Lors de son allocution sur l’état de l’Union européenne, à Strasbourg, le 14 septembre dernier, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, habillée aux couleurs de l’Ukraine, appelait les Européens à faire preuve, vis-à-vis de Vladimir Poutine, « de détermination et pas d'apaisement ». Certes, les mois à venir s’annonçaient difficiles mais il ne fallait pas en douter, Poutine allait échouer et l’Europe l’emporter.

Quelques jours plus tard, dans une interview au média allemand Bild, elle montait d’un cran en ajoutant : « Il faut que Poutine perde cette guerre et réponde de ses actes, c'est important pour moi. » Elle indiquait qu’un processus de « collectes de preuves » avait été mis en place depuis le début de l’offensive afin de traduire le président russe devant la Justice internationale. Interrogée sur la probabilité de voir cet événement se produire, elle déclarait : « Je pense que c'est possible. »

Pas d’« apaisement », donc, mais une volonté de souffler le plus fort possible sur les braises. Car ces déclarations renouent avec la politique de surenchère verbale du printemps dernier, lorsque les dirigeants occidentaux annonçaient une victoire militaire totale, une Russie mise à genoux et un Vladimir Poutine chassé du pouvoir. Désormais, le plan inclurait sa comparution devant un tribunal.

Joe Biden, qui était allé très loin dans cette rhétorique mêlant insultes et déclarations bellicistes, avait pourtant prudemment rétropédalé, en juin dernier, à l’occasion d’une tribune dans le New York Times. « Nous ne recherchons pas une guerre entre l’OTAN et la Russie », avait déclaré le président américain. Il avait également pris soin de préciser : « Les États-Unis n’essaieront pas de provoquer son [de Poutine] éviction à Moscou. »

La récente reconquête par Kiev de grands territoires dans la région de Kharkov a manifestement ranimé l’hybris des dirigeants occidentaux. Les médias ne sont pas non plus en reste. En France, le 13 septembre dernier, le magazine Le Point exultait. « Le tsar Poutine est nu », écrivait Luc de Barochez. Le « fiasco russe en Ukraine » allait ébranler en profondeur le régime poutinien car « il n'est pas d'exemple dans l'Histoire dont une défaite militaire d'une telle ampleur n'ait conduit, tôt ou tard, à des bouleversements politiques dans le pays vaincu ».

Le journal Le Monde allait encore plus loin, le 14 septembre, sous la plume de Sylvie Kauffman qui évoquait une conférence ayant eu lieu à Kiev quelques jours plus tôt et au cours de laquelle avait été posée la question de la responsabilité collective du peuple russe.

Un conseiller présidentiel du président Zelensky avait déclaré : « Nous devons gagner pour que les Russes s’engagent sur la voie du repentir. » La conclusion étant qu’il ne faudrait pas seulement un changement de régime en Russie mais « un changement de société ».

On ne sait s’il faut en rire ou en pleurer. Car cette rhétorique, reprise au plus haut niveau, n’est pas sans conséquences.

La première est d’à la fois légitimer et provoquer la « montée aux extrêmes ». Ce conflit n’est plus une confrontation entre puissances souveraines mais la lutte du bien contre le mal. Il n’est donc pas question de se fixer des objectifs limités (qu’il serait possible de négocier) mais, bien plutôt, semble-t-il, de revendiquer et de mener une guerre totale visant l’éradication de l’adversaire transformé en « ennemi absolu ».

La deuxième conséquence est de donner raison à ceux qui, en Russie, considèrent que Poutine est beaucoup trop modéré et qu’il faudrait recourir à des mesures beaucoup plus radicales. Le Figaro évoquait, le 12 septembre dernier, ces « ultra-patriotes [qui] critiquent la stratégie de Vladimir Poutine ». L'emploi d'une rhétorique de guerre théologico-morale leur permet d’affirmer que l’objectif occidental est bien de détruire la Russie.

La troisième conséquence est la négation du risque nucléaire. Il y a, chez Ursula von der Leyen, une forme d’orgueil et de démesure qui la conduit à sous-estimer le danger extrême de la situation. En mai dernier, le chef du renseignement américain, Avril Haines, avertissait pourtant sur la possibilité que le conflit prenne une trajectoire imprévisible, notamment si Poutine considérait faire face à une menace existentielle. Le recours à l'arme nucléaire étant alors, selon elle, un risque à prendre au sérieux.

Ursula von der Leyen ne semble pas y croire. Elle voit déjà Poutine dans le box des accusés de la Cour pénale internationale. En réalité, elle divague au bord de l’abîme.

