Certains mythes ont la vie dure. Tel en est celui de la famille nombreuse des pays sud-européens qui, dans l'imaginaire collectif, n'a pas encore fait place au tableau plus sombre, mais ô combien plus réaliste, de régions à la progéniture maigre et où l'infécondité croît plus fortement qu'ailleurs.

Une récente étude de l'INED le confirme : "C’est en Europe du Sud que [le taux d'infécondité] a le plus augmenté récemment – jusqu’à une femme sur quatre née dans les années 1970 pourrait y rester sans enfant."

Coupables une crise économique persistante et des politiques familiales extrêmement faibles quand ce n'est totalement absentes, qui poussent les jeunes de Grèce, d'Italie et d'Espagne à penser plus à l'émigration qu'à la fondation d'une famille.

À cela s'ajoute un phénomène, difficile à quantifier mais impossible à ignorer : le changement de mentalité des jeunes adultes qui renvoient à plus tard la parentalité, ce que l'étude ne traite que sous l'angle de l'instruction des femmes (accès plus fréquent des femmes aux longues études), sans mot dire, cependant, sur le mortifère bouleversement culturel induit par la montée de l'individualisme, qui a transformé la procréation en sacrifice, l'enfant en entrave au divertissement et à la réalisation de son petit "moi".

C'est particulièrement le cas en Italie, un des pays les plus vieux et vieillissants au monde, dont le taux de natalité de 1,35 enfant par femme est un des plus bas de la planète, et l'âge de la première - et souvent unique – grossesse est de 32 ans (30 ans en France). On y enregistre huit naissances pour mille habitants, contre 10 naissances pour mille dans le reste de l’Union. Mais la situation y est surtout critique, car c'est le premier pays à avoir entrepris ce que les démographes appellent le "crossing-over", le moment où le nombre de plus de 60 ans dépasse celui des plus de 20 ans. Si rien ne change, les Italiens ne seront plus que dix millions à la fin du siècle.

Le reste du continent suit la même involution, mais plus lentement : en Europe de l'Est, l'infécondité est relativement faible mais en augmentation avec "la transition brutale vers le capitalisme, les nouvelles incertitudes du marché de l’emploi, mais aussi la progression des études supérieures et les nouvelles opportunités de carrière".

Si, en France, l'infécondité s'est stabilisée, la reproduction est en perte de vitesse et le taux de natalité, "exceptionnel" pour un pays occidental, de deux par femme a baissé pour la deuxième année consécutive (il est désormais de 1,93 enfant par femme). 

Pour renverser la tendance, il serait vital d'investir dans les politiques natalistes et de soutien à la famille, de revaloriser les filiales professionnelles qui se traduisent en études plus courtes, mais souvent plus rémunératrices à terme (voir le jeune plombier du coin contre le sociologue trentenaire bossant à McDo), et de lancer rien de moins qu'une révolution culturelle : lutter contre l'assouvissement à tout prix des désirs qui génère l'instabilité des couples et abat le sens des responsabilités, recréer le sentiment collectif et, à travers lui, la communauté. Tout ce que nos politiques s'appliquent à déconstruire depuis près de cinquante ans. 

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19 janvier 2017

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