Vers un nouveau Watergate : le point sur l’affaire Trump et les « ingérences russes » ?

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Ce mardi, avec la comparution en justice de Michael Flynn, un temps conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, l’étau judiciaire se resserre autour du président américain. Au fait, qu’en est-il véritablement de ce feuilleton judiciaire ?

L’accusation, pour commencer. Il y aurait eu des « interférences russes » dans la campagne présidentielle opposant Hillary Clinton à l’actuel locataire de la Maison-Blanche. De quelle nature seraient les « interférences » en question ? Tout d’abord, la divulgation de mails plus ou moins privés de Hillary Clinton, déjà révélés depuis longtemps par WikiLeaks. Puis, le piratage informatique du Parti démocrate par des hackers dont il est dit qu’ils travaillaient sur ordre de Moscou. Et, pour finir, quelques rencontres entre officiels russes, issus des sphères politiques et économiques, et des membres de l’équipe de campagne de Donald Trump.

Les suites judiciaires ? Dix-sept personnes ont été mises en examen, dont treize citoyens russes qui ne comptent pas vraiment, sachant qu’on ne saurait les accuser d’intelligence avec l’ennemi, puisque les ennemis, ce sont eux. Restent quatre Américains.

Paul Manafort, directeur de campagne de Donald Trump, accusé de « conspiration contre les États‐Unis », ce qui est bien vague. Les autres griefs relèvent de la fraude fiscale et du blanchiment d’argent. En revanche, il lui est reproché d’avoir menti à la Justice.

Richard Gates, vice‐directeur de campagne de Donald Trump, poursuivi pour les mêmes motifs.

George Papadopoulos, conseiller en politique étrangère de Donald Trump, ne doit répondre que de l’accusation de « mensonge », au même titre que le Michael Flynn plus haut évoqué.

Comme on dit, c’est court. Très court. Quant à l’accusation de « conspiration contre les États-Unis », elle ne tient guère la route, sachant que si elle était avérée, on aurait tôt vu Donald Trump dérouler le tapis rouge devant Vladimir Poutine, ce qui est loin d’être le cas. Et ces fameuses "interférences" ? Elles prêtent tout autant à sourire : Hillary Clinton n’avait pas besoin des sombres manigances du FSB (le successeur du KGB) pour perdre ce scrutin : la détestation de l’Amérique profonde à son endroit suffisait largement, tandis que son mépris affiché à l’égard de cette dernière, des "gens déplorables", affirmait-elle, fut une sorte de dernier clou planté dans son cercueil électoral.

Les liens de l’état-major trumpesque vis-à-vis de décideurs moscovites ? Rien que de très normal en temps de campagne présidentielle : on prend des contacts, on tâte le terrain ; plutôt que d’insulter l’avenir, on le prépare. Tous les candidats à la magistrature suprême le savent, là-bas, ici comme ailleurs, qu’ils soient ou non issus de grandes formations politiques.

Quitte à enfoncer les portes ouvertes, on ajoutera qu’en matière « d’interférences » électorales, les USA ne sont pas les mieux placés pour faire la leçon, eux qui, depuis deux siècles, assurent pluie et beau temps démocratiques en leur arrière-cour latino-américaine, tout en ne négligeant pas de pousser leurs pions en Europe, occidentale et septentrionale, en Orient, du Maghreb jusqu’en Afghanistan. Qu’ils puissent s’offusquer que, pour une fois, leur soit rendue la monnaie de leur pièce, c’est un peu comme si la Cicciolina, s’offusquait qu’on puisse la siffler dans la rue alors que, c’est bien connu, elle a fait carrière en dirigeant des écoles de maintien pour jeunes filles à marier.

Mais le plus grave, et qui peut coûter très cher aux prévenus, demeure le mensonge sous serment. Richard Nixon en sait quelque chose, ayant été poussé à la démission après l’affaire du Watergate. Bill Clinton n’est pas passé loin non plus, pour avoir lui aussi un peu oublié de dire la vérité. Ce n’est pas pour rien que nous sommes en terre protestante.

Plus croquignolet encore, le magistrat chargé de statuer sur le sort de Donald Trump et de ses proches n’est autre que Robert Mueller, inamovible patron du FBI des années durant, égalant presque le record de longévité de l’un de ses illustres prédécesseurs, Edgar Hoover, qui, en matière de mensonges d’État, en connaissait plus qu’un rayon.

L’hypocrisie, l’autre petit nom de la tyrannie de la transparence ? Il semblerait.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:47.
Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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