Politique de confinement : autruche dans les banlieues, doigt mouillé ailleurs…

Politique de l'autruche

Elle s’appelle Floriane et n’a pas 25 ans. Policière dans l’Oise, elle a été prise pour cible à la cité des Fleurs, dans le quartier nord de Beauvais, alors qu’avec ses collègues, elle effectuait une patrouille, mardi, visant à faire respecter le confinement dans un endroit signalé comme ne le respectant guère.

Alors qu’elle tentait de verbaliser deux individus, elle a pris une brique en pleine tête. Gravement blessée, elle a été opérée en urgence au CHU d’Amiens. On a heureusement bon espoir qu’elle puisse se remettre rapidement.

Sur Twitter, Christophe Castaner l’a assurée de ses « pensées » - ça lui fait sans doute une très jolie jambe sous le pantalon d'uniforme - et aussi assuré la police de sa « solidarité » - c'est le moins ! - et a affirmé que « tout était mis en œuvre pour que ces actes gravissimes ne restent pas impunis ». On y croit. Il aurait été plus juste et réaliste de dire « pour que ces actes gravissimes ne se reproduisent pas » car cela, en effet, on y travaille : si l'on en croit un article du Canard enchaîné intitulé « Un confinement allégé pour les banlieues » : une « cellule interministérielle de crise a averti l’Élysée : on a un problème dans les banlieues […] mais pas question d’employer les grands moyens : après avoir ordonné quelques contrôles dans les quartiers sensibles, le ministère de l’Intérieur relâche la pression. »

Le remède est imparable et immuable : si la police ne patrouille plus, elle ne risque plus de prendre un pavé ni, d'ailleurs, de constater que le confinement n’est plus respecté. Si l’on casse le thermomètre, il n’y a plus de fièvre. Si l’on ne dépiste pas, il n’y a plus de contaminés. Si l’on ne comptabilise pas les morts dans les EHPAD, il y a moins de létalité. La méthode est toujours la même, éprouvée, plébiscitée et recyclée à l'infini : la gouvernance de l’autruche et du doigt mouillé.

Et Laurent Nuñez d’affirmer, lors d’une visioconférence avec les préfets de zone de défense, que « ce n’est pas une priorité que de faire respecter dans les quartiers les fermetures de commerce et de faire cesser les rassemblements ».

Mais alors, quelle est la priorité ? Verbaliser autour des cimetières la famille éplorée venue rendre un dernier hommage à son aïeule qu’un tri cornélien aux urgences aura sacrifiée, vu son grand âge et faute de respirateurs en nombre suffisant, au jeune des quartiers non confiné ?

Lorsque Éric Ciotti a demandé le déploiement de l’armée dans les quartiers où le confinement n’est pas respecté et où la République est contestée, Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement, s’est indignée et gaussée : « Et pourquoi ne pas mettre l’armée, aussi, dans le centre de Versailles ? » Pourquoi ? Faut-il être gonflé : parce que ce n’est pas là que les policiers en patrouille reçoivent les pavés !

Dans une déclaration récente, le directeur général de l’OMS martelait : « Vous ne pouvez pas combattre un incendie les yeux bandés. » Le monsieur a raison. Il n’est plus temps de jouer à colin-maillard. Ni dans le domaine sanitaire, ni dans le domaine sécuritaire, car tout cela va finir par nous tuer.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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