Un peu d’économie simplifiée pendant les vacances (pour qui en prend) (2)

Or, la tradition aristotélicienne est hostile à la finance et favorable aux activités de production, ce qui trouvera écho chez Maurice Allais et Joseph Stiglitz (deux Nobel d'économie) et chez leur prédécesseur, Friedrich List, économiste allemand (1789-1846), qui démontre magistralement l'évidence suivante :

Les causes de la richesse sont tout autre chose que la richesse elle-même. Un individu peut posséder de la richesse, c’est-à-dire des valeurs échangeables ; mais s’il n’est pas capable de produire plus de valeurs qu’il n’en consomme, il s’appauvrira. Un individu peut être pauvre, mais, s’il est en état de produire au-delà de sa consommation, il deviendra riche.
Le pouvoir de créer des richesses est donc infiniment plus important que la richesse elle-même ; il garantit non seulement la possession et l’accroissement du bien déjà acquis, mais encore le rétablissement de celui qu’on a perdu. S’il en est ainsi des simples particuliers, c’est plus vrai encore des nations, qui ne peuvent pas vivre de rentes.

(Le Système national d’économie politique, ouvrage majeur publié en 1841 ; Gallimard, 1998). List dénomme cette idée comme celle des "forces productives".

Alors, que faire ? Et comment ?

D'après List, les entreprises nationales ne peuvent pas se développer si le marché est déjà occupé ou envahi par les produits moins chers d'entreprises étrangères. Son « protectionnisme éducateur » a pour objectif de "protéger sur le moyen terme le marché national afin de permettre sur le long terme un libre-échange qui ne soit pas à sens unique". Sa théorie concerne ainsi particulièrement les pays en voie de développement. Ou en voie de sous-développement comme la France ?

Tant que les politiciens, marionnettes ou robots fabriqués par le système ne seront pas capables de tirer les conséquences des évidences qui précèdent, et persisteront à prétendre donner des solutions budgétaires et fiscales à un mal économique, la France se dirigera aveuglément vers une explosion multidimensionnelle. Rien ne réussira sans un minimum de défense de l’intérêt national (tous les pays le font).

Et l'Allemagne, objectera-t-on ? D'abord, elle ne va pas si bien socialement. Ensuite, elle a été plus avisée lors du passage à l'euro en choisissant une parité mark/euro plus adaptée que celle du franc (6,559 57), artificiellement fort pendant les dix ans précédents ; ce qui détruit petit à petit notre tissu économique pris au piège ; elle avait aussi adopté les lois Hartz (1 à 3) sur le chômage, et la TVA sociale que Jean-Louis Borloo, éphémère ministre de l'Économie, avait été incapable d'expliquer lors de son face-à-face pathétique avec Laurent Fabius.

Son potentiel industriel, ses choix agricoles, énergétiques, diplomatiques, militaires ne sont pas les mêmes que ceux de la France. Faut-il pour autant essayer de la singer ? Ou simplement et légitimement défendre notre économie et nos valeurs ? Doit-on obligatoirement suivre le chemin de croix des Grecs, et vivre comme des Allemands ou des Chinois ? Ou bien, par l'effet de notre refus de soumission, renverser le paradigme et les inviter à vivre comme nous jadis, dès lors qu'ils pourront moins facilement exporter vers la France ? Et si les philosophies de l'économie et de la vie l'emportaient sur cet emballement fou de ce monde où nous ne vivrons qu'une fois ?

Henri Temple
Henri Temple
Essayiste, chroniqueur, ex-Professeur de droit économique, expert international

Pour ne rien rater

Revivez le Grand oral des candidats de droite

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois