Stages de citoyenneté : l’envers du décor

Vous vous demandez ce qu’il se passe lors de ces « stages » dédiés aux délinquants ? BV vous répond.
Capture écran TF1
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C’est l’arme anti-sauvageon par excellence. Depuis son introduction dans le droit français en 2004, le stage de citoyenneté est devenu une mesure pénale alternative à l’emprisonnement très prisée par nos magistrats. Plusieurs milliers sont prononcés chaque année, souvent dans des affaires d'atteinte à l'autorité et de dégradations de biens publics. Ces derniers jours, on en a beaucoup entendu parler, lors des comparutions immédiates des « jeunes » qui ont participé aux émeutes parisiennes du 31 mai. Entre autres exemples, Alvyn M. (jets de cailloux sur les policiers), Jonas D.S. (pillage d’une boutique) ainsi qu’Ali A. (jet d’une grenade lacrymogène sur les policiers) ont vu leurs condamnations agrémentées d’un tel stage. Idem pour Ali B., un Algérien ayant participé à un regroupement visant à commettre des violences contre les forces de l’ordre. Offrir un stage de « citoyenneté » à un étranger qui, par définition, n’est pas un citoyen et qui, de toute évidence, ne souhaite pas le devenir, il fallait y penser.

Promulgué par le gouvernement Raffarin, ce stage a officiellement pour objet de rappeler au délinquant « les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité humaine sur lesquelles est fondée la société ». Il peut être envisagé comme une peine, un aménagement de peine ou une mesure alternative aux poursuites. En clair, il s’agit d’une mesure bien utile lorsque les établissements pénitentiaires affichent déjà complet.

La journée type d’un « stage de citoyenneté »

Comment se déroulent concrètement ces fameux stages ? Selon la circulaire du 11 avril 2005, leur mise en œuvre se fait dans des conditions assez similaires à ce qui est prévu pour les stages de sensibilisation à la sécurité routière. Leur durée doit ainsi prendre en compte, pour le condamné majeur, ses obligations familiales, sociales ou professionnelles, et, pour le condamné mineur, ses obligations scolaires. Dans tous les cas, elle ne peut excéder un mois.

Ce stage est organisé en sessions collectives. L’effectif maximal de stagiaires est de huit afin d’assurer la meilleure efficacité du stage. Le public concerné est prioritairement constitué de primo-délinquants ayant commis, par exemple, des infractions d’outrage ou de dégradation légère.

Le contenu du stage fait l'objet d'un projet élaboré par la personne ou le service chargé de procéder au contrôle de sa mise en œuvre, sous la supervision du procureur de la République. Concrètement, chaque journée du stage dure généralement entre quatre et six heures. Deux à trois activités sont programmées chaque demi-journée : accueil et présentation du stage, rappel de la loi par un magistrat, visite d’un musée, rencontre avec le personnel de transports en commun, diffusion d’un film, rencontre avec une association… De quoi remettre dans le droit chemin des individus ultra-violents et dépourvus de toute empathie ?

L’envers du décor

Sur le papier, le stage de citoyenneté est censé être une peine venant sanctionner un délit, une mesure destinée à rappeler les devoirs de tout citoyen. C’est, hélas, souvent loin d’être le cas.

On nous assure, par exemple, que ce stage est aux frais du justiciable, « excepté pour les mineurs ». Dans les faits, il en est autrement. C’est en réalité la juridiction qui décide si le stage de citoyenneté doit être effectué aux frais du condamné. En cas de ressources insuffisantes, l’intéressé sera en effet dispensé par le procureur de financer son propre stage.

Surtout, les discours qui y sont tenus et les enseignements qui y sont donnés ont parfois de quoi faire dresser les cheveux sur la tête. En 2018, le ministère de la Justice lui-même avait levé le voile sur l’idéologie délétère qui se trouve parfois diffusée lors des stages dits « de citoyenneté ». Une vidéo sidérante encore disponible sur YouTube montrait ainsi un groupe de jeunes gens, majoritairement issus de l’immigration, en train de visionner un documentaire réalisé par l’historien décolonial Pascal Blanchard revenant sur les « origines de ces stéréotypes, de ces images et ces clichés qui ont fondé des pratiques discriminantes » à travers l'histoire de Paris… Convaincre des délinquants qu’ils sont les victimes d’un pays raciste, quelle riche idée !

