[Point de vue] Immigration et délinquance : à quoi joue Nicolas Sarkozy ?

Une telle sincérité est bien tardive...
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Il y a déjà douze ans, Nicolas Sarkozy était éliminé face à François Hollande, dont l’anaphore « Moi Président » avait, à ce qu’il semblait, rappelé aux électeurs les temps les plus glorieux de l’éloquence cornélienne et de l’ethos gréco-latin. Sarkozy, lui, c’était le « Casse-toi, pauvre con », le bling-bling, Disneyland et « Avec Carla, c’est du sérieux », « Quelle indignité, Monsieur Pujadas » ; bref, un comportement dont on jugeait qu’il abaissait la fonction présidentielle. On connaît la suite : une fois remplumé, François Hollande redevint ce qu’il avait toujours été, c’est-à-dire quelqu’un dont le charisme et le sens de la grandeur n’avaient que peu à voir avec l’éloquence d’airain dont il avait fait preuve.

Sarkozy, au fil des années, devint comme tant de mauvais patrons, que l’on ne commence à regretter qu’en rencontrant leur successeur. Hollande était tellement nul qu’il renonça même à faire campagne, fait inédit dans l’histoire de la Ve République. La place, dès lors, était libre pour le matraquage médiatique du « Mozart de la finance ». Les magazines le disaient normalien, pianiste émérite, supérieurement intelligent et marié à une femme de quinze ans son aînée. Tout était faux : les craquelures du vernis, en cédant, ne tardèrent pas à défigurer le portrait hagiographique du Dorian Gray de chez Rothschild.

Dix-sept ans après sa victoire, Sarkozy paraît donc, par contraste, d’une sérénité et d’une grandeur, d’une dignité pour tout dire, qui le feraient presque passer pour le maître de Santiago, dans la pièce éponyme de Montherlant. Macron l’a même désigné pour le représenter auprès du toujours impeccable empereur du Japon. C’est un sage. On l’écoute – on l’écoute et il adore ça.

Le voici donc qui livre une interview au Figaro, une « grande explication » à dominante géopolitique, ce qui ne manque pas de sel pour le fossoyeur de la Libye, donc de la sécurité de la bande sahélo-saharienne. Mais qu’on se rassure, l’oracle rend aussi son verdict sur la situation intérieure. Par exemple, il y a ceci : « Le nombre des étrangers dans nos prisons et la part qu'ils prennent dans la délinquance en général sont sans appel. » Et encore : « Nier qu’il existe un lien entre immigration et délinquance n’est rien d’autre qu’un nouveau déni de réalité. »

Une telle sincérité est bien tardive – et puis, surtout, on connaît la tactique de Sarkozy, qui se définissait pourtant lui-même, en 2007, comme un « petit Français de sang mêlé », tactique qui consiste à donner des coups de menton à droite pour faire une politique de gauche. Pas d’illusions. Demandons-nous, plutôt, quel est l’agenda caché de Nicolas Sarkozy ? Un homme politique de ce niveau ne peut pas ne pas penser à la suite. Sur Radio Classique, ce jeudi matin, Franz-Olivier Giesbert ne trouvait pas ça si bête, d’imaginer Sarkozy prendre la suite d’Ursula von der Leyen. Une présidence européenne de « droite » - formule que l’on n’utilise, nous sommes d’accord, que par convention. C’est peut-être la raison de toute cette agitation médiatique, de la part du Président qui a creusé un nouveau sous-sol dans la désacralisation de sa fonction et qui se prend, aujourd’hui, pour Cincinnatus.

Il y a, cependant, quelque chose d’encore plus inquiétant, à long terme, et vous l’avez certainement remarqué : on a beau ne rien avoir oublié de Sarkozy, on ne peut s’empêcher de convenir qu’il est cent coudées au-dessus du verbiage poético-narcissique de Macron ou des glapissements des celles-et-ceux macronistes interchangeables. Si on nous avait dit qu’on trouverait de la noblesse et de la sagesse à un discours de Sarkozy… Car le voilà, le problème : en ces temps de décadence accélérée, on en vient à trouver quelque chose de gaullien, un souffle cicéronien, à un aventurier de la banlieue ouest.

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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

70 commentaires

  1. Trop de délinquants étrangers dans nos prisons , un oxymore dans la bouche de Sarkozy ; qui a démanteler les cours de justice de première instance , les casernes militaires, les services des douanes , les police de proximité, n’est-ce pas sous votre mandature M. Sarkozy , alors SVP un peu de retenue, les jeunes ne savent pas mais les anciens n’ont pas oublié. Et je rappelle une fois encore que depuis votre fin de présidence il ne s’est pas passé un mois sans que vous arpentiez les couloirs des palais de justice .

