
Pierre Conesa, présenté comme “ancien haut fonctionnaire au ministère de la Défense”, a rendu public courant décembre 2014 (trois semaines environ avant l’attentat contre Charlie) un rapport [PDF] d’une centaine de pages intitulé “Quelle politique de contre-radicalisation en France ?”.
L’on peut y lire notamment que, si la radicalisation puise l’essentiel de ses racines dans le salafisme, il n’en existe pas moins en France un […] “marché de l’angoisse auquel contribue nombre de personnalités, [qui] n’a pas besoin de nouvelles analyses sur des sujets déjà largement explorés (ex le récent rapport “explosif” de Mr Larrivé sur la radicalisation en milieu carcéral). La modération et le calme manifesté par le ministre de l’Intérieur ont été largement appréciés chez tous les interlocuteurs rencontrés lors de cette étude” […].
La maîtrise et le sang-froid exceptionnels de monsieur Cazeneuve ayant renvoyé le populisme anxiogène dans ses foyers, Cabu et seize de ses camarades pourront, trois semaines plus tard à peine, jouir d’un calme en effet absolu : du fond de leurs cercueils. Cette “maîtrise” n’est pas sans rappeler celle de Hollande concernant l’exemplarité de son gouvernement, et notamment ce ministre en charge de la fraude fiscale, détenteur de comptes à l’étranger.
Mais le plus stupéfiant se trouve pages 80-81, où le plancher rejoint le plafond, c’est-à-dire que nous atteignons le sommet en même temps que nous touchons le fond : l’auteur du rapport y invite le pays à faire son coming out. “La France, un pays musulman qui ne dit pas son nom”, titre en effet ce nouveau chapitre, peu avant la conclusion. Notre stratège se propose d’intégrer la France à l’OCI (Organisation de la coopération islamique), qui lui paraît “la bonne tribune”. “Ce n’est pas”, dit-il, “une organisation strictement religieuse, ses buts étant politiques, économiques, sociaux et culturels”. On croit rêver puisqu’il donne ici une définition parfaite de la religion musulmane : un système englobant tous les aspects de la vie quotidienne. Tour de force sans précédent que seul un idiot utile d’une trempe très particulière pouvait réussir : définir à la perfection une religion à laquelle il ne comprend strictement rien.
Dans le cadre d’une intéressante “confrontation sur les différentes façons de concevoir la tolérance” (que rendrait possible l’adhésion de la France à l’OCI), “les pays musulmans devraient expliquer pourquoi des fatwas s’appliqueraient dans des pays non musulmans comme ce fut le cas […] avec Salman Rushdie”. Pour monsieur Conesa, donc, nul inconvénient à décréter une fatwa en pays musulman. La messe est dite.
25 février 2015