Un ministre algérien traite la France d’« ennemi traditionnel » : Macron ne bronche pas

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Tandis qu'Emmanuel Macron fait copaincopain avec son homologue Abdelmadjid Tebboune, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale algérien, El Hachemi Djaâboub, a qualifié la France d'« ennemi traditionnel et éternel ». Cette gentillesse, envoyée alors que Jean Castex et trois autres ministres devaient se rendre en Algérie dimanche, a, sans doute, influé sur la décision d'annuler cette visite. Mais elle traduit aussi le double jeu des dirigeants algériens, qui présentent la France comme un repoussoir pour occulter leurs carences dans la gestion de leur pays.

Matignon annonce, dans un communiqué, que cette rencontre, programmée pour soutenir la coopération bilatérale, est « reportée à une date ultérieure ». Non pour protester contre le propos du ministre algérien mais, selon le communiqué officiel, pour tenir compte du « contexte sanitaire » et d'un commun accord. Des médias algériens, comme la chaîne privée Ennabar, semblent plus proches de la vérité quand il précisent que « la visite a été reportée à la demande de la partie algérienne, en raison de ses réserves sur la délégation qui ne correspond pas à l'importance de l'événement ».

Si l'on comprend bien, ce ne serait pas l'Algérie qui aurait offensé la France mais la France qui aurait offensé l'Algérie. Certes, le nombre de ministres français, initialement fixé à huit, s'est progressivement rétréci comme peau de chagrin : finalement, seuls Le Drian et Le Maire devaient accompagner le Premier ministre. Les dirigeants algériens sont peut-être susceptibles, mais ils usent de cette susceptibilité pour exiger toujours davantage.

Pourtant, Macron en tête, nos dirigeants ont déjà donné beaucoup de gages pour tenter d'obtenir les bonnes grâces de l'Algérie : qualifier la colonisation de « crime contre l'humanité » constitue le summum de l'indécence, mais on pourrait y ajouter les hommages rendus à des complices du FLN, l'opprobre lancé contre l'armée française ou encore le rapport de Benjamin Stora, se comportant plus en militant qu'en historien, qui fait la part belle à l'Algérie.

Ils continuent de croire que la repentance est une vertu alors qu'elle incite l'Algérie à redoubler ses exigences. Leur pusillanimité devant cette affront est une nouvelle forme de renoncement. Sans compter que la victimisation alimente la haine d'une partie de la population d'origine immigrée qui y voit une bonne raison de ne pas s'intégrer et de rejeter toute assimilation. On lui a mis dans l'esprit qu'elle avait été exploitée par les colonisateurs : c'est à son tour de les coloniser.

Sans doute existe-t-il, parmi les dirigeants algériens, des personnes prêtes à coopérer avec la France, de manière constructive et dans l'intérêt des deux pays. Mais la plupart d'entre eux ne pensent qu'à conserver le pouvoir tout en tirant, sans contreparties, le maximum de profit de la France. Il est temps que le gouvernement soutienne, s'il y en a, les partisans d'une coopération sincère et rompe avec la mauvaise habitude de se soumettre.

La France a apporté à l'Algérie un développement économique et social qu'elle n'aurait sans doute jamais connu sans elle et que ses dirigeants ont dilapidé. C'est peut-être cette vérité que le gouvernement algérien a le plus de mal à digérer. Mais le plus coupable, c'est Macron, parce qu'il la méconnaît et, ce faisant, trahit l'Histoire de la France.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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