Delon, Souchon, Luchini et maintenant Stéphane Bern : ces stars qui quittent le cloaque parisien

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Il sera difficile d'accuser le monde du show-business et de la culture d'être d'extrême droite. À plus forte raison s'agissant de Stéphane Bern, Monsieur Patrimoine de l'Élysée, que l'on dit au mieux avec le couple présidentiel depuis qu'il a participé au dîner d'entre-deux-tours à la Coupole, en 2017. L'animateur vient de confier au Parisien, dans son édition du 13 novembre, qu'il s'en retournait en ses terres percheronnes. Stéphane Bern est en effet propriétaire d'un ancien collège militaire qu'il restaure avec passion. Il ne supporte plus la saleté et l'agressivité qui émanent de la capitale sous Anne Hidalgo.

On me dira que cet homme combien estimable, ancien lecteur du comte de Paris, jadis opposé à Jean-Michel Blanquer lors d'un débat télévisé sur le bicentenaire de la Révolution française (où il défendait le camp monarchiste face à un Blanquer déjà très jacobin - on aurait dû se méfier), n'est peut-être pas ce qui se fait de plus progressiste. L'argument serait spécieux, mais retenons-le, si vous voulez, pour les besoins de la démonstration.

Anthony Delon, avant lui, fin octobre, a partagé des photos de la ville jadis Lumière, où l'on voit des Caddie™ gisant sur la chaussée, des sacs-poubelle éventrés, des détritus partout. Il compare Paris à une porcherie et apporte son soutien au mouvement #saccageparis, dont le hashtag est désormais bien connu sur Twitter. Mais là encore, peut-être est-il suspect de complaisance avec l'extrême droite, puisque son père lui-même traîne une solide réputation de facho.

Plus tôt dans l'année, en avril, Alain Souchon avait annoncé au Figaro son intention de s'installer à la campagne, pour fuir une ville « sale et violente », encombrée de « patinettes » et en proie à l'agressivité des citadins. L'interprète doux et nostalgique de « Foule sentimentale » a-t-il ressenti « l'ultra-moderne solitude » des urbains anonymes, qu'il décrivait dans une de ses chansons ? Ou considère-t-il que la « rive gauche à Paris » est « traitée par le mépris » ? Peut-être est-il, lui aussi, une marionnette de l'ultra-droite ? N'est-ce-pas un peu suspect de chanter « l'âme fifties » ? Toute cette élégante mélancolie n'est-elle pas nauséabonde ? Ses textes n'auraient-ils pas dû nous avertir ? On se perd en conjectures.

Encore plus tôt, dès octobre 2019, Fabrice Luchini, dans un entretien accordé au JDD, déplorait l'émasculation de l'automobiliste banlieusard, « écrabouillé » psychologiquement, avant d'ironiser sur le XVIIIe arrondissement, où il vit, « d'une saleté sublime, comme une ville du Moyen-Orient ». Encore un facho, alors ?


Non, décidément, qu'ils s'en aillent, tous ces artistes nazis, qui aiment la beauté, la grandeur, la propreté, les avenues rectilignes, mais aussi les petites impasses arborées, les bancs faits pour s'embrasser et les décors à la Modiano ! Qu'ils fuient le paradis parisien, ces hygiénistes qui ne supportent pas les travaux permanents, les trottinettes abandonnées sur la chaussée (en free-floating, comme on dit), les entrailles carrelées du métro bondé, les ordures partout et la politesse nulle part ! On sera mieux sans eux, à jouer au ballon dans les jardins d'Éole, au milieu des crackeux, à s'insulter dans les bouchons, à marcher parmi les canettes et les papiers gras. On sera tranquille sans la contestation réactionnaire de tous ces salauds. Si les stars ne sont pas contentes, on en trouvera d'autres.

Paris devient une drôle de ville. Le luxe bobo, bio et décarboné y côtoie la misère, la violence et la crasse. Les rats (chose vue) ne s'enfuient pas des trottoirs à l'approche des passants. Ils sont ici chez eux. Ce sont eux, les nouvelles stars. Il faudra s'y faire. Les électeurs d'Anne Hidalgo, eux, s'en accommodent très bien. Le tiers-monde, comme le désert, gagne sur la civilisation si l'on n'y prend pas garde.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

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