En réalité, l’inversion des rôles et la victimisation des malfaiteurs semblent être devenues la raison d’être de ces stages. C’est manifestement le cas à Carpentras, où un tout premier stage de citoyenneté a été organisé fin 2024. Comme le rapportait alors France Bleu, l’objectif déclaré n’était pas de réprimer les instincts les plus sauvages des délinquants mais de restaurer leur « confiance en la justice ». Leur donner une nouvelle occasion de s’exprimer et de faire entendre leur version des faits. « Ça change pas mal les choses parce qu'on a enfin un dialogue, expliquait alors un jeune homme condamné pour violences. Là, on a pu s'expliquer. Il y a un ancien magistrat qui était dans le stage : au début, il raisonnait comme un magistrat et notre opinion était renvoyée dans les cordes. À la fin, il a presque changé son fusil d'épaule. » En clair, le délinquant a réussi à se poser en victime et les représentants de l’État lui ont donné raison. « Ça ne changera rien à ma condamnation, mais c'est plutôt pour ceux qui sont dans les bureaux qu'il faut continuer à faire des journées comme ça », concluait le délinquant. Pas sûr que sa victime soit du même avis.

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Jean Kast
Journaliste indépendant, culture et société

Vos commentaires

51 commentaires

  1. La terreur des gouvernants ? Que face à la capitulation de la justice, certains autochtones, « blancs », dirigent les stages de citoyenneté et autres sanctions à coups de barre de fer, signal que la limite est atteinte. On n’en est pas loin, vu l’intensité des colères face à un état impuissant. Et si les indignés passent aux travaux pratiques, quelle sera l’attitude des politiques ? La lâcheté, comme d’habitude.

  2. Et l’on s’étonne que les braves gens se fassent justice eux-même… Mais, est-ce vraiment étonnant?

  3. J’aurais bien des suggestions quant à ces stages de citoyenneté, sur laquelle ces rebuts crachent à l’envi mais je crains de déplaire.

    Le catéchisme de gauche a, depuis longtemps, montré ses limites, fort dépassées.
    Ce n’est pas en tendant l’autre joue qu’on en viendra à bout mais en cognant plus fort qu’eux et suffisamment pour n’avoir pas à y revenir.

  4. C’est plutôt à ces magistrats rose/rouge/vert qu’il faudrait imposer un stage en live « banlieue »…..
    Ils tomberaient de très très haut… et sortiraient « peut-être » de leur insolente certitude…
    On a le droit de rêver…

  5. « restaurer leur « confiance en la justice » »
    Pas de problème, ils l’ont déjà !

  6. La justice n’a pas trainé en RDC après les heurts de jeudi 12 mai (2021) à Kinshasa à l’occasion de la fin du Ramadan sur fonds de rivalités à la tête de la communauté musulmane congolaise. Affrontements entre des membres de cette communauté puis avec des éléments des forces de l’ordre venus s’interposer. Une trentaine de personnes avaient alors été interpellées et ont été déférées devant les juges. Le tribunal de grande instance de Kinshasa–Gombe a déclenché une procédure de flagrance ce vendredi, toute une journée d’instruction et une nuit entière de débat et plaidoirie. Au final, 30 des 41 prévenus ont écopé de condamnations à mort. Un seul a écopé d’une peine de 5 ans et 5 autres ont été acquittés. Avant d’en arriver là, il devrait être possible de déclencher l’article 36 de la Constitution (état de siège) pour une douzaine de jours pour chaque évènement à risque. Car si rien n’est fait, les sauvageons vont prendre du poil de la bête et les honnêtes gens devront s’armer et s’organiser pour protéger leur famille. C’est ce qui est arrivé au Liban au début des années 70 avec la suite que l’on connait. Mais plus récemment, en Nouvelle-Calédonie, les riverains lachés par l’Etat tremblant et hésitant comme d’habitude, ont érigés des baricades aux entrées de leur quartiers et ont pris des tours de garde les armes à la main.

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