Plongée en Absurdistan : en France, vaut-il mieux être schizophrène-terroriste qu’immigré en règle ?

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Il y a, dans l’actualité, des nouvelles qui se télescopent et dont on se dit, au premier abord, qu’elles n’ont aucun rapport, et puis, en y regardant de plus près…

Ce matin, par exemple, je découvre que l’ONU s’alarme de ce qu’un drone armé aurait visé une cible et abattu un soldat « ami » sans instructions. Le quadcoptère KARGU-2 est « un drone d'attaque mortelle conçu pour les guerres asymétriques et les opérations antiterroristes ». Il a, tout seul, décidé de « chasser une cible humaine ». Ce n’était pas la bonne ? Tant pis, veux pas le savoir !

J’apprends aussi qu’une autre machine aveugle – l’administration française – a décidé d’expulser du territoire un Algérien de 27 ans, en règle, serveur sur l’une des « terrasses » visées par les attentats du 13 novembre 2013. Précision : il fait partie des victimes indemnisées par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions (FGTI) après le traumatisme subi ce soir-là. Il est resté en poste, dispose d’un CDI, paie ses impôts et trouve ici un réconfort familial puisque ses quatre sœurs habitent aussi en France.

Pourquoi, alors, lui notifier une OQTF (obligation de quitter le territoire français) assortie d’une interdiction de revenir en France pendant trois ans ? Parce qu’il s’est séparé de sa femme, épousée en 2016, ce qui le prive désormais de son « titre de séjour au titre de sa "vie familiale et privée" »», explique 20 Minutes, qui rapporte la chose. Or, nous dit-on, « une "communauté de vie" doit être justifiée pour les conjoints étrangers bénéficiant de ce type de carte de séjour ».

Dura lex, sed lex, « la loi est dure, mais c’est la loi », disaient les Anciens. Fort bien. Alors, qu’on l’applique à tous avec la même rigueur.

La préfecture se justifie : la demande de renouvellement de titre de séjour n’a pas été faite comme il aurait fallu, il eût été préférable de la faire au titre de salarié. Oui, mais voilà, l’avocat dudit salarié dit avoir « insisté pour que la demande de renouvellement se fasse sur un fondement familial, parce que c’était le plus pertinent et le plus protecteur » pour son client. « J’avais peur que les conséquences de la crise sanitaire liées au Covid-19 dans son secteur d’activité lui soient défavorables dans le cadre de cette démarche. » On le comprend.

Mais dura lex, sed lex, bis repetita, et l’on ne saurait transiger !

L’administration manque autant de souplesse que de bon sens. L’avocat fait ainsi remarquer que son client, partie civile dans le dossier des attentats, n’aura « pas le droit d’assister au procès qui doit commencer en septembre ». Manque d’humanité, aussi… sauf quand l’immigré se fait terroriste au couteau et à la petite semaine, auquel cas on se précipite pour lui trouver des circonstances atténuantes et un psychiatre compatissant pour lui éviter la geôle.

L’évidence s’impose donc : la loi est dure pour ceux qui la respectent. Pour les autres, aucun souci : l’administration et la Justice ne leur courent pas après. Trop dangereux. Mieux vaut, dans la France d’aujourd’hui, être dealer-caillasseur de flics que serveur.

L’avocat, soulignant que son client est arrivé en France quand il était encore mineur et a toujours été en règle, annonce qu’il va déposer un recours au tribunal administratif de Paris.
Interpellée, Marlène Schiappa dit qu’elle va demander un « réexamen » de la situation.
C’est comme ça, en Absurdistan : il faut l’intervention d’un ministre pour réaliser ce qui relève du bon sens le plus élémentaire !

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Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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