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17 septembre 2022 à 16:00

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18 commentaires

  1. Madame von der Leyen a t’elle seulement demande aux peuples européens s’ils avaient envie de débattre contre la Russie. Je ne pense pas qu’elle obtienne la majorité. Hors quelques anciens généraux nostalgiques de la guerre froide peu sont chauds pour s’engager dans ce conflit.

  2. Cette femme se prend pour ce qu’elle n’est pas : un chef d’état Elu !! Mais ou se trouve l’opposition !

  3. Von Der Leyen est une extrémiste, psychologiquement malade. Par ailleurs des plans de destruction de la Fédération de Russie sont bien élaborés et objets de réunion occidentales soigneusement filtrées par les médias Français.
    Sur la lancée actuelle, le conflit se terminera très violemment si violemment que les forces seront obligées de négocier. J’espère que les Us dans cette hypothèse connaîtront le feu sur leur sol.
    Heureusement l’histoire ne s’écrit pas d’avance.

  4. Cette femme est dangereuse !
    Alors que l’Allemagne se réarme au nez et à la barbe du monde entier, sans que cela semble déranger quiconque…
    Peut-être faudrait-il stopper les velléités de Von Der Leyen, et lui faire comprendre que les européens ne la suivent, et suivraient pas, et que sont armée n’atteindrait pas, ni Moscou, ni Stalingrad !

  5. On pourrait peut-être commencer par la traduire elle en justice, les chefs d’accusation ne manquent pas et nous serions débarrassés d’un puissant parasyte.

  6. il y a beaucoup de GAMELIN de plateau.( Xavier Moreau).
    Il faudrait donc traduire rétroactivement tous les présidents étatsuniens et autres responsables du communisme.

  7. Encore une dont le pouvoir a touché le cerveau.
    Ses positions contre Wladimir Poutine sont extrêmement dangereuses . Déjà les super sanctions contre la Russie sont un effet boomerang qui déstabilise toute l’Europe, mauvais plan. S’acharner ainsi va déclencher un conflit sans précédent au lieu de tenter des négociations diplomatiques ,son rôle premier. Pendant ce temps le sénile américain doit sourire. Il s’en fout de l’Europe il est plus près de l’extrême onction que du baptême.

  8. VDL souffre de l’HUBRIS!
    Son délire nous mène à la catastrophe, et les Allemands ont largement leur part de responsabilités. A se demander même, si ce n’est pas intentionnel pour leur donner le prétexte de quitter cette U.E faite de bric et de broc, pour ne pas dire de branques!

  9. Il faut virer cette hystérique et tous ceux qui sont avec elle comme Macron et le plus dangereux de tous l’Allemand qui veut faire de l’Allemagne l’armée la plus forte te la mieux équipée d’Europe, Cela ne vous rappelle rien ? Tous de la même génération de malade, de tordus, d’irresponsable et d’une prétention hors normes. Il faudrait les envoyer en première ligne face aux Russes avec comme seule arme un ouvre boite.

  10. Quelle est cette « justice internationale » ? Cette femme est totalement mégalomane ! Ce va-t-en guerre, si on ne l’arrête pas à temps va nous précipiter dans une guerre avec les Russes, arrangeant les « bidons » des Américains qui, comme toujours mettent le monde à feu et à sang pour leurs bas intérêts matériels, camouflés par leur messianisme forcené.

  11. Parmi les nombreux « combattants » de plateaux TV, combien ont fait leur service militaire ?
    Ils sont tellement courageux qu’ils sont prêts à se battre jusqu’au dernier Ukrainien.
    Quant à Ursula, elle a réussi son mandat puisqu’elle est devenue présidente des Etats Unis d’Europe.
    Elle a elle-même réécrit sa fiche de poste…
    J’attends avec impatience le retour de vacances des députés d’opposition, ça commence à faire long !

  12. Une remarque à l’auteur de cet excellent article : n’appelez pas conséquences ce qui ne sont en réalité que des inconséquences !

  13. Nous reparlerons de tout cela dans quelques semaines. Les sondages à l’échelle de TOUS les pays d’Europe montrent que les peuples d’Europe ne partagent pas, loin de là, les vues belliqueuses et américanolâtres (tendance Biden) de Mme von der Layen. La Suède vient de virer de bord. Dans quelques jours l’Italie très vraisemblablement. Et en novembre c’est Biden qui recevra un magistral coup de pied au ***. Et quand les pulls sortiront des armoires, que l’industrie allemande pleurera son gaz en allumant ses centrales à charbon …. que les verts se feront siffler on commencera à discuter sérieusement et Mme von der Layen ira se rasseoir sur son sofa.

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