Belle France
Le temps du périple estival est achevé : fin des petits sauts d’une puce qui ne souhaiterait pas battre des records de longueur, mais juste aller d’un endroit intéressant à l’autre, tout proche, pour le seul plaisir de contempler, d’écouter, de toucher et de humer. Se faire migrant dans son propre pays pour quelques jours, ne pas dormir deux nuits au même endroit car d’autres belles sensations nous attendent ailleurs et d’autres personnes seront rencontrées à la croisée des chemins.
Il y a le pèlerin et le touriste : tous deux bougent, pas pour les mêmes raisons, pas toujours à la même vitesse. Le sens spirituel que donne le pèlerin à sa marche ne le rend pas insensible à la beauté, il sait à qui l’attribuer : à Dieu qui a sculpté les paysages et inspiré les jardiniers et les bâtisseurs. Ses pas deviennent aussi une action de grâce pour ce que voient ses yeux.
L’estivant croise parfois le pèlerin. S’il lui reste un brin de foi, ou seulement de la culture, il se hasardera à un « Priez pour nous à Compostelle ». Ou il ne saura pas le distinguer du randonneur ordinaire, ce simple touriste non motorisé. Dans sa quête, il ne cherche que le beau, et s’il trouve le vrai et le bien, c’est un peu par inadvertance.
Contempler, admirer, découvrir : la France est belle ! Elle est splendide de ses paysages, de ses villages, de ses villes, de leurs rues et places où se dressent églises, campaniles, beffrois, châteaux, abbayes, cloîtres, maisons, hôtels, halles, fortifications, et elle est riche de toutes les merveilles que l’on y trouve parfois, léguées par ceux qui nous ont précédés. Elle est un jardin rempli de mille trésors cachés ou connus et qui ne demandent qu’à s’offrir à ceux qui prennent le temps d’y musarder, de se confronter un peu à nos racines.
Le temps, voilà la clef : il faut, bien sûr, se garder d’une boulimie de zappeur qui voudrait tout voir et condamne à l’esclavage d’un minutage serré. Mieux vaut accepter le risque de louper tel site, telle église, tel village. Et peut-être tresser à Édouard Philippe des lauriers pour avoir réduit la vitesse maximale autorisée à 80 km/h et, ainsi, permis de mieux profiter des belles routes empruntées lors des pérégrinations estivales. La lenteur est sans doute une vertu.
Un tweet citait Jacques Julliard, à la fois juste et injuste quand, dans L'Année des fantômes, il écrivait :
"Et toujours la même question, qui reste pour moi sans réponse globale : pourquoi le passé, avec si peu de moyens, a-t-il fait tant de beauté, quand notre époque, avec tant de richesse, n'a produit que de la laideur ?"
Peut-être qu’aujourd’hui, nous sommes trop anesthésiés pour fustiger la laideur des abords de villes où hangars et commerces se succèdent le long des faubourgs. Il faudrait ne jamais se résigner à tant de défigurations sous prétexte que ce serait économique et fonctionnel. Mais la condamnation à l’emporte-pièce de notre époque nie qu’elle produise elle aussi ses (trop rares) chefs-d’œuvre. De même que le pont du Gard ou le pont Valentré, le viaduc de Millau est beau et il relie les hommes entre eux !
Bonne rentrée à tous.
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