, douloureux, incertain et laborieux pendant que les promoteurs immobiliers s’en mettaient plein les poches.

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