Visiblement, la conférence d’Éric Zemmour, le 30 janvier dernier, au siège des Républicains, n’a pas fait plaisir à tout le monde dans le parti présidé par Laurent Wauquiez. Notamment à Valérie Pécresse, qui est aux LR sans y être ou - c’est selon - qui n’y est pas tout en y étant. Car, en effet, la présidente de la région Île-de-France est aussi présidente de son petit parti : Libres !

Jeudi soir, à l’occasion des vœux de son mouvement, elle a prononcé un discours à la fin duquel elle a évoqué le chroniqueur. "Sachez-le, notre France ne sera jamais celle d’Éric Zemmour et des déclinistes, nostalgiques d’une société patriarcale qui n’est plus, et persuadés que c’était mieux hier et que ce sera pire demain." Il est probable que cette pique visait moins l’auteur du Déclin français que Laurent Wauquiez, qui a eu l’outrecuidance d'inviter le journaliste rue de Vaugirard. Cela en dit long, en tout cas, sur l’unité idéologique de ce parti qui, selon un sondage OpinionWay/Tilder du 1er février pour Les Échos, est crédité de 12 % d’intentions de vote pour les élections européennes, quand le Rassemblement national est à 22 % et La République en marche à 20 %. N’est-ce pas, du reste, la caractéristique des groupuscules ou formations politiques en voie de « groupusculisation » : plus c’est petit, plus les chapelles se multiplient.

Mais, plus encore, ne doit-on pas voir dans cette attaque en caponnière une grande confusion intellectuelle, consciemment ou inconsciemment entretenue, entre la maladie et le diagnostic ? On peut reprocher à Éric Zemmour son absence d’espérance dans ses écrits, mais son analyse clinique des maux qui frappent notre pays depuis des décennies ne repose-t-elle pas sur quelques faits tangibles ? Pour ne prendre que la question migratoire : les étrangers, qui arrivaient en France, autrefois, d’Italie ou de Pologne, s’assimilaient-ils en moins d’une génération ? Oui ou non ? Les étrangers qui arrivent en France, aujourd’hui, d’Afrique subsaharienne, s’assimilent-ils avec la même rapidité. Oui ou non ? Visiblement, les choses ne sont pas très évidentes, puisqu’on a renoncé à l’ambitieuse assimilation pour se contenter de l’intégration. Et qui est loin d’être gagnée ! Alors, effectivement, c'était peut-être mieux hier.

En fait, Valérie Pécresse adore enfiler des perles de lieux communs dans son boudoir confortable de dame patronnesse bien élevée. C'est ainsi, avec une confusion intellectuelle qui peut friser la malhonnêteté intellectuelle, qu’elle n'hésite pas à déclarer, toujours dans ce même discours, que "Mélenchon, Le Pen, Dupont-Aignan", c’est "le même visage d’une France en faillite, d’institutions républicaines déstabilisées…" Malhonnêteté ou facilité intellectuelle qui consiste à mettre dans le même sac, d’une part Le Pen et Dupont-Aignan, d’autre part Mélenchon, histoire de rendre définitivement infréquentables les deux premiers aux yeux d’une bourgeoisie conformiste qu'elle sait charmer de ses yeux de biche. Malhonnêteté intellectuelle, enfin, si l’on admet un fait historique : ni Dupont-Aignan ni Le Pen n’ont jamais été au pouvoir et n’ont donc leur part de responsabilité dans cette "France en faillite". Mme Pécresse fut ministre.

Mais madame Pécresse fait partie de ces responsables politiques modernes, fiers de leur passé (tout en ayant la mémoire courte) et résolument tournés vers l’avenir, comme on dit quand on ne sait plus quoi dire dans un discours. Par exemple, en novembre 2012, elle voulait transformer le mariage pour tous en union civile. Pourquoi pas. En septembre 2017, elle déclarait : "Nous ne reviendrons pas sur la loi Taubira, tournons la page." On peut même fermer le livre et le jeter au feu.

Un twitto n’a pu s’empêcher de réagir aux propos de Valérie Pécresse sur sa France qui ne sera jamais celle de Zemmour : "Bien parlé, madame Autain !" Franchement, c’est profondément injuste vis-à-vis de Clémentine Autain. L'Insoumise a des convictions.

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08 février 2019 à 17:43

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