Pour sortir de notre paralysie démocratique : la Suisse, un modèle à suivre ?

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La démocratie directe est mieux adaptée au XXIe siècle que la démocratie représentative pour deux raisons : l'une psychologique et l'autre politique. La raison psychologique concerne le mal-être des individus dans la modernité. L'économie capitaliste a arraché l'humanité à la misère pour la faire entrer dans la corne de l'abondance et du confort. Grâce à la capacité de travail considérable qu'elle exige, elle génère la richesse dont procède le progrès technique réduisant la mortalité infantile et les famines, augmentant l'espérance de vie, etc. Cependant, l'économie capitaliste, à la différence du corporatisme du Moyen Âge, n'a pas pour finalité l'être humain, qui n'est plus qu'un employé louant sa force de travail, créant en lui une crise du sens.
Plus encore, le progrès forme incidemment des sociétés à taille inhumaine, que ce soit à travers l'explosion démographique s'agglutinant dans ces jungles urbaines que sont les grandes métropoles ou à travers la complexité des approvisionnements énergétiques, nutritionnels et des biens de consommation vis-à-vis desquels les individus n'ont aucune prise. À l'inverse, au Moyen Âge, les gens maîtrisaient peu mais totalement : cultivant leur nourriture, confectionnant leurs vêtements, construisant leurs maisons et fabriquant, utilisant ou vendant leurs produits artisanaux.
L'isolement et l'impuissance émanant de cette situation engendrent beaucoup d'anxiété : 65 % des Français pensent que la société, trop artificielle, s'effondrera à cause du réchauffement climatique, d'une guerre civile ou d'un affaissement économique. Plus encore, cette peur incite les individus à se vouer au conformisme d'automate, à la haine de soi et à l'autoritarisme, terreaux fertiles aux mesures liberticides. La démocratie directe suisse atténue cette inquiétude en offrant la possibilité aux citoyens de posséder leur destin politique, économique et social grâce aux référendums obligatoires (pour certaines lois), abrogatifs (toute décision d'élu peut être contestée dans les six mois) et d'initiative populaire (sur tous les sujets).
Concernant la raison politique, la mondialisation devenue chaotique fracture les sociétés. En France, la société est divisée entre conservateurs, mondialistes et populistes. Désormais, aucun candidat n'a de majorité suffisante pour diriger convenablement et les divergences sont telles entre les groupes qu'il lui est difficile de tisser des alliances. En revanche, le référendum peut réunir ponctuellement des majorités entre ces îlots sur des sujets précis : les réformes libérales entre conservateurs et mondialistes, la maîtrise de l'immigration entre populistes et conservateurs, etc.
Cette souplesse référendaire s'applique aussi aux Français issus de l'immigration. Selon l'ex-directeur de la DGSE Pierre Brochand, environ 10 % des immigrés sont assimilés, 45 % sont intégrés et 45 % sont des exclus (ces derniers étant divisés entre séparatistes actifs et une population subissant ce séparatisme). La candidature clivante de Marine Le Pen (ou celle potentielle de Zemmour) sera rejetée par les immigrés non assimilés. Au contraire, un référendum régulant l'immigration pourrait être validé par une frange des intégrés et des exclus qui souffrent du chaos migratoire entravant leur intégration. Le candidat utile sera celui qui prône la démocratie directe afin que la France sorte de sa paralysie et aborde sereinement la mondialisation, à l'instar de la Suisse.
Jean Dutreuil
Jean Dutreuil
Journaliste

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