  2. « on en vient à trouver quelque chose de gaullien, un souffle cicéronien, à un aventurier de la banlieue ouest ». Elle est de trop cette phrase pour un bonimenteur, condamné, aux nombreuses casseroles,et à l’origine du déferlement migratoire passé par la Libye, auquel par son intervention unilatérale, il en a été le principal responsable. Et son avis sur MLP est la cerise sur un gâteau faisandé.

  3. Merci Arnaud de nous avoir brillamment rappelé qui est vraiment Nicolas Sarkozy et les dommages qu’il a causés à notre camp, avec toutes ses promesses non tenues qui n’ont fait qu’indiquer nos faiblesses à la gauche… Et je pense aussi notamment à la dévastation des systèmes policier et judiciaire, au démantèlement de notre infrastructure militaire après l’erreur monstrueuse de la suspension du Service National qu’il aurait suffit de faire évoluer, et last but not least, l’infâme traité de Lisbonne. Sarkozy, c’est l’incarnation de la fausse valeur !

    • Et le « désarmement » des citoyens, même les plus exposés, avec son décret de novembre 2005, repris par son stagiaire darmanin !

  4. Si Sarko est nominé pour succéder à la fumeuse Ursula, alors il faut cesser de vitupérer DT dans sa course à la Présidence US !

  5. Nicolas Sarkozy en décembre 2008 : « l’objectif, c’est de relever le défi du métissage, ce n’est pas un choix, c’est une obligation, on ne peut pas faire autrement » Face à une telle droite (de Schwab et Soros), je n’ai plus aucune crainte de la gauche.

  6. très bonne analyse ! que fait il aujourd’hui ? la même chose qu’hier , il n’a pas cessé de lancer des pavés dans la mare des LR à chaque fois qu’un des leurs se présentait ! ce n’est pas nouveau et il n’a même pas honte, mais je crois que les LR ont bien compris ! ceci étant dit, la nature ayant horreur du vide, n’est ce pas, il n’y a plus grand monde dans la barque des LR sinon des divisions ! ce n’est pas nouveau mais  » avant  » ils tenaient par une réputation, une auréole du temps passé, ce n’est malheureusement plus le cas aujourd’hui, c’est navrant !

  7. « François Hollande redevint ce qu’il avait toujours été », un petit fonctionnaire qui n’aurait jamais dû se risquer hors de son bureau, au fond du couloir à gauche.

  8. Finalement le petit Nicolas malgré ses petits emportements et ses exploits contestables se révèle plus perspicace que des deux successeurs.

  9. Quand va t’on enfin avoir des gens compétents pour diriger le pays. Après M. Pompidou, Giscard avait du potentiel ;mais il n’a pas su l’exploiter autant qu’il eût Été souhaitable. Avec Mitterrand, ce fût le commencement de la fin… de plus en plus mauvais.

  10. Et oui mon brave monsieur ces gents là ils ce la péte sans aucun remords,le vote des Français contre UE poubelle,le fameux Karcher jamais utiliser,mon grand amis Kadafi,le pauvre il est mort,et maintenant il ce la joue sérieux j’ai toujours été comme cela,moi Sarkozy.

  11. « Quelque chose de gaullien » j’apprécie votre humour du deuxième degré monsieur Florac. Car que peut-on trouver de gaullien chez un individu qui parle comme un charretier, qui a inféodé la France aux USA en rejoignant le commandement inetégré de l’OTAN, qui a piétiné la volonté du peuple quand il s’est assis sur le référendum de 2005, qui a défrayé sans cesse la chronique judiciaire, qui avait une vision binaire de la géopolitique (cf la Lybie). Une caricature de parvenu préfigurant son successeur Macron. Tous deux persuadés d’être au-dessus du monde entier.

  12. On a l’impression que le Sarkozy de sa première campagne présidentielle est de retour. Dommage, c’est un peu tard avec ses pirouettes des dernières années et son flirt avec machiavel.

  13. Malgré toutes les qualités, généreusement étalées par la caste journalistique, les Français ne risquent pas d’oublier la trahison du personnage. Conclusion, inutile d’essayer de nous le vendre, si il n’est pas pire que celui en place, il n’est vraiment pas meilleur